Un dossier intéressant des Conseillers Verts Socialistes Unitaires et Citoyens de Plaine Commune :
sur un sujet qui concerne aussi la ville des Lilas :
Le projet Autolib’ de la mairie de Paris est un service de location horaire de véhicules électriques qui seront mis en libre-service et en trace directe (oneway). 3 000 véhicules seront accessibles 24 heures/24 et 7 jours/7. 1 000 stations seront réparties sur Paris (700 intra-muros) et en proche banlieue. Les usagers pourront réserver une place sur la zone d’arrivée. Des formules avec ou sans abonnement sont envisagées (Source : dossier de presse d’Autolib’). Ludovic Bu, co-auteur de Les transports, la planète et le citoyen, spécialiste des transports, nous livre son point de vue sur ce projet.
Quels sont, pour vous, les problèmes que pose le projet Autolib’ ?
Ludovic Bu : l’idée de départ qui vise à vouloir avoir moins de voitures dans les rues est bonne. Mais la concrétisation qui se dessine semble avoir pris une autre voie. Le principal problème d’Autolib’ est son fonctionnement en aller simple (oneway). La question du trajet retour ne se posera pas, celle du stationnement non plus. Ce qui simplifiera l’usage de la voiture. Or, si on veut que les usagers s’interrogent sur le meilleur moyen de déplacement trajet après trajet, il faut que la voiture soit aussi compliquée à utiliser qu’un autre mode de transport.
Il est aussi probable que les gens qui possèdent une voiture ne vont pas l’abandonner grâce à Autolib’. Le manque de fiabilité prévisible du système, notamment en matière de disponibilité des véhicules, ne les y incitera pas. C’est donc ceux qui n’ont pas de voiture qui vont utiliser Autolib’. Probablement en partie en substitution des transports en commun. Ce projet risque tout simplement de mettre encore plus de voitures sur les routes.
L’expérience du Vélib’ (Velcom’ à Plaine commune) peut-elle nous éclairer sur ce projet de voiture en libre-service ?
Ludovic Bu : si on regarde Vélib’, on voit que ce système est intéressant, mais peu fiable. Il a remis plein de gens sur un vélo, ce qui est très bien. Mais on n’est jamais sûr d’en trouver un au moment et à l’endroit où l’on en a besoin. Pour les utilisateurs occasionnels, ce n’est pas un problème. Par contre, c’en est un pour ceux qui l’utilisent à titre professionnel ou très régulièrement. Aujourd’hui, ceux-là n’utilisent plus Vélib’ car ils se sont acheté un vélo, qui est toujours à leur disposition. Si Autolib’ donnait le même résultat avec les voitures, il pourrait entraîner une augmentation du parc de véhicules !
On peut avoir les mêmes interrogations sur la question des flux. On voit bien que pour Vélib’, on ne sait pas les gérer. Le matin, lorsque les Franciliens iront de la périphérie vers Paris, on aura des stations Autolib’ vides en périphérie et pleines autour des gares et dans le centre. Et l’inverse le soir. Il faudrait alors ré-achalander les stations de périphérie dans la journée pour libérer des places au centre. En camion, comme pour les Vélibs’ ? Cela semble peu crédible...
Pour conclure, que pensez-vous du projet Autolib’ ? Ludovic Bu : j’aurais préféré qu’on encourage les systèmes existants, comme l’autopartage. Dans ce cadre, les gens prennent une voiture qu’ils ramènent à son point de départ. Ce qui fait qu’ils ne l’utilisent que lorsqu’ils en ont vraiment besoin (pour déplacer des choses lourdes, pour aller dans des zones sans transports en commun, etc.).
De même, il y a plein d’offres de transport, même en banlieue (bus, tram, RER, pistes cyclables…). Mais on les utilise mal. Par exemple, par méconnaissance, les gens font quasi toujours les mêmes trajets avec les mêmes lignes de bus. Il faudrait leur faire connaître toutes les possibilités qui s’offrent à eux. Mais au lieu de rechercher l’amélioration, l’optimisation de l’existant, ne serait-ce que par la communication (plan des pistes cyclables, diffusion des horaires des bus...), on crée de nouveaux services. In fine, on aura un existant non optimisé et un nouveau service bancal. Il faut également rappeler que la principale raison de prendre sa voiture, c’est qu’elle est simple à utiliser, elle est toujours disponible. C’est plus compliqué d’utiliser les transports en commun ou le vélo (il faut connaître les horaires, les lignes, le maillage des pistes cyclables...).
Et même marcher est parfois compliqué ! Si on veut obtenir un changement d’habitudes, c’est là qu’il faut investir !
Les transports, la planète et le citoyen, Ludovic Bu, Marc Fontanès, Olivier Razemon. Préface de Francis Beaucire. Postface de Daniel Cohn-Bendit. Février 2010. édition Rue de l’échiquier, collection Les petits ruisseaux, 12€.
L’ autopartage, c’est la mise en commun d’un ou plusieurs véhicules, à l’usage de plusieurs utilisateurs pour des trajets différents à des moments différents. Le service d’autopartage est un système de location de courte durée, géré par une entreprise ou une association. Il est réservé aux personnes abonnées au service.
Le ou les véhicules appartiennent à la société. En échange d’une adhésion et d’un paiement à la consommation, sur simple appel téléphonique ou réservation par internet d’un abonné, la société d’autopartage met à sa disposition une flotte de véhicules disponibles 24 heures / 24.
Le principe “d’aller-retour” assure à l’usager un retour qui permet d’amortir le temps d’immobilisation du véhicule et d’assurer une complémentarité entre l’usage des salariés (en semaine) et des résidents (en soirée et le week-end). Sur Paris, il existe déjà plusieurs sociétés d’autopartage dont Caisse commune pionnière en France.
Sources :
L’autopartage dans la sphère privée, étude réalisée par l’ADETEC pour l’ADEME et le MEEDDM dans le cadre du PREDIT, octobre 2009.
L’autopartage en France et en Europe, Certu, décembre 2008.
Une voiture d’autopartage remplace entre quatre et huit voitures privées.
Le système de facturation de l’autopartage incite les utilisateurs à délaisser leur voiture au profit des transports en commun, du vélo ou de la marche. Ils peuvent choisir leur mode de transport parmi un large éventail de possibilités.
Les utilisateurs de l’autopartage réduisent ainsi leur nombre de kilomètres parcourus en voiture, leur consommation d’énergie et les émissions de polluants ; leurs trajets sont réalisés avec un taux d’occupation supérieur à la moyenne.
Enfin, généralement, les opérateurs d’autopartage mettent à disposition des modèles de véhicules récents qui sont moins polluants et plus économiques.
À titre d’exemple, des études menées en Suisse et en Allemagne ont montré que les nouveaux adhérents à l’autopartage avaient réduit leurs déplacements en voiture de 1 000 à 1 600 Km/an et doublé le kilométrage en transports en commun. L’autopartage à Brême révèle, lors d’une analyse portant sur un cycle de vie, une réduction des émissions de CO2 d’environ 800 tonnes.
Source : L’autopartage en France et en Europe, Certu, décembre 2008. et Projet Européen MOSES.
rent m 02/04/2017 13:30