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7 mars 2017 2 07 /03 /mars /2017 17:45

Pour la première fois, féministes et syndicats appellent à la grève lors de la Journée internationale des droits des femmes. Le 7 mars 2017 pour Le Monde. Lire aussi Sexisme sur la voix publique !

On a marre des mots, on veut des actions. " Les propos de Raphaëlle Rémy-Leleu, porte-parole d'Osez le féminisme (OLF), résument bien la tonalité nouvelle de la prochaine Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars. Pour la première fois, trois syndicats (CGT, FSU, Solidaires), de nombreuses associations féministes et des organisations étudiantes appellent à la grève, mercredi à 15 h 40. " Ce 8 mars est totalement inédit, affirme Suzy Rojtman, porte-parole du Collectif national pour les droits des femmes (CNDF). Nous voulons lui redonner son caractère revendicatif originel. "

L'égalité des salaires et des carrières est la principale exigence. " Les femmes de France sont toujours payées 26 % de moins que les hommes. C'est comme si elles arrêtaient de travailler à 15 h 40 ", poursuit Mme Rémy-Leleu. L'idée de l'appel à la grève vient des syndicats. " L'objectif est de mettre le patronat devant ses responsabilités, affirme Sophie Binet, chargée de l'égalité femmes-hommes à la CGT. Dans 60 % des entreprises, il n'y a pas d'accord ou de plan d'action pour atteindre l'égalité salariale. " La situation varie fortement selon leur taille.

Vingt " exigences "

Alors que la première loi sur l'égalité professionnelle date de 1983, des sanctions financières ont été prononcées pour la première fois, à partir de janvier 2013, contre 109 entreprises. Plus de 90 % des grandes entreprises sont désormais couvertes par un accord, contre 67 % de celles de 300 à 999 salariés, et 35 % de celles de 50 à 299 salariées. La sanction est toujours utilisée en dernier recours.

De multiples facteurs expliquent que les inégalités perdurent : les femmes subissent les conséquences des arrêts liés à leur maternité, effectuent toujours l'essentiel des tâches domestiques, ce qui freine leur investissement professionnel, font moins d'heures supplémentaires, travaillent davantage à temps partiel, occupent des emplois moins qualifiés, et sont très majoritaires dans les filières les moins valorisées (nettoyage, services à la personne).

En équivalent temps plein, le différentiel s'élevait à 19 % en 2012, contre 21 % en 2002. L'écart atteint 26 % en incluant dans le calcul le travail à temps partiel. Cependant, à temps de travail égal, 9 % des écarts de salaires ne s'expliquent ni par des différences de qualification, de filières, de taille d'entreprise, ou de niveau de responsabilité.

" Sur le terrain, les militantes en ont assez d'attendre, poursuit Mme Rémy-Leleu. Nous avons besoin d'un rapport de force. " En particulier pendant une campagne électorale. Le choix de cette mobilisation contraste avec celui effectué en 2012. Le collectif Féministes en mouvement avait à l'époque invité les candidats à l'élection présidentielle à présenter leurs propositions dans une salle de spectacle à Paris.

" Cette année, nous ne voulions pas interpeller les candidats et obtenir des promesses qui n'engagent que ceux qui les croient, affirme Fatima Benomar, porte-parole des Efronté-e-s. L'égalité salariale faisait partie de soixante engagements de François Hollande. " " Ce type de procédé offre une tribune aux élus et provoque une inflation de déclarations auxquelles ils ne se sentent pas forcément liés ", renchérit Mme Rojtman.

Cette fois, les militants présenteront vingt " exigences " : sanctions contre les entreprises et administrations, revalorisation des métiers féminisés, rattrapage immédiat des salaires, fin des CDD et du temps partiel imposé, mixité des formations et des métiers…

Ce mouvement s'inscrit dans une dynamique nationale après la mobilisation contre la loi travail, mais aussi internationale. Les mouvements de grève des Polonaises contre l'interdiction de l'IVG, des Islandaises en faveur de l'égalité salariale sont cités en exemple. Les féministes françaises ont aussi manifesté le 21 janvier au moment de la Women's March américaine contre Donald Trump.

Mobilisation virale

Autre innovation, la jonction entre les associations féministes (OLF, Planning familial, CNDF, Femmes solidaires, Marche mondiale des femmes, Femen…) et des mouvements actifs sur Internet. L'initiative de la mobilisation à un moment symbolique revient à l'un d'entre eux, Les Glorieuses, qui avait lancé un appel à la mobilisation le 7 novembre à 16 h 34 (fin de l'année de travail des femmes en tenant compte du différentiel de salaire). " L'objectif était de favoriser une prise de conscience, explique Rebecca Amsellem, fondatrice de la lettre d'information Les Glorieuses, qui compte 40 000 abonnés. Les Islandaises se mobilisent depuis des décennies et c'est le pays où les inégalités salariales sont les plus faibles en Europe. "

Pour elle, la grève n'est pas le seul moyen d'agir. " Chacun doit s'approprier la thématique comme il le souhaite, poursuit la jeune femme. En faisant grève, en défilant, en privilégiant les commerces dirigés par des femmes, en postant quelque chose sur les réseaux sociaux… " La mobilisation sera aussi virale.

" Nous avons une expertise complémentaire à celle de la génération précédente par notre connaissance des réseaux sociaux et de la communication, observe Anaïs Bourdet, fondatrice en 2012 du site Paye ta shnek, qui rassemble des témoignages de harcèlement de rue et compte 210 000 abonnés, et soutient l'appel du 8 mars. Ces outils démocratisent l'engagement. Tout un chacun peut être militant, même sans descendre dans la rue avec une pancarte. Nous devons donner un maximum d'outils pour que chacun puisse se mobiliser. "

La mobilisation en ligne permettra, par exemple, de dénoncer la récupération commerciale de la Journée des femmes (et non de la femme), parfois transformée selon Mme Bourdet en " Saint-Valentin bis ". Le site " journée de l'infâme " épinglera ces initiatives.

Gaëlle Dupont

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" Un jour sans femmes " dans près de cinquante pays

Que se passerait-il si les femmes cessaient au même moment toute activité, au travail et à la maison ? C'est le pari de la grève internationale des femmes, prévue dans une cinquantaine de pays mercredi 8 mars, en réponse à la violence " sociale, légale, politique, psychologique et verbale que les femmes subissent sous différentes latitudes ". Et c'est une première. Jamais les actions organisées lors de la Journée internationale des droits des femmes ne l'avaient été de manière coordonnée dans le monde.

L'idée d'une grève est née en Pologne, après la manifestation du 3 octobre 2016. Ce jour-là, des milliers de femmes vêtues de noir, s'inspirant des Islandaises qui avaient massivement fait grève en 1975, -défilent à Varsovie contre un projet de loi visant à interdire l'avortement. Quelques jours plus tard, c'est au tour des Sud-Coréennes de descendre dans la rue pour -défendre l'IVG. Puis, le 19 octobre, des centaines de milliers de femmes de presque toute l'Amérique latine manifestent à l'appel du collectif argentin Ni una menos (" pas une femme de moins ") contre les violences machistes.

Grève " sexuelle et reproductive "

" Partout, les mêmes modes d'action, mais aussi les mêmes mots utilisés contre les féministes, comme “féminazi”, constate la militante féministe polonaise Klementyna Suchanow. Dès lors, je me suis demandé : pourquoi ne pas coordonner les mouvements de protestation ? " Après un échange avec une féministe argentine, un groupe Facebook est créé, bientôt rejoint par des femmes d'Irlande, d'Israël, d'Italie… Le " jour sans femmes " était lancé.

Un seul slogan (" La solidarité est notre arme "), mais une foultitude de modes d'action. Chaque organisation est libre de choisir sa stratégie, ses mots d'ordre et ses revendications : manifestations, arrêt des activités professionnelles pendant la journée ou quelques heures, port de vêtements noirs, rouges ou mauves (la couleur du féminisme), grève du sexe, des tâches ménagères… Tout est envisageable.

Aux États-Unis, la Women's March, collectif qui avait organisé la manifestation du 21 janvier contre Donald Trump, s'est, elle aussi, ralliée au mouvement. L'Amérique latine insiste sur les " féminicides " ou le droit à l'avortement. En Russie, où les manifestations risquent d'être interdites, la grève sera " sexuelle et reproductive ", explique le site international.

Angeline Montoya

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7 mars 2017 2 07 /03 /mars /2017 09:15

Pour Denez L’Hostis (France Nature Environnement) et Didier Livio (Deloitte développement durable), cinq expériences innovantes menées à grande échelle montre qu’une autre agriculture est possible. Tribune parue le 3 mars 2017 dans Le Monde. Lire aussi : Pascal Canfin : « Refonder un nouveau pacte agricole et alimentaire ».

