Le politologue belge François Gemenne déconstruit l’expression « appel d’air », qui déshumanise les migrants et repose sur un mensonge. Entretien par Ingrid Merckx le 26 avril 2017 pour Politis à lire sur www.politis.fr . Lire aussi par François Gemenne Migrants : dix raisons de les accueillir dignement en Europe et d'ouvrir les frontières et Dynamiques nouvelles des migrations internationales. Mobilisons-nous localement avec La Grande Grande Parade Métèque qui aura lieu cette année le samedi 1er juillet 2017. Premiers chars en construction début mai, tous les détails et l'adhésion sur cf http://www.lagrandeparademeteque.org/.
Spécialiste en géopolitique de l’environnement, François Gemenne explique en quoi l’idée d’appel d’air fait fi des études sérieuses sur les migrations pour servir le « bon sens populaire », alimenter la peur brandie par l’extrême droite et justifier des politiques d’accueil restrictives. Il rappelle que la France n’est plus un pays attirant et que ce qui pousse les gens à choisir un pays c’est la langue, la famille éventuellement déjà établie et la possibilité d’y trouver du travail.
D’où vient la notion d’appel d’air ? A-t-elle une réalité ? La thèse de l’appel d’air suppose que les migrants maîtrisent leur trajet et le choix de leur destination. Cette vision tient-elle face à une guerre, à une catastrophe, à des persécutions, à la misère… ?
L’idée de l’appel d’air, c’est qu’un pays qui aurait une politique migratoire plus ouverte, ou une politique sociale plus généreuse, attirerait automatiquement un grand nombre de migrants. Or, on sait que les politiques du pays d’accueil n’entrent pas en ligne de compte dans le choix du pays de destination : ce qui compte, c’est la maîtrise de la langue, la présence antérieure de membres de sa famille ou de sa communauté, et la possibilité d’y trouver un travail.
C’est encore moins le cas lorsqu’on doit fuir une situation désespérée (...)
François Gemenne Chercheur en science politique à l’université de Liège (Cedem) et à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines (Cearc), chercheur associé au Ceri/Sciences Po.