D’après Bénédicte Monville De Cecco, conseillère régionale Europe-Écologie Les Verts en Seine-et-Marne, suivi de l’article de Sylvain Deleuze pour Le Parisien le 16 février 2017.
Le gouvernement socialiste soumet à consultation publique un projet de décret en conseil d'État qui prévoit d'ouvrir la possibilité d'une autorisation permettant, dans le périmètre d'une "forêt de protection", de mener des travaux - de fouilles et sondages archéologiques et/ou - de recherche ou d'exploitation souterraine de ressources minérales.
Qu’est-ce qu’une Forêt de protection ? Ce sont des forêts reconnues nécessaires au maintien des terres en montagne et sur les pentes, notamment pour éviter les avalanches, les érosions et les envahissements des eaux et des sables. Ce « régime forestier spécial » d’origine, a été ensuite étendu aux forêts situées aux abords des agglomérations et à celles dont le maintien s’impose pour des raisons écologiques ou pour le bien de la population. Dans ce cadre, aucun défrichement, aucune fouille ou extraction de matériaux, aucune emprise d’infrastructures publique ou privée et aucun exhaussement du sol ou dépôt ne peuvent être réalisés dans une forêt de protection.
Pour l'instant, seule la recherche en eau est autorisée sur un périmètre classé "forêt de protection". Et comme celles et ceux qui rédigent ce genre de décrets ne sont pas des imbéciles, même s'ils travaillent au bonheur d'intérêts bien particuliers, ils enrobent leur décret avec cette phrase :
"Cette modification du code forestier vise à créer une base juridique pour traiter certaines situations actuellement rencontrées dans les forêts périurbaines, objet de nombreuses attentes sociales mais dont le classement en forêt de protection ne peut être prononcé à ce jour, faute de l’existence d’un régime spécial permettant de réaliser des travaux de fouilles archéologiques ou d’extraction de matériau au sein du massif classé."
Comprenez, si nous n'autorisons pas la recherche ou l'exploitation de ressources minérales dans un périmètre classé "forêt de protection" alors des massifs forestiers non classés mais où ont déjà lieu des activités de recherche ou d'exploitation de ressources minérales ne pourront pas l'être. Énorme.
Vous pouvez adresser vos observations ici : consultations.foretdeprotection.dgpe@agriculture.gouv.fr, obtenir plus d'informations ici : http://agriculture.gouv.fr/consultation-du-public-sur-un-projet-de-decret-en-conseil-detat-relatif-au-regime-special-applicable. Le projet de décret est signé par les ministres de l'agriculture, de l'industrie, de l'environnement et de la culture.
Il est à noter également que d'importantes parcelles de la forêt de Fontainebleau vont être déclassées pour permettre des aménagements urbains : http://www.seine-et-marne.gouv.fr/Politiques-publiques/Environnement-et-cadre-de-vie/Expropriations-servitudes/Avis-d-enquete-publique/Modification-du-perimetre-Foret-de-Protection-Massif-de-Fontainebleau. Ici, l'enquête n'aura duré que deux jours !
Les deux dossiers ne sont pas liés a priori sinon qu'ils éclairent d'une manière particulièrement crue les logiques d'appropriation de la nature.
Bénédicte Monville De Cecco, Europe Ecologie Les Verts
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Elus et associations sont surpris et inquiets : un projet de décret vise en effet à modifier le régime spécial des forêts de protection, dont cinq sont franciliennes. Mais le ministère de l’Agriculture semble déjà faire machine arrière...
Un projet de décret du ministère de l’Agriculture, consultable jusqu’au 20 février sur son site Internet, visant à modifier le régime spécial des forêts de protection, a mis le feu aux poudres. Ce texte ouvrirait la possibilité « de réaliser des travaux de fouille archéologique, ainsi que de recherche ou d’exploitation souterraine des substances minérales d’intérêt national ou régional dans les forêts de protection ». Cela, à la grande surprise de nombreux élus et responsables d’associations de défense de l’environnement. Le décret concerne les forêts de Fontainebleau (29 815 ha en Seine-et-Marne), de Rambouillet (25 280 ha dans les Yvelines), de Fausses-Reposes (615 ha dans les Hauts-de-Seine), de Sénart (3 410 ha en Essonne) et de l’Arc-Boisé (2 900 ha à cheval sur l’Essonne, le Val-de-Marne et la Seine-et-Marne).
« J’aimerais savoir ce qui se cache derrière ce texte », s’inquiète Valérie Lacroute, député-maire (LR) de Nemours, (77) qui se dit stupéfiée par « sa mise en vigueur, le 1er mars : c’est un peu fort de café ! » « Nous sommes face à une logique d’accaparement de la nature », s’emporte Bénédicte Monville-De Cecco, conseillère régionale (Europe-Écologie les Verts) et conseillère municipale à Melun (77), qui parle même de « catastrophe ». « On est encore en période de consultation publique, mais on ne peut pas à la fois ouvrir et circonscrire », souligne le cabinet du président du conseil départemental, Jean-Jacques Barbaux (LR) qui estime « ce décret dangereux et non souhaitable » et espère que « des amendements seront apportés ».
Pour Denis Bauchard, le président de l’association des Amis de la forêt de Fontainebleau, « ce texte est ambigu ». Immédiatement, il s’inquiète d’une possible exploitation « du sable de Fontainebleau, de très bonne réputation, qui pourrait être utilisée pour les optiques de précision. » « On est dans un double discours, ce n’est pas cohérent », constate Bernard Bruneau, président de la fédération Nature Environnement 77, affiliée à France Nature Environnement, et qui a appris ce projet voici deux jours. « Les forêts de protection ne sont pas des variables d’ajustement, sinon ce classement ne sert à rien. »
Vigilante à l’échelle européenne, l’ONG allemande Sauvons la forêt, qui a lancé une pétition comptabilisant plus de 32 000 signatures hier, estime qu’« offrir la possibilité de mener des travaux de recherche ou d’exploitation souterraine des ressources minérales est une régression vis-à-vis des réglementations environnementales en vigueur. »
Face aux inquiétudes des élus et des associatifs, le ministère de l’Agriculture précisait hier soir que ce projet de décret « a été rédigé pour permettre le classement de quatre forêts : celles de Bondy (Seine-Saint-Denis), Montmorency et l’Isle d’Adam (Val-d’Oise) en Ile-de-France, ainsi que le massif forestier de Haye (Meurthe-et-Moselle) » Un peu plus tôt, il s’agissait « uniquement d’autoriser des fouilles archéologiques ou des travaux de recherche ou d’exploitation souterraine de substances minérales, pas de carrières à ciel ouvert ou de grands ouvrages. » En l’occurrence, l’exploitation du gypse dans les nouvelles forêts en cours de classement.
« Le ministère nous a affirmé qu’il allait reprendre le décret, précise Nicole Bricq, sénatrice (PS) de Seine-et-Marne. On va rester vigilant à la nouvelle rédaction. Par ailleurs, il n’y aura pas de rétroactivité. » Les forêts déjà classées en forêt de protection, comme celles de Fontainebleau ou Rambouillet, ne seraient donc pas concernées. Verdict le 1er mars. Face à la grogne, le ministère a tout de même prévu une rencontre avec des associations de défense environnementale, cet après-midi.
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