Et aussi Réduire les pesticides n’altère pas les rendements.,                              Pour l’agriculture de demain, protégeons les sols européens,                               Pour un autre monde agricole et                                                                L'agroécologie n'est pas que pour les bobos !

« Un nouveau contrat se dessine entre l’agriculture et la société. Fondé sur l’agroécologie et valorisé grâce à la HVE, ce contrat redonne un rôle central aux agriculteurs, et permet aux exploitations agricoles de retrouver une dynamique économique positive en attirant de nouveaux talents ». Lymatly Photos/Flickr/CC BY 2.0

« Un nouveau contrat se dessine entre l’agriculture et la société. Fondé sur l’agroécologie et valorisé grâce à la HVE, ce contrat redonne un rôle central aux agriculteurs, et permet aux exploitations agricoles de retrouver une dynamique économique positive en attirant de nouveaux talents ». Lymatly Photos/Flickr/CC BY 2.0

L’agroécologie peut permettre d’écrire une nouvelle page de l’agriculture, celle de la réconciliation entre les acteurs de l’agroalimentaire, entre les agriculteurs et la société, entre les agriculteurs et leur histoire, leur terre et leur métier. L’agroécologie, c’est l’alliance de l’agronomie et de l’écologie. C’est une vision ambitieuse et globale, où l’agriculteur est au cœur de sa ferme, des territoires et des systèmes alimentaires, en limitant la quantité d’intrants et avec une rentabilité basée sur la valeur ajoutée.

Ces dernières années, plusieurs acteurs de l’agroalimentaire et distributeurs se sont engagés. Le rapport « L’agroécologie : la performance est l’affaire de tous ! », (lien vers PDF) publié par Deloitte Développement durable et France Nature Environnement, fait le point sur cinq expériences à grande échelle sur le chemin de l’agroécologie.

Premièrement, le Groupement des Mousquetaires, avec son programme Filières durables 2025 : douze filières agricoles sont supervisées par quatre conseils scientifiques et techniques regroupant toutes les parties prenantes.

Deuxièmement, McDonald’s France, avec sa stratégie agroécologique pour ses cinq grandes filières agricoles : 80 fermes de référence ont testé pendant cinq ans plus de 70 nouvelles pratiques pour en sélectionner une cinquantaine en cours de déploiement sur le territoire français.

Troisièmement, Mondelez-Lu sur la filière blé, avec le programme Harmony : lancé en 2007, il définit 51 bonnes pratiques agricoles suivies par plus de 1 700 agriculteurs en France, couvrant plus de 75 % des volumes de biscuits vendus en Europe.

Quatrièmement, Terrena, avec le concept de « nouvelle agriculture » sur les filières lapin, porc, poulet et farine, légumes, vigne et bovins : plus de 11 000 coopérateurs sont engagés et, parmi eux, 350 « sentinelles de la terre » qui innovent au quotidien.

Cinquièmement, les Vignerons indépendants de France : avec déjà plus de 2 800 adhérents certifiés en agriculture biologique ou labélisés Haute Valeur environnementale (HVE), label dont ils ont été les précurseurs.

Un nouveau contrat

Chacun doit donc prendre sa part de responsabilité pour atteindre la triple performance environnementale, économique et sociale, et bénéficier équitablement, et en toute transparence, de la valeur créée. Cinq leçons peuvent être tirées de ces initiatives. Elles ont toutes été conçues de façon concertée avec toutes les parties prenantes. Elles s’inscrivent dans un temps long de transformation, avec des plans de progrès sur dix ans. Elles recherchent des solutions innovantes en réponse aux contraintes économiques, sociales et environnementales. Elles mettent en place des accompagnements spécifiques des agriculteurs. Elles ont révisé les processus d’achat pour introduire une fidélité à long terme entre les acteurs des filières.

De nombreuses questions restent cependant à résoudre pour passer de ces initiatives à une refondation de l’agriculture française. Les expériences décrites apportent des débuts de réponse. Cette refondation passera par le cofinancement, de manière concertée et pluriannuelle, des efforts de recherche pour réduire drastiquement l’empreinte environnementale de l’agriculture tout en conservant ses rendements.

Les savoir-faire de l’économie circulaire devront être appliqués aux filières agricoles pour trouver des débouchés aux productions issues de la diversification. Il faudra valoriser les produits issus de l’agroécologie auprès des consommateurs. Le label HVE peut devenir le label qui portera la transition du modèle agricole vers des produits français de qualité.

Un nouveau contrat se dessine ainsi entre l’agriculture et la société. Fondé sur l’agroécologie et valorisé grâce à la HVE, ce contrat redonne un rôle central aux agriculteurs, et permet aux exploitations agricoles de retrouver une dynamique économique positive en attirant de nouveaux talents.

Denez L’Hostis (Président de France Nature Environnement) et Didier Livio (Associé de Deloitte Développement durable)

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19 février 2017 7 19 /02 /février /2017 09:59

Le 25 mars 2017 se tiendront les premières Rencontres de La Plaine, manifestation large pour favoriser l’échange entre militant-e-s de l’ESS et l’interpellation des responsables politiques en cette année électorale. Collectif le 16 février 2017

Dans un contexte international inquiétant, et compte tenu des échéances électorales, 2017 doit être, tant pour l’ESS que pour la société tout entière, une année de luttes et de résistances face aux multiples enjeux.

Pour l’ESS,

• d’un côté la banalisation accélérée d’un trop grand nombre de ses grandes enseignes, de ses institutions,

• de l’autre, la résistance qui s’exprime au sein de certains secteurs mutualistes, coopératifs et associatifs, mais surtout la consolidation, l’émergence de structures innovantes engagées dans la transformation sociale.

L’enjeu, la survie d’une économie de l’initiative citoyenne, de la solidarité, d’un « entreprendre autrement » fondé sur la propriété collective, la gestion démocratique et la non-lucrativité, c’est-à-dire l’affectation des nécessaires résultats au développement du projet commun ancré dans les grands enjeux de notre époque.

Pour la société tout entière,

• d’un côté : la poursuite, l’accélération du démantèlement de l’État social, le développement des inégalités, la promotion par des médias entre les mains des pouvoirs économiques d’un modèle fondé sur le lucre et des conceptions antihumanistes des progrès technologiques, le développement de la crise écologique, l’absence de perspectives politiques du fait de l’éclatement du champ politique notamment du camp progressiste,

• de l’autre : les résistances de secteurs de plus en plus larges de l’opinion telle qu'elles se sont, par exemple, exprimées dans le soutien au mouvement social du printemps 2016, l’émergence de nouvelles formes de solidarité, les aspirations à un autre monde au-delà de toutes les frontières.

L’enjeu, la survie de la démocratie, économique, sociale, culturelle et environnementale, des conquêtes de deux siècles de mouvement social.

Pour nous, militant-e-s d’une ESS de transformation sociale et écologique et du mouvement social, conscient-e-s de notre tradition historique commune, il s’agit de définir une autre voie, de faire entendre d’autres voix, pour prendre toute notre place dans les initiatives de résistance et de reconquête d’une opinion dominée par la « doxa » libérale.

Cela passe notamment par des confrontations entre acteurs, une promotion des initiatives, une prise de parole dans le débat public et dans les campagnes présidentielles et législatives.

C’est pourquoi nous proposons l’organisation d’une manifestation, la plus large possible, associant des médias du mouvement social et progressiste afin de lancer un échange entre militant-e-s, qui permettra l’interpellation des forces politiques et une adresse à l’opinion.

Les Rencontres de La Plaine se tiendront le samedi 25 mars 2017 (9h30-17h) à la Maison des sciences de l’homme Paris-Nord, 20, avenue George-Sand, 93210 Saint-Denis (métro Front populaire, ligne 12)

À l’initiative de : François Longérinas – CFD/EMI –, Jean-Philippe Milesy – Rencontres sociales –, Jack Potavin – Groupement des organismes employeurs de l'ESS (GOEES) –, Patrick Vassallo – conseiller territorial de Plaine-Commune.

Contacts : rencontresdelaplaine.ess@gmail.com / Jean-Philippe Milesy milesy@rencontres-sociales.org ; 06 85 56 38 58.

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13 février 2017 1 13 /02 /février /2017 11:29

Le génie du capitalisme d’après-guerre aura consisté à réorienter la volonté de changement vers l’insatiable désir de consommer. Ce modèle trouve à présent sa limite dans l’épuisement des ressources naturelles. Pour imaginer un mode de vie à la fois satisfaisant et durable, récuser l’empire de la marchandise ne suffit pas. Il faut d’abord réfléchir à ce qui nous est indispensable.  Dans Le Monde Diplomatique de février 2017, par Razmig Keucheyan, professeur de sociologie, auteur de La nature est un champ de bataille, Zones, Paris, 2014.

Cf. sur ce blog l'introduction à son livre passionnant La nature est un champ de bataille, Quand la finance se branche sur la nature écrit pour Le Monde Diplomatique de mars 2014, cf aussi notre débat avec Razmig Keucheyan le 17 novembre 2015 aux Lilas dans La nature est un champ de bataille.

Jung-Yeon Min. - « Rendez-moi la lune », 2015 (Jung-Yeon Min - Galerie Maria Lund, Paris)

Jung-Yeon Min. - « Rendez-moi la lune », 2015 (Jung-Yeon Min - Galerie Maria Lund, Paris)

La transition écologique suppose de faire des choix de consommation. Mais sur quelle base ? Comment distinguer les besoins légitimes, qui pourront être satisfaits dans la société future, des besoins égoïstes et déraisonnables, qu’il faudra renoncer à assouvir ? C’est la question qu’aborde le Manifeste négaWatt, l’un des ouvrages d’écologie politique les plus stimulants parus récemment, rédigé par des spécialistes de l’énergie (1). Un négaWatt, c’est une unité d’énergie économisée — « néga » pour négatif. Grâce aux énergies renouvelables, à l’isolation du bâti ou au raccourcissement des circuits économiques, il est possible, selon les auteurs, de mettre sur pied un système économique qui soit écologiquement viable à l’échelle d’un pays, et même au-delà. À technologie constante, notre société renferme d’importants « gisements de négaWatts ».

Le consumérisme ambiant ne saurait perdurer, car il accroît en permanence les flux de matières premières et la consommation d’énergie. Ses effets aliénants sur les personnes ne sont de surcroît plus à démontrer. Une société « négaWatt » est une société de la sobriété où des possibilités de consommation sont délibérément écartées car considérées comme néfastes. Mais sur quels critères ?

Pour répondre à cette question, les auteurs du Manifeste distinguent les besoins humains authentiques, légitimes, qu’il faudra donc continuer à satisfaire, et les besoins artificiels, illégitimes, dont il faudra se défaire. Le premier groupe comprend ceux qu’ils qualifient de « vitaux », « essentiels », « indispensables », « utiles » et « convenables ». Le second, ceux qu’ils jugent « accessoires », « futiles », « extravagants », « inacceptables », « égoïstes ».

Dès lors, deux problèmes apparaissent. D’abord, comment définir un besoin « essentiel » ? Qu’est-ce qui le distingue d’un besoin « accessoire » ou « inacceptable » ? Et ensuite, qui décide ? Quels mécanismes ou institutions conféreront une légitimité au choix de satisfaire tel besoin plutôt que tel autre ? Le Manifeste négaWatt ne dit rien à ce propos.

Pour répondre à ces questions, il est bon de se tourner vers deux penseurs critiques et pionniers de l’écologie politique, André Gorz et Ágnes Heller. Dans les années 1960 et 1970, ils ont développé une théorie des besoins sophistiquée et d’une grande actualité (2). L’un comme l’autre ont abordé ces questions à partir d’une réflexion sur l’aliénation, laquelle peut se mesurer à l’aune de besoins authentiques. En effet, on est aliéné par rapport à un état idéal auquel on cherche à revenir, ou que l’on cherche à atteindre enfin. La notion désigne le processus par lequel le capitalisme suscite des besoins artificiels qui nous éloignent de cet état. En plus d’être aliénants, la plupart de ces besoins sont écologiquement irréalistes.

Qu’est-ce qu’un besoin « authentique » ? On pense bien sûr aux exigences dont dépendent la survie ou le bien-être de l’organisme : manger, boire ou se protéger du froid, par exemple. Dans les pays du Sud, et même du Nord, certains de ces besoins élémentaires ne sont pas satisfaits. D’autres, qui l’étaient autrefois, le sont de moins en moins. Jusqu’à récemment, respirer un air non pollué allait de soi ; c’est devenu difficile dans les mégapoles contemporaines. Il en va de même pour le sommeil. Aujourd’hui, la pollution lumineuse rend l’endormissement difficile pour nombre de personnes, l’omniprésence de la lumière dans les villes retardant la synthèse de la mélatonine (surnommée « hormone du sommeil »). Dans certains pays, la lutte contre la pollution lumineuse a suscité l’émergence de mouvements sociaux revendiquant un « droit à l’obscurité » et appelant à la création de « parcs aux étoiles » non pollués par la lumière artificielle (3).

L’exemple de la pollution sonore parle également à nombre de citadins. On consacre des volumes croissants d’argent à l’isolation des logements, afin de satisfaire un besoin — le silence — autrefois gratuit. Ces dépenses nouvelles sont susceptibles de peser à la baisse sur le taux de profit, mais elles offrent simultanément des sources d’enrichissement, par exemple pour les entreprises spécialisées dans l’insonorisation.

Tous les besoins « authentiques » ne sont pas d’ordre biologique. Aimer et être aimé, se cultiver, faire preuve d’autonomie et de créativité manuelle et intellectuelle, prendre part à la vie de la cité, contempler la nature... Sur le plan physiologique, on peut certainement faire sans. Mais ces besoins sont consubstantiels à la définition d’une vie humaine digne d’être vécue. André Gorz les appelle « besoins qualitatifs » ; Ágnes Heller, « besoins radicaux ».

Les besoins qualitatifs ou radicaux reposent sur un paradoxe. En même temps qu’il exploite et aliène, le capitalisme génère à la longue un certain bien-être matériel pour des secteurs importants de la population. Il libère de ce fait les individus de l’obligation de lutter au quotidien pour assurer leur survie. De nouvelles aspirations, qualitatives, prennent alors de l’importance. Mais, à mesure qu’il monte en puissance, le capitalisme empêche leur pleine réalisation. La division du travail enferme l’individu dans des fonctions et des compétences étroites tout au long de sa vie, lui interdisant de développer librement la gamme des facultés humaines. De même, le consumérisme ensevelit les besoins authentiques sous des besoins factices. L’achat d’une marchandise satisfait rarement un vrai manque. Il procure une satisfaction momentanée ; puis le désir que la marchandise avait elle-même créé se redéploie vers une autre vitrine.

Constitutifs de notre être, les besoins authentiques ne peuvent trouver leur satisfaction dans le régime économique actuel. C’est pourquoi ils sont le ferment de bien des mouvements d’émancipation. « Le besoin est révolutionnaire en germe », dit André Gorz (4). La quête de son assouvissement conduit tôt ou tard les individus à soumettre le système à la critique.

Les besoins qualitatifs évoluent historiquement. Voyager, par exemple, permet à l’individu de se cultiver et de s’ouvrir à l’altérité. Jusqu’au milieu du XXe siècle, seules les élites voyageaient. Désormais, la pratique se démocratise. On pourrait définir le progrès social par l’apparition de besoins toujours plus enrichissants et sophistiqués, et accessibles au plus nombre.

Mais des aspects néfastes apparaissent parfois en cours de route. Si le transport en avion proposé par les compagnies à bas coût contribue à rendre le voyage accessible aux classes populaires, il émet aussi une énorme quantité de gaz à effet de serre, et il détruit les équilibres des zones où les touristes se rendent en masse pour voir... d’autres touristes en train de regarder ce qu’il y a à voir. Voyager est devenu un besoin authentique ; il faudra pourtant inventer de nouvelles formes de se déplacer, adaptées au monde de demain.

Si le progrès social induit parfois des effets pervers, des besoins à l’origine néfastes peuvent, à l’inverse, devenir viables avec le temps. Aujourd’hui, la possession d’un smartphone relève d’un besoin égoïste. Ces téléphones contiennent des « minerais de sang » — tungstène, tantale, étain et or notamment -, dont l’extraction occasionne des conflits armés et des pollutions graves. Ce n’est pourtant pas l’appareil lui-même qui est en question. Si un smartphone « équitable » voit le jour — le « fairphone » semble en être une préfiguration (5) -, il n’y a pas de raison pour que cet objet soit banni des sociétés futures. D’autant plus qu’il a donné lieu à des formes de sociabilité nouvelles, à travers l’accès continu aux réseaux sociaux, ou à travers l’appareil photographique qu’il intègre. Qu’il encourage le narcissisme ou génère des névroses chez ses utilisateurs n’est sans doute pas inévitable. En ce sens, on ne peut exclure que le smartphone, à travers certains de ses usages, se transforme progressivement en besoin qualitatif, comme le voyage avant lui.

Selon André Gorz, la société capitaliste a pour devise : « Ce qui est bon pour tous ne vaut rien. Tu ne seras respectable que si tu as “mieux” que les autres (6). » On peut lui opposer une devise écologiste : « Seul est digne de toi ce qui est bon pour tous. Seul mérite d’être produit ce qui ne privilégie ni n’abaisse personne. » Aux yeux de Gorz, un besoin qualitatif a ceci de particulier qu’il ne donne pas prise à la « distinction ».

En régime capitaliste, la consommation revêt en effet une dimension ostentatoire. Acheter le dernier modèle de voiture revient à exhiber un statut social (réel ou supposé). Un beau jour, cependant, ce modèle passe de mode et son pouvoir distinctif s’effondre, provoquant le besoin d’un autre achat. Cette fuite en avant inhérente à l’économie de marché contraint les entreprises qui se concurrencent entre elles à produire des marchandises toujours nouvelles.

Comment rompre avec cette logique de distinction productiviste ? Par exemple, en allongeant la durée de vie des objets. Une pétition lancée par les Amis de la Terre exige que l’on fasse passer la garantie des marchandises de deux ans — une obligation inscrite dans le droit européen — à dix ans (7). Plus de 80 % des objets sous garantie sont réparés ; or ce pourcentage tombe à moins de 40 % une fois l’échéance passée. Moralité : plus la garantie est longue, plus les objets durent ; et plus la quantité de marchandises vendues et donc produites diminue, limitant par la même occasion les logiques de distinction, qui reposent souvent sur l’effet de nouveauté. La garantie, c’est la lutte des classes appliquée à la durée de vie des objets.

Qui détermine le caractère légitime ou non d’un besoin ? Un risque apparaît ici, qu’Ágnes Heller appelle la « dictature sur les besoins (8) », comme celle qui prévalut en URSS. Si une bureaucratie d’experts autoproclamés décide de ce que sont les besoins « authentiques », et par conséquent les choix de production et de consommation, ceux-ci ont peu de chances d’être judicieux et légitimes. Pour que la population accepte la transition écologique, il faut que les décisions qui la sous-tendent emportent l’adhésion. Établir une liste de besoins authentiques n’a rien d’évident et suppose une délibération collective continue. Il s’agit donc de mettre en place un mécanisme qui vienne d’en bas, d’où émane démocratiquement une identification des besoins raisonnables.

Difficile d’imaginer ce que pourrait être un tel mécanisme. En esquisser les contours constitue une tâche brûlante de notre temps, dont dépend la construction d’une société juste et viable. La puissance publique a certainement un rôle à jouer, par exemple en taxant les besoins futiles pour démocratiser les besoins authentiques, en régulant les choix des consommateurs. Mais encore faut-il convaincre de la futilité de nombreux besoins ; et, pour cela, il faut un dispositif situé au plus près des individus. Il s’agit d’extraire le consommateur de son tête-à-tête avec la marchandise et de réorienter la libido consumandi vers d’autres désirs.

La transition écologique nous incite à fonder une démocratie directe, plus délibérative que représentative. L’adaptation des sociétés à la crise environnementale suppose de réorganiser de fond en comble la vie quotidienne des populations. Or cela ne se fera pas sans les mobiliser, sans s’appuyer sur leurs savoirs et leurs savoir-faire, et sans transformer dans un même mouvement les subjectivités consuméristes. C’est donc à une nouvelle « critique de la vie quotidienne » qu’il faut parvenir ; une critique élaborée collectivement.

(1) Association NégaWatt, Manifeste NégaWatt. En route pour la transition énergétique !, Actes Sud, coll. « Babel Essai », Arles, 2015 (1(re) éd. : 2012).

(2) André Gorz, Stratégie ouvrière et néocapitalisme, Seuil, Paris, 1964, et Ágnes Heller, La Théorie des besoins chez Marx, 10 / 18, Paris, 1978.

(3) Cf. Marc Lettau, « Face à la pollution lumineuse en Suisse, les adeptes de l’obscurité réagissent », Revue suisse, Berne, octobre 2016.

(4) André Gorz, La Morale de l’histoire, Seuil, Paris, 1959.

(5) Lire Emmanuel Raoul, « Peut-on fabriquer un téléphone équitable ? », Le Monde diplomatique, mars 2016.

(6) Lire André Gorz, « Leur écologie et la nôtre », Le Monde diplomatique, avril 2010.

(7) « Signez la pétition “Garantie 10 ans maintenant” », 24 octobre 2016, www.amisdelaterre.org

(8) Cf. Ferenc Feher, Ágnes Heller et György Markus, Dictatorship over Needs, St. Martin’s Press, New York, 1983.

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9 février 2017 4 09 /02 /février /2017 15:03

Rendez-vous à Strasbourg, dès le 14 février ! Une mobilisation organisée par le Collectif Stop TAFTA. Lire aussi 12 raisons de s’opposer au CETA, « Au cœur du CETA », épisode 3 : CETA et climat font-ils bon ménage ? et Nous pouvons stopper le CETA !.

 

Tou⋅te⋅s à Strasbourg pour stopper le vote du CETA !

Au moment du vote du CETA le 15 février, et indépendamment de son résultat, nous serons des milliers à affluer vers Strasbourg pour faire entendre nos revendications : « Pour la justice sociale et climatique, non au traité des multinationales ! »

Les mouvements européens se retrouveront dès le mardi 14 février au soir pour une grande soirée festive, à partir de 19 h 30 au Molodoï à Strasbourg (19 rue du Ban-de-la-Roche), en compagnie d’eurodéputé⋅e⋅s opposé⋅e⋅s au CETA et des mouvements venus de toute l’Europe. Le lendemain à 10 h 30 s’élancera une grande manifestation, pour aller faire entendre nos voix face au Parlement européen. L’après-midi à partir de 14 h se tiendra une assemblée des mouvements européens pour continuer à renforcer notre réseau et exiger un commerce au service des peuples et de la planète et non pour le profit d’une poignée de multinationales.

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau fera le déplacement pour l’occasion et, avec les défenseurs européens du CETA, il tentera à nouveau de le faire passer pour un accord progressiste. Nous ne les laisserons pas avoir le dernier mot !

Des bus au départ de Paris sont organisés. Pour s’inscrire rendez-vous sur la page du collectif (tarif à prix libre).

 

Mobilisation du 21 janvier en France

Aidez-nous à convaincre les derniers euro-député⋅e⋅s hésitant⋅e⋅s !

Grâce à la mobilisation de ces dernières semaines des dizaines de députés européens ont basculé dans le camp du « non ». En France, les eurodéputés du Parti socialiste viennent d’annoncer qu’ils ne voteraient pas le CETA, rejoignant ainsi les parlementaires du Front de gauche et d’Europe Écologie Les Verts.

Nous devons désormais concentrer nos forces pour faire basculer les eurodéputés centristes en leur expliquant les conséquences désastreuses du CETA. Aidez-nous à convaincre Marielle de Sarnez, Jean-Marie Cavada, Robert Rochefort, Dominique Riquet et Nathalie Griesbeck en les interpellant par téléphone, courriel ou via les réseaux sociaux (cliquez sur les liens ci-dessus pour obtenir toutes leurs coordonnées). En poursuivant notre mobilisation, nous pouvons faire en sorte que la France dise non au CETA le 15 février à Strasbourg !

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4 février 2017 6 04 /02 /février /2017 16:02

Depuis 2010, le prix des modules photovoltaïques a chuté d’environ 80 %. Par Pierre Le Hir le 30 janvier pour Le Monde. Lire aussi Le solaire sort de l’ombre.

" Le rendement des panneaux photovoltaïques, ratio entre l’énergie solaire reçue et l’énergie électrique produite, augmente en valeur absolue de 0,3 à 0,4 % par an en moyenne " indique Philippe Malbranche, directeur général de l’INES » (Photo: Gros-Chastang NICOLAS TUCAT/AFP)

" Le rendement des panneaux photovoltaïques, ratio entre l’énergie solaire reçue et l’énergie électrique produite, augmente en valeur absolue de 0,3 à 0,4 % par an en moyenne " indique Philippe Malbranche, directeur général de l’INES » (Photo: Gros-Chastang NICOLAS TUCAT/AFP)

Si l’énergie solaire ne cesse de gagner en compétitivité, c’est, bien sûr, grâce aux économies d’échelle que permet une production en grands volumes, à la baisse du coût des matières premières (notamment du silicium) et à l’amélioration des procédés de fabrication. Depuis 2010, le prix des modules photovoltaïques a ainsi chuté d’environ 80 %. Mais c’est aussi en raison des progrès réalisés dans les technologies solaires elles-mêmes.

Avec 227 gigawatts (GW) installés fin 2015, la filière photovoltaïque (dans laquelle les particules de lumière, ou photons, excitent les électrons d’un matériau semi-conducteur qui produit alors un courant continu) domine le marché mondial. La filière thermodynamique (où des miroirs concentrent les rayons du soleil vers un fluide caloporteur qui chauffe un circuit d’eau pour générer de la vapeur actionnant une turbine) ne représentait, à cette date, que 4,8 GW. On laisse ici de côté le volet thermique (avec lequel le rayonnement solaire est utilisé pour la production d’eau chaude ou le chauffage domestique), dont la capacité atteignait 435 GW.

