Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Bienvenu.e

  • : Les Lilas Ecologie : Blog des militants et élus Europe Ecologie Les Verts des Lilas et du Pré Saint-Gervais
  • : Culture, information, réflexion de l'écologie politique par les militants et les élus Europe Ecologie Les Verts des Lilas, du Pré Saint-Gervais, d'Est Ensemble
  • Contact

Recherche

Nous contacter ...

S'abonner à la Lettre d'information ...

C'est dans la colonne de droite tout en bas...

7 octobre 2019 1 07 /10 /octobre /2019 11:50

La « convention citoyenne sur le climat » s’est ouverte vendredi à Paris afin de proposer des mesures destinées à lutter contre le réchauffement climatique. Les ONG dénoncent une mise en scène de la part de l’État. D’après Eric Serres pour l’Humanité, Coralie Schaub pour Libération, et Gaspard d’Allens pour Reporterre du 4 au 7 septembre 2019.

Le 4 octobre à Paris. Le premier ministre Édouard Philippe a prononcé le discours d’ouverture de la « convention citoyenne sur le climat» devant 150 personnes tirées aux sort parmi 250 000 numéros de téléphone. Raphael Lafargue/POOL/REA

Le 4 octobre à Paris. Le premier ministre Édouard Philippe a prononcé le discours d’ouverture de la « convention citoyenne sur le climat» devant 150 personnes tirées aux sort parmi 250 000 numéros de téléphone. Raphael Lafargue/POOL/REA

« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs », dénonçait il y a dix-sept ans, Jacques Chirac en ouverture du sommet de la Terre. Aujourd’hui, la maison brûle toujours et le gouvernement français tente par tous les moyens de détourner les regards, faute de réel programme pour le climat. