Un compte-rendu du rassemblement des anti gaz de schiste, publié par Poetes Indignes le 27/08/2011.
Le rassemblement des anti gaz de schiste à Lézan, dans le Gard, le 26 août 2011 ©A.Chauvet/20 Minutes
RASSEMBLEMENT – De l’interdiction des gaz de schiste à la sortie du capitalisme, il n’y a qu’un pas pour les militants rassemblés dans les Cévennes…
Les tentes sont plantées, le fromage de chèvre bio est arrivé et les ateliers de sculpture sur bois ont commencé. Le petit village de Lézan, dans les Cévennes, accueille pendant trois jours le rassemblement des collectifs anti-gaz de schiste. Les militants sont venus pour la plupart des environs, quadrillés par trois permis d’exploration: le permis du bassin d’Alès, de la plaine d’Alès et de Navacelles représentent au total 1.000km². Mais loin de se contenter de parler fracturation hydraulique ou pollution des nappes phréatiques, les anti-schiste ont convié les anti-nucléaire, altermondialistes et objecteurs de croissance à venir donner leur vision de la transition énergétique. Et les débats vont parfois jusqu’à évoquer la sortie du capitalisme, les indignés et le printemps arabe.
Le débat sur la «course aux énergies fossiles» dérape rapidement vers une remise en cause de la société. Dans l’assistance, on veut «se passer des banques et des grandes surfaces, voire même des politiciens». A la tribune, Maxime Combes, d’Attac, confirme: «La société de demain est en germe ici. Il faut que l’énergie devienne un bien commun, que l’on s’oppose à la marchandisation du monde.» Le capitalisme en prend pour son grade, les indignés sont applaudis, on regarde vers la Tunisie en pensant que demain peut-être il pourrait se passer la même chose ici.
A la sortie de la table-ronde, François Veillerette, co-auteur de Le vrai scandale des gaz de schiste(éd. Les liens qui libèrent), militant au sein de Générations futures et élu régional Europe Ecologie Les Verts en Picardie, explique le glissement: «Le débat sur la politique énergétique entraîne un débat sur la société de demain. Mais en tant qu’élu, je pense que le politique reste un échelon indispensable s’il est poussé et éclairé par les experts et les citoyens.»
Mais justement, les politiques, où sont-ils? Pas de ténor à Lézan, pas même José Bové, pionnier de la lutte anti-gaz de schiste. «Il a été un peu trop malmené, confie Olivier Florens, jeune élu écologiste au Conseil général du Vaucluse . S’il agit, on dit qu’il récupère une cause, et s’il ne fait rien on le traite de pourri.» Edouard Chaulet, maire communiste «é-coco-lo» de Barjac (Gard), est simplement venu en voisin: dans sa commune, située sur la zone du permis d’Alès, des collectifs anti-schiste se sont formés. «Mon rôle est d’alerter et aider les collectifs», pense-t-il.
Si les politiques sont absents, c’est peut-être aussi parce qu’ils n’ont pas de réponse concrète à la question de la transition énergétique*. Les représentants du Parti communiste, du Parti de gauche ou du NPA qui ont exposé leurs points de vue en fin de journée s’accordaient sur une nécessaire sobriété, une sortie du nucléaire à plus ou moins court terme et une relocalisation de la production d’énergie. Rien de très précis. Olivier Florens, lui, a réussi à faire installer des panneaux solaires sur les collèges du Vaucluse. Un petit pas pour commencer à changer le monde.
à Lézan, Audrey Chauvet
* en revanche, Europe Ecologie Les Verts a fait de la transition énergétique un des axes principaux de son programme pour 2012, ainsi qu'en témoignait notre compte-rendu des Journées d'été d'Europe Ecologie Les Verts. Nous y reviendrons (note Vert Lilas).
Et voilà le résultat de ces travaux :
Convergence citoyenne pour une transition énergétique
Déclaration de Lézan - Gard, le 28 août 2011
Préambule
Notre Convergence citoyenne pour une transition énergétique est le fruit d'une prise de conscience née de la mobilisation contre l'extraction des gaz et huiles de schiste. Nous avons élaboré cette déclaration les 26, 27 et 28 août, et validée en assemblée plénière le 28 août.