La croissance accélérée du photovoltaïque REN21

La croissance accélérée du photovoltaïque REN21

Le rendement des panneaux photovoltaïques, ratio entre l’énergie solaire reçue et l’énergie électrique produite, « augmente en valeur absolue de 0,3 à 0,4 % par an en moyenne », indique Philippe Malbranche, directeur général de l’Institut national de l’énergie solaire (INES), qui regroupe, sur le site de Savoie-Technolac, 400 chercheurs et techniciens du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et de l’université de Savoie.

Cela, pour les deux principaux types actuels de cellules : celles en silicium monocristallin, plus performantes mais plus chères, et celles en silicium polycristallin, plus économiques mais moins efficaces. Les premières affichent aujourd’hui un rendement de 18 % à 23 %, les secondes de 15 % à 20 %. Loin encore des 26 % obtenus en laboratoire, ou des plus de 45 % atteints par des prototypes qui ajoutent un dispositif optique pour focaliser les rayons solaires.

D’autres progrès ont été réalisés, comme l’accroissement de la longévité des panneaux, qui est passée en un quart de siècle de cinq à trente ans, ajoute Pierre-Guy Therond, directeur des nouvelles technologies à EDF Energies nouvelles.

« Cellules bifaciales »

A ses yeux, les avancées futures porteront sur « l’optimisation, non seulement de la face avant des modules, exposée au soleil, mais aussi de leur face arrière, pour limiter les pertes d’énergie », sur la mise au point de « cellules bifaciales », dont la face arrière pourrait exploiter la luminosité (avec un surcroît de production pouvant atteindre 50 % sur des surfaces réfléchissantes comme la neige), ou encore sur des cellules faites de nouveaux matériaux, les pérovskites, qui pourraient porter leur rendement « à 30 % ou 35 % ». « Nous n’en sommes qu’au début de l’histoire du solaire », affirme M. Therond.

Pour Philippe Malbranche, « l’avenir est aussi dans la diversification des produits ». Des cellules organiques à base de polymères pourraient, malgré une faible durée de vie, trouver leur place en couverture de vitrages ou de téléphones portables. Et des modules photovoltaïques être intégrés directement aux matériaux de construction, béton, tôle, verre, tuile, ardoise ou revêtement routier, comme la société Colas a commencé à l’expérimenter avec sa « route solaire ». « La diffusion massive de ces produits prendra une décennie, pense-t-il, deux peut-être, mais on y viendra. »

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4 février 2017 6 04 /02 /février /2017 14:34

Chute des prix des panneaux solaires, afflux massif de capitaux et contraintes environnementales poussent les producteurs d’électricité, les industriels et de plus en plus de pays à jouer la carte du soleil. Par Jean-Michel Bezat le 30 janvier 2017 pour Le Monde.

Des panneaux solaires SunEdison dans le désert d’Atacama en 2014. STRINGER / REUTERS

Des panneaux solaires SunEdison dans le désert d’Atacama en 2014. STRINGER / REUTERS

Sans bruit, le monde vient d’entrer dans une nouvelle ère énergétique, celle du solaire. Le photovoltaïque n’est plus une lubie d’écologiste. Face à la pollution du charbon et à l’envolée des coûts du nucléaire, investisseurs et industriels jouent désormais ouvertement et massivement la carte du soleil.

En 2015, pour la première fois, les nouvelles capacités de production à partir des énergies renouvelables (hors grands barrages) ont représenté 53,6 % de l’ensemble des nouveaux moyens de production raccordés aux réseaux, indique le 10rapport annuel du Programme des Nations unies pour l’environnement publié en mars 2016 : 62 gigawatts (GW) d’éolien et 56 GW de solaire.

265,8 milliards de dollars

Les capitaux mobilisés ont battu un nouveau record, à 265,8 milliards de dollars (247,5 milliards d’euros). On y investit désormais deux fois plus que dans les énergies fossiles (130 milliards) et le potentiel du solaire y est beaucoup plus important que celui des autres énergies renouvelables.

Evolution du coût de l'énergie solaire photovoltaïque à l'échelle industrielle en $/MWh

Evolution du coût de l'énergie solaire photovoltaïque à l'échelle industrielle en $/MWh

« L’année 2016 marquera un point de bascule », assure Thierry Lepercq, directeur général adjoint d’Engie chargé de l’innovation et de la recherche. « Retenez trois chiffres : 70 gigawatts, la capacité solaire additionnelle en 2016 [après 50 GW en 2015], plus que l’éolien ; 26 dollars, le prix d’un mégawattheure du photovoltaïque sur un projet de 1 milliard de dollars à Abou Dhabi ; et zéro, le prix de l’électricité à certains moments au Chili. »

Pourquoi les centrales solaires photovoltaïques sont-elles devenues compétitives dans de nombreux pays et se développent sans les subventions massives reçues en Europe au début de leur déploiement ? Le phénomène doit beaucoup à la domination chinoise sur les équipements. Un mal pour un bien. Si elle a tué une partie de l’industrie occidentale, notamment allemande, elle a provoqué une chute des prix spectaculaire.

Capacités et ajouts annuels mondiaux en GW

Capacités et ajouts annuels mondiaux en GW

« Dans les usines, l’automatisation a fortement réduit le taux de casse, explique Antoine Cahuzac, directeur général d’EDF Énergies nouvelles. De plus, tous les fabricants innovent et produisent des cellules plus efficaces. Ils ont aussi augmenté leur durée de vie, qui peut atteindre trente-cinq ans contre vingt-cinq il y a cinq ans grâce à une plus grande fiabilité des matériaux. » Les panneaux sont devenus un produit de base fabriqué en grande quantité, comme les écrans plats de téléviseur.

Surcapacités et prix tirés vers le bas

Les renouvelables sont ainsi passées « du statut de niche au statut de solution préférée », assurait récemment Adnan Amin, directeur de l’Agence internationale des énergies renouvelables, basée à Abou Dhabi, en présentant son dernier rapport. « Les panneaux solaires en sont le meilleur exemple, souligne ce document. Leur coût a baissé de moitié depuis 2010 et devrait baisser encore de 60 % dans les dix prochaines années. »

Un phénomène plus conjoncturel s’est ajouté à cette tendance : la concurrence des producteurs de panneaux, qui a créé des surcapacités mondiales et tiré les prix vers le bas. M. Cahuzac s’attend, une fois ces stocks écoulés, à une remontée « marginale » des prix. Dans ce secteur très cyclique, la consolidation va se poursuivre et les nouvelles capacités installées devraient stagner en 2017 au niveau de 2016, prévoit le patron du chinois Trina Solar, premier fabricant mondial de panneaux, dans un entretien à l’agence Bloomberg.

Principaux fabriquants de modules pas livraison en MW-Crête

Principaux fabriquants de modules pas livraison en MW-Crête

Un signe qui ne trompe pas sur la maturité de cette énergie : les tarifs de rachat pour soutenir la filière sont remplacés, partout dans le monde, par des appels d’offres. Début 2016, 64 pays en avaient lancés dans le solaire (et l’éolien), « suscitant des offres historiquement basses (prix modiques, volumes élevés) dans les pays émergents », note le réseau international REN21. « Nous faisons du solaire photovoltaïque à 30 dollars le MWh au Mexique », note M. Lepercq.

On en est encore loin en France, mais les prix baissent aussi. Pour les centrales au sol, moins coûteuses que sur le bâti, le prix a été divisé par six entre 2007 et 2014, où il était encore dans une fourchette de 74 euros à 135 euros par MWh, note l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), qui escompte une nouvelle baisse de 35 % à l’horizon 2025.

Les émergents en pointe

L’Europe n’est pas le continent au potentiel le plus prometteur, même si l’Allemagne est un pays pionnier. Trois pays ont encore fourni en 2015 la majorité des capacités additionnelles : La Chine, le Japon et les États-Unis. Mais le boum est planétaire, particulièrement dans les pays émergents qui conjuguent fort ensoleillement, croissance soutenue de la demande d’électricité et cadre réglementaire sécurisé pour les investisseurs. « Cette révolution sert leur développement. Ils peuvent valoriser leur potentiel, et cela les affranchit de leur dépendance énergétique », se félicite Isabelle Kocher, directrice générale d’Engie, qui affiche notamment de grandes ambitions en Afrique.

Production mondiale d'énectricité renouvelable par source

Production mondiale d'énectricité renouvelable par source

La Chine reste une locomotive. Le solaire y enregistrera un doublement de ses capacités entre 2015 et 2020 pour atteindre 110 GW, selon l’Agence nationale de l’énergie. Et si elle est désormais électrifiée à 100 %, c’est grâce au solaire domestique (hors réseau). L’Arabie saoudite a défini un vaste plan en faveur des énergies renouvelables et le fonds souverain d’Abou Dhabi y investit depuis la fin des années 2000, dans la production de panneaux, les centrales et la recherche. Au Chili, privé de toute ressource fossile, le solaire pèse déjà 4 % du « mix » énergétique alors qu’il en était absent en 2012. Y compris pour alimenter des utilisateurs d’électricité aussi gourmands que les mines de cuivre.

...mais qui reste marginale

...mais qui reste marginale

Le solaire domestique a séduit le Bangladesh et les mini-réseaux se développent en Afrique de l’Est (Kenya, Ouganda…) pour les villages enclavés. L’Inde prévoit un ambitieux plan de 100 GW de solaire d’ici à 2022. A l’initiative de son premier ministre, Narendra Modi, une « alliance internationale » en faveur de cette énergie a été créée fin 2015, en marge de la COP21, à Paris. Les 121 pays qu’elle rassemble s’engagent à assurer des transferts de technologies et à faciliter les financements dans tous les pays à fort potentiel solaire.

Les électriciens convertis

Résultat de ce changement d’échelle, toutes les grandes compagnies européennes d’électricité ont pris le virage du solaire, du français Engie à l’italien Enel. Jusqu’au géant EDF, dont l’ADN nucléaire est en train de se modifier. Et toutes les grandes entreprises mondiales se tournent vers l’énergie solaire pour leur propre consommation, de la grande distribution Walmart, Procter & Gamble ou Ikea à Google pour refroidir ses énormes centres de données…

Certains pétroliers eux-mêmes croient aux vertus du solaire. Aurait-on imaginé, il y a quelques années, que le patron de Total intervienne dans un cénacle des énergies vertes ? Patrick Pouyanné expliquera, lors du colloque annuel du Syndicat des énergies renouvelables réuni à Paris le 31 janvier, pourquoi et comment il entend se développer dans l’électricité solaire après les rachats du fabricant californien de panneaux SunPower en 2011 et du fabricant français de batteries Saft en 2016.

Bien que le solaire ne représente encore que 1,5 % des capacités de production électrique installées, le « mix électrique mondial » encore dominé par les énergies fossiles est en train de se redessiner. Mme Kocher estime qu’en 2050, la moitié de l’électricité pourra être produite par des énergies renouvelables décentralisées, surtout le solaire, l’autre moitié sortant des grandes centrales traditionnelles.

Et quand on dresse le bilan carbone du solaire, il est positif. Grâce à l’énergie propre et renouvelable que produisent depuis 1975 les panneaux solaires, ils auront compensé d’ici à 2018 les gaz à effet de serre émis pour les produire, révèle une étude néerlandaise (université d’Utrecht) publiée fin 2016 dans le journal en ligne Nature Communications.

L’atome « ne répond pas aux mêmes besoins »

En quarante ans, le nombre de panneaux solaires est passé de 10 000 à 1 milliard. Avec une durée de vie moyenne de trente ans, une ferme solaire remboursera « plusieurs fois » l’énergie nécessaire à la fabrication de ses équipements. Désormais, à chaque doublement de capacités solaires installées, l’énergie nécessaire pour produire les panneaux baisse de 12 % à 13 % et les gaz à effet de serre émis de 17 % à 24 %, ont calculé ses auteurs.

Lire aussi : Solaire: un essor conforté par des progrès techniques continus

Et si le solaire rendait le nucléaire obsolète à un horizon pas si lointain, sachant que le charbon est condamné à plus ou moins longue échéance ? L’envolée des coûts de construction des réacteurs pèse sur le prix du MWh produit : 109 euros pour les EPR anglais d’EDF. Tout un symbole, quarante entreprises ont déposé une demande auprès des autorités ukrainiennes pour construire 2 GW de panneaux solaires… à l’intérieur de la zone d’exclusion radioactive entourant la centrale de Tchernobyl, où eut lieu en 1986 la pire catastrophe de l’histoire du nucléaire civil.

« Jusqu’à présent, le nucléaire était le seul moyen de produire une électricité compétitive et décarbonée à grande échelle ; ce n’est plus le cas, analyse Mme Kocher. Le nouveau nucléaire a un espace de développement plus restreint qu’avant. » Mais il est impossible de comparer deux énergies, l’une intermittente tant qu’elle n’est pas stockéee dans de puissantes batteries, l’autre mobilisable en permanence : un MW de solaire ne vaut pas un MW de nucléaire. Et M. Cahuzac voit au contraire un avenir à l’atome, qui « ne répond pas aux mêmes besoins ». Un réacteur fournit une énorme quantité d’électricité vingt-quatre heures sur vingt-quatre et l’on peut faire évoluer sa puissance en moins d’une heure, plaide-t-il.

Il n’en reste pas moins que les énergies renouvelables s’imposent peu à peu comme une référence pour comparer les prix. Patron du nouveau nucléaire chez EDF, Xavier Ursat reconnaît qu’il faudra que l’« EPR nouveau modèle » en préparation chez EDF-Areva soit compétitif (autour de 5 milliards d’euros). Et même « qu’il coûte moins cher en euros par kilowattheure que la moins chère des énergies renouvelables installée au même endroit ».

Donald Trump, fervent défenseur du charbon

On n’en est pas encore là. Mais pour avoir une véritable estimation de la compétitivité du solaire (et des renouvelables en général), il faudrait supprimer toutes les subventions, qui sont beaucoup plus importantes en faveur des énergies fossiles.

Reste une menace qui plane, aux États-Unis, sur ces brillantes perspectives : l’arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump, fervent défenseur du charbon, du pétrole et du gaz. Le 10 janvier, 640 entreprises dont des multinationales comme Intel, Johnson & Johnson, Hewlett-Packard, Levi Strauss, Nike, Ikea, Adidas, Danone, Schneider Electric ou L’Oréal, ont adressé une mise en garde au nouveau président : « Échouer à construire une économie bas carbone mettrait en danger la prospérité américaine », écrivent-ils en réitérant leur soutien à l’accord de Paris. Un investisseur aussi avisé que Bill Gates vient d’annoncer la création d’un fonds de 1 milliard de dollars chargé d’investir dans la recherche sur l’énergie et la limitation des émissions de carbone.

En quittant ses fonctions, Barack Obama soulignait, à l’adresse de son successeur, que « le secteur solaire emploie désormais plus d’Américains que les mines de charbon dans des emplois mieux payés que la moyenne et qui ne peuvent être délocalisés ». Au niveau mondial, il fait travailler 2,7 millions de personnes, sur un total de 8,1 million dans les énergies renouvelables.

Soutenu par l’entrée en force du numérique dans le monde de l’énergie, le solaire est au cœur d’une « révolution » et le premier maillon d’une chaîne de valeur (stockage d’électricité, réseaux intelligents, Internet des objets de la maison, mobilité électrique, hydrogène…) qui , selon M. Lepercq, apportera « beaucoup plus d’énergie, beaucoup moins chère et pour beaucoup plus d’usages ».

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7 janvier 2017 6 07 /01 /janvier /2017 09:28

Une étude dresse une carte mondiale identifiant les zones dont la biodiversité est menacée par la production de biens et de services d’exportation. Par Audrey Garric le 5 janvier 2017 pour Le Monde.

Au Brésil, une partie des menaces qui pèsent sur le singe-araignée (Ateles paniscus) sont directement attribuables à l’exploitation forestière et à la production agricole entraînées par la consommation de biens aux États-Unis. KITTY TERWOLBECK/FLICKR

Au Brésil, une partie des menaces qui pèsent sur le singe-araignée (Ateles paniscus) sont directement attribuables à l’exploitation forestière et à la production agricole entraînées par la consommation de biens aux États-Unis. KITTY TERWOLBECK/FLICKR

C’est un fait connu : la déforestation, la surpêche ou le braconnage entraînent une érosion spectaculaire de la biodiversité partout sur la planète. Et l’un des principaux moteurs de cette surexploitation des ressources naturelles réside dans la production de biens et de services destinés à l’exportation. Une étude publiée mercredi 4 janvier dans la revue Nature Ecology & Evolution, permet d’identifier précisément quels consommateurs, dans un pays, menacent quelles espèces dans un autre. Elle dresse un atlas mondial indiquant, par nuances de couleurs, les zones de biodiversité les plus affectées par le commerce international.

« Nous pouvons ainsi pointer les routes économiques internationales ayant le plus grand impact sur la faune sauvage, afin d’améliorer les politiques de conservation, expliquent les auteurs, Daniel Moran (université norvégienne de science et de technologie) et Keiichiro Kanemoto (université Shinshu, Japon). Notre objectif est que les entreprises et les consommateurs utilisent cette carte pour sauvegarder la biodiversité. » Car il y a urgence : selon le WWF, plus de la moitié des populations de vertébrés ont disparu dans le monde par rapport à 1970 et, à ce rythme, les deux tiers d’entre elles pourraient suivre d’ici à 2020.