Pour assurer l’avenir des générations futures, la Convergence, affirme comme nécessité :
• la reprise en main par les citoyens des décisions qui les concernent ;
• le refus de la marchandisation de la nature et de ses ressources, notamment
en dénonçant les pièges du capitalisme vert ;
• la définition de la terre, de l'eau, de l’air, de l'énergie, et du vivant comme
biens communs inaliénables et accessibles à tous.
Remettant en cause le système économique et productiviste dominant, la Convergence se donne une feuille de route.
1 : Instaurer le contrôle citoyen des instances politiques soumises à la logique des multinationales revient à instaurer :
• Une démocratie directe grâce des espaces citoyens d'échanges, d'information,
de confrontation et de décisions ;
• Une assemblée citoyenne d’expertise plurielle et transparente qui exclue tout
conflit d’intérêt ;
• La séparation entre les pouvoirs financiers et les médias ;
• Un travail de convergence sur les questions de société avec le mouvement
social et ses organisations.
2 : S'engager sans délai pour la transition énergétique suppose de :
• Réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre à la hauteur des exigences exprimées par l'accord des peuples de Cochabamba, accord adopté par la Convergence de Lézan et joint en annexe de la présente déclaration ;
• Se libérer d’une surconsommation qui coûte plus aux pauvres qu’aux riches ;
• S’orienter vers une sobriété et une efficacité énergétique ;
• Arrêter la course aux énergies fossiles ;
• Abandonner toute expérimentation, exploration et exploitation d'hydrocarbures compris dans la roche mère et off-shore ;
• Arrêter le nucléaire civil et militaire ;
• Arrêter la production et l’utilisation industrielles des agro-carburants ;
• Mettre la priorité sur le financement public de la recherche et des expérimentations citoyennes sur les énergies renouvelables ;
• Libérer les brevets captés par les multinationales ;
• Organiser la relocalisation avec la réappropriation publique et territoriale des moyens de production et de distribution de l'énergie (régies communales, coopératives, sociétés d'intérêt collectif, etc.) incluant systématiquement le contrôle citoyen ;
• Réorienter les politiques publiques des secteurs énergivores tels que l’agriculture intensive, les transports, le logement et l’urbanisme, l’industrie et la grande distribution ;
• Exiger la reconversion des filières concernées en accord avec les travailleurs et les usagers.
3 / Organiser dès à présent la convergence des luttes nous engage à :
• Articuler les mobilisations contre les gaz et huile de schiste, le nucléaire, les OGM, les incinérateurs, les agro-carburants et toutes les luttes sociales et environnementales ;
• Faire converger les luttes, les mobilisations, les alternatives et les expérimentations en associant le combat écologique aux luttes sociales ;
• Œuvrer pour l'émergence d'un nouveau projet de civilisation indispensable face aux enjeux climatiques, à l'épuisement des ressources naturelles et plus généralement au chaos dans lequel nous mène le capitalisme ;
• Poursuivre régulièrement la Convergence citoyenne initiée à Lézan, en se connectant avec les mobilisations du local au mondial ;
• Inscrire nos mobilisations dans un calendrier international contre le G20, du 1er au 4 novembre 2011, lors du sommet sur le climat de l’ONU à Durban début décembre 2011, lors du Forum Alternatif Mondial de l’Eau du 10 au 18 mars 2012, lors du Sommet Rio + 20 début juin 2012.
La Convergence citoyenne pour une transition énergétique s'associe à la pétition portée par « Los Indignados » auprès de la Commission européenne pour la sortie du nucléaire, contre l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures compris dans la roche mère, contre la culture et la commercialisation des OGM et pour un audit des dettes des Etats européens.
Globalisons la lutte, globalisons l’espérance !
Cette déclaration est partagée par les partenaires de la « Convergence citoyenne pour une transition énergétique » et ceux qui veulent s’y joindre pour la soutenir.
Contact : organisation@convergenceenergetique.org
Parmi les organisations représentées : Comité de pilotage de la Convergence Citoyenne pour une Transition Énergétique - Coordination Nationale de Collectifs contre le Gaz de Schiste - Faucheurs Volontaires - Los Indignados - ATTAC France - Amis de la Terre – Greenpeace - Sortir du Nucléaire - Cornouailles Stop nucléaire – Netoyens - Réseau Cohérence - Via Campesina - Collectifs du Québec, de Basse Saxe, de Pologne, des Pays Bas ...
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