Les deux scientifiques poursuivent un travail entrepris depuis plus de sept ans. En 2012, ils avaient déjà publié dans Nature, sous la direction de Manfred Lenzen, spécialiste de développement durable à l’université de Sydney, une cartographie des pressions exercées sur les écosystèmes par les chaînes d’approvisionnement en marchandises et en produits alimentaires. En excluant les espèces invasives, ils concluaient que 30 % des menaces qui pèsent sur les espèces dans le monde sont liées au commerce international – une proportion qui peut atteindre 60 % dans certains pays comme la Papouasie-Nouvelle-Guinée ou le Sri Lanka.

Impact sur l’Asie du Sud-Est

La consommation – principalement par les pays développés – de café importé, de thé, de sucre, de textiles, de poisson et d’autres articles manufacturés affecte ainsi la biodiversité des pays producteurs – majoritairement en développement – à des milliers de kilomètres de là. En 2012, les scientifiques avaient par exemple calculé que les biens importés par l’Allemagne menaçaient 600 espèces différentes dans le monde, notamment en Russie, au Soudan et à Madagascar.

Les pressions exercées sur la biodiversité mondiale par l’UNION EUROPEENNE. Le violet foncé montre les espèces terrestres les plus affectées et le vert celles maritimes. KEIICHIRO KANEMOTO

Les pressions exercées sur la biodiversité mondiale par l’UNION EUROPEENNE. Le violet foncé montre les espèces terrestres les plus affectées et le vert celles maritimes. KEIICHIRO KANEMOTO

L’étude publiée mercredi va plus loin, en détaillant les menaces qui pèsent sur la biodiversité à la fois terrestre et côtière, et ce à une échelle régionale et non plus seulement nationale. Pour réaliser leur carte, les auteurs ont recensé les zones de répartition de 6 803 espèces animales vulnérables ou en danger, inscrites sur la liste rouge de l’Union internationale de conservation de la nature. Les périls qui entraînent leur disparition – 166 au total, tels que l’exploitation forestière, l’agriculture ou les transports – ont été reliés à des secteurs de production économique. Puis les biens et services concernés, issus de 15 000 industries dans le monde, ont été associés aux consommateurs finaux dans 187 pays. En découle un pourcentage de risque pour une espèce dans un pays en raison de la consommation de biens dans un autre.

Au Brésil, par exemple, la survie du singe-araignée commun (Ateles paniscus) est compromise par l’exploitation forestière et la production agricole entraînées par la consommation de biens aux États-Unis. La demande croissante, par les Américains, d’huile d’olive en provenance d’Espagne pourrait bien faire disparaître le lynx ibérique, dont l’habitat est directement affecté par la construction d’un barrage hydroélectrique nécessaire à l’irrigation des cultures. Le bois de Malaisie, largement commercialisé en Europe et en Chine, a lui un peu plus privé d’habitat l’éléphant, l’aigle criard et l’ours malais.

Les pressions exercées sur la biodiversité mondiale par les ÉTATS-UNIS. Le violet foncé montre les espèces terrestres les plus affectées et le vert celles maritimes. Keiichiro Kanemoto.

Les pressions exercées sur la biodiversité mondiale par les ÉTATS-UNIS. Le violet foncé montre les espèces terrestres les plus affectées et le vert celles maritimes. Keiichiro Kanemoto.

Globalement, l’Asie du Sud-Est est la région la plus affectée en ce qui concerne la biodiversité marine. Les consommateurs américains et européens y sont responsables de nombreux fléaux pour la faune – en premier lieu la pêche, l’aquaculture et la pollution. L’Europe exerce également de fortes pressions dans l’océan Indien, sur les îles de La Réunion, de Maurice et des Seychelles. Sur les terres émergées, les États-Unis affectent la biodiversité de l’Europe du Sud, des côtes du Mexique, du sud du Canada, du Brésil (Amazonie et plateau brésilien), de l’Espagne ou du Portugal, tandis que les Vingt-Huit menacent celle du Maroc, de l’Éthiopie, de Madagascar ou de la Turquie, essentiellement pour des produits agricoles.

Étiquetage des produits

« Notre carte peut aider les entreprises à faire un choix judicieux de leurs intrants et à atténuer leurs impacts sur la biodiversité. Nous espérons que les entreprises compareront nos cartes et leurs lieux d’achat et reconsidéreront leurs chaînes d’approvisionnement », explique Keiichiro Kanemoto. Les auteurs appellent à un étiquetage des produits en fonction des risques qu’ils entraînent pour la biodiversité. « Les consommateurs pourraient ainsi choisir des produits respectueux de la biodiversité dans leur vie quotidienne », poursuit le scientifique nippon.

D’autant que, selon l’étude, les zones à protéger sont moins vastes qu’attendu : 5 % des aires marines les plus affectées par la consommation américaine concentrent par exemple 60 % des habitats des espèces menacées. L’étude peut ainsi permettre de « cibler les zones prioritaires ». Aujourd’hui, 90 % des 6 milliards de dollars (5,7 milliards d’euros) mobilisés annuellement pour protéger les espèces en danger sont dépensés dans les pays riches. Or « ce sont rarement dans ces pays que se trouvent les points chauds », relève M. Kanemoto.

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6 janvier 2017 5 06 /01 /janvier /2017 09:41

Pour sortir de la crise sociale, redistribuons les gains de productivité issus de l’automatisation en rémunérant le travail hors emploi. Tribune de Bernard Stiegler, philosophe, directeur de l'Institut de recherche et d'innovation, auteur de La Société automatique  (tome 1 : «  L’avenir du travail  », Fayard, 2015), tribune publiée par Le Monde le 4 janvier 2017.

LUCKEY_SUN/FLICKR/CC BY 2.0

LUCKEY_SUN/FLICKR/CC BY 2.0

L’avènement du Web en 1993 aura eu la même portée économique et politique que l’avènement de la chaîne de montage de la Ford T en 1913. L’une comme l’autre auront bouleversé les économies industrielles. Mais à la différence du taylorisme, qui fut la condition de l’avènement de l’« American Way of Life », l’automation fondée sur les algorithmes, la « data economy », les objets autonomes et la révolution robotique crée très peu d’emplois.

L’horizon économique et politique que verrouillent les entreprises de prédation, dont Uber est devenu le symbole, apparaît ainsi hermétiquement bouché, et c’est d’autant plus vrai que cette économie, qui est fondée sur le calcul automatisé, tend à former avec le capitalisme des plates-formes des systèmes clos sur eux-mêmes, éliminant la diversité qui seule pourrait nourrir des systèmes ouverts.

Ce que la juriste Antoinette Rouvroy (université de Namur, Belgique) a décrit comme une « gouvernementalité algorithmique » accroît ainsi les tendances au désordre entropique dont le mathématicien américain Norbert Wiener (1894-1964) analysait les dangers dès 1950 dans Cybernétique et société (1952, rééd. 2014, Seuil, « Points »). Ces tendances entropiques et court-termistes sont en outre aggravées par le fait qu’elles se combinent avec ce que les chercheurs en gestion Mats Alvesson (université de Lund, Suède) et André Spicer (Cass Business School, City University of London) ont décrit comme une « functional stupidity » managériale (la gestion par l’absurde dans les entreprises).

Ces caractères autodestructeurs – dont procédait aussi l’immense krach de 2008, dont aucune leçon n’aura pourtant été tirée – sont au sens propre précipités par la disruption qui semble de plus en plus inéluctablement conduire à la ruine des structures sociales. Dans un tel contexte, il est impossible que les populations qui subissent les conséquences de l’impuissance publique face à cette dynamique sans pilotes – mais non sans bénéficiaires – ne deviennent pas de plus en plus hostiles à ce qui est pourtant une évolution historique irréversible, en attendant de devenir proprement « furieuses ».

Processus de prolétarisation

Que faire ? Comme à l’époque du « New Deal » du président Roosevelt (1934), le monde entier – et pas seulement l’Amérique du Nord – est confronté à une mutation technologique et industrielle destructive qui requiert une transformation macro-économique de très grande ampleur. En sortir suppose une « nouvelle donne » capable de rendre durable un système industriel devenu planétaire à travers des réseaux numériques qui, faute d’une bifurcation majeure, accroîtra irréversiblement et fatalement son caractère autodestructeur.

Le développement industriel a conduit à une dégradation massive de la qualité de la vie en général et de l’espérance de la survie de l’espèce humaine, en particulier parce que depuis la fin du XVIIIe siècle, la division industrielle du travail a conduit à un immense processus de prolétarisation qui affecte désormais tous les types d’emplois, à tel point que le travail a été progressivement éliminé par l’emploi salarié. Si tant d’emplois sont susceptibles d’être remplacés par des automates logiques ou physiques, c’est parce qu’ils ne requièrent plus aucun savoir, c’est-à-dire plus aucune capacité de désautomatisation.

Au contraire de l’emploi ainsi prolétarisé, le travail est en effet ce qui produit du savoir – sous toutes ses formes : savoir vivre, savoir faire, conceptualiser… Autrement dit, le savoir est ce qui est capable de produire des bifurcations limitant l’entropie destructrice. Dès lors, il faut revaloriser le travail dans un contexte de dépérissement de l’emploi, ce qui signifie aussi qu’il faut redistribuer une part significative des gains de productivité issus de l’automatisation en rémunérant le travail hors emploi. C’est d’autant plus indispensable que faute de redistribution, le système engendrera une immense surproduction.

Revenu contributif conditionnel

Tels sont les constats et les concepts fondamentaux de « l’économie contributive », qui distingue fondamentalement travail et emploi, mais sans les opposer : il y a évidemment encore des emplois qui rémunèrent du travail – à peu près 50 % des emplois actuels si l’on en croit Carl Benedikt Frey et Michael Osborne, à Oxford (The Future of Employment : how susceptible are jobs to computerisation ?, 2013) et Andrew McAfee et Erik Brynjolfsson, au MIT (Le Deuxième Age de la machine, éd. Odile Jacob, 2015).

Cette économie repose sur un revenu contributif conditionnel, inspiré à la fois par un régime d’allocation de ressources hors emploi, comme le régime des intermittents du spectacle, par l’organisation coopérative du travail qui s’est déployée depuis plus de trente ans autour du logiciel libre, et par l’organisation des « communs » définis par l’économiste américaine Elinor Ostrom, en tant que communautés de savoirs. Un modèle de revenu, de travail et d’emploi que la communauté d’agglomérations Plaine Commune entend expérimenter en Seine-Saint-Denis au cours des dix prochaines années.

Conditionnel comme l’est le régime des intermittents, le revenu contributif est complémentaire du revenu minimum d’existence, qui lui est en revanche inconditionnel. La combinaison de ces deux nouvelles formes de redistribution, conçues comme deux aspects d’une nouvelle réalité macro-économique et d’une nouvelle dynamique industrielle, rendra les économies contemporaines durables, désirables et capables de retrouver la rationalité qui leur fait désormais tellement défaut. Ce faisant, elles regagneront leur crédibilité auprès de populations profondément et dangereusement désemparées.

En complément : « Le capitalisme a réduit notre champ de vision sur le travail » , « Ce n’est pourtant pas le travail qui manque ! » , et Et si on remplaçait l’emploi par le travail ?

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5 janvier 2017 4 05 /01 /janvier /2017 10:46

La Société générale renonce à financer le projet de mégacentrale à charbon indonésienne Tanjung Jati B 2. Le Crédit agricole s'y accroche. Par Marie-Noëlle Bertrand pour l’Humanité le 5 janvier 2016 - une bonne nouvelle pour commencer l'année, que nous vous souhaitons plus écolo que 2016 !

CIREBON 2, SUR L'ÎLE DE JAVA, COMPTE AU NOMBRE DES CENTRALES À CHARBON DANS LESQUELLES LE CRÉDIT AGRICOLE ENTEND TOUJOURS INVESTIR. PHOTO ACHMAD IBRAHIM/AP

CIREBON 2, SUR L'ÎLE DE JAVA, COMPTE AU NOMBRE DES CENTRALES À CHARBON DANS LESQUELLES LE CRÉDIT AGRICOLE ENTEND TOUJOURS INVESTIR. PHOTO ACHMAD IBRAHIM/AP

On aurait pu faire démarrer l'histoire en 2014, avec la bataille remportée contre le projet Alpha Coal, gigantesque complexe charbonnier envisagé en Australie. Mais ce serait nous faire voyager trop loin dans le temps et à travers les mers. La nouvelle dont il est question présentement a été validée ce 1er janvier. Et si, comme l'autre, elle s'est gagnée en France et aura un impact mondial, elle touche cette fois l'Indonésie. Après plusieurs mois de flottement, la Société générale, un pilier de l'investissement bancaire français, a officiellement confirmé son retrait du projet Tanjung Jati B 2, mégacentrale à charbon installée sur l'île de Java dont on vise le doublement de la capacité de production. Impliquant une hausse des émissions de CO2 de l'usine, l'ambition est dénoncée par les défenseurs du climat. La Société générale aura mis le temps avant de renoncer à y placer ses billes. Pour tout dire, la pression militante qui aura consisté à lui rappeler les engagements qu'elle avait pris du temps où les projecteurs de la COP21 nimbaient de vert son enseigne rouge et noire ne semble pas étrangère à sa décision.

« Répondre à l'intérêt général et non à une opportunité médiatique »

Tout commence, en fait, en mai 2015, rappelle Lucie Pinson, chargée de campagne sur les finances privées aux Amis de la Terre. « En amont de la conférence sur le climat, nous avions lancé un appel aux banques françaises, pour qu'elles s'engagent à ne plus financer le charbon », énergie entre toutes la plus émettrice de gaz à effet de serre. Aucune ne le signera. Mais à la veille du rendez-vous international, elles concéderont un geste. « La Société générale et le Crédit agricole, notamment, s'engageront à ne plus financer de nouveaux projets de centrales dans les pays riches », reprend Lucie Pinson. Un petit pas ­ il couvre au mieux 6,5 % du marché mondial du charbon au regard des projets annoncés depuis 2010. « Mais il nous offrait un argument de masse », poursuit la chargée de campagne de l'ONG. Si les banques françaises cherchaient sincèrement à répondre à l'intérêt général et non à une opportunité médiatique, où était la cohérence à ne se retirer des projets de centrales que dans les pays du Nord ? Ceux du Sud affectent tout autant le climat... » Mieux encore : dans le feu de la COP21, les banques françaises s'engagent, face aux États, à mener des politiques compatibles avec l'engagement de limiter le réchauffement « bien en deçà de 2 °C ». Or, le développement de nouvelles infrastructures charbonnières ne l'est pas. Le parc des centrales déjà en activité excéderait, à lui seul, de 150 % le quota d'émissions admises pour respecter cet objectif.

Mais, en janvier 2016, patatras ! Les ONG découvrent que deux établissements sont prêts à investir dans le projet Tanjung Jati B 2. Profitant d'un désistement de BNP Paribas, la Société générale et le Crédit agricole ont rejoint le groupe de ses financeurs. Pour défendre leur démarche, elles font valoir la haute technologie dont bénéficie la centrale, déclarée « propre », et les besoins énergétiques de l'Indonésie.

Java, pourtant, est déjà électrifiée à 80 %, rétorquent les ONG franco-indonésiennes, et si les besoins énergétiques y demeurent réels, les énergies renouvelables semblent à même d'y répondre. Mais la Chine a réduit sa consommation de charbon, et avec elle ses importations : l'Indonésie, premier exportateur mondial du minerai, a besoin de lui trouver un débouché. Une perspective économique qui ne passe pas inaperçue. En janvier 2016, toujours, le Crédit agricole engage, en sus, des études de financement pour une autre centrale javanaise, Cirebon 2, supportée par une entreprise japonaise, comptant elle-même au nombre de ses clients.

Les Amis de la Terre, épaulés de Greenpeace Indonésie et d'Oxfam, rencontreront les deux banques, squatteront leurs assemblées générales, publieront des rapports. Elles déploieront même une banderole de 20 mètres depuis le premier étage de la tour Eiffel. C'est à l'approche de la COP22, en décembre, qu'elles marqueront leur plus gros point. Elles ont, dans leurs tiroirs, une ultime expertise portant sur le respect des engagements pris un an plus tôt par les banques françaises. « Natexis s'était déjà officiellement dégagée de tout nouveau projet, BNP Paribas n'en soutenait pas... Société générale et Crédit agricole apparaissaient comme les mauvaises élèves. » Avant de dégainer l'étude, elles préviennent les deux banques. À la veille de sa publication, chacune sort un communiqué : elles s'engagent à ne plus financer aucun nouveau projet dont les contrats n'auront pas été finalisés au 1er janvier 2017. Or ceux de Tanjung Jati B 2 sont encore à l'étude.

La pression militante n'est pas étrangère à la décision finale de la Société générale.

À la date indiquée, la Société générale y a donc définitivement renoncé, comme elle avait renoncé, deux ans plus tôt, à être la banque-conseil du projet Alpha Coal, objet d'une forte opposition de la société civile. Le Crédit agricole n'a pas eu la même lecture. Prenant pour engagement non résiliable les études de financement préalables, la banque maintient, pour l'heure, ses engagements dans Tanjung Jati B 2 autant que dans Cirebon 2. La bataille des ONG n'est donc pas close, ni en France, ni en Indonésie. Ni ailleurs : 1 400 nouvelles centrales sont en projet de par le monde. Leur finalisation induirait un dépassement de 400 % du budget carbone toléré par l'objectif des 2 °C.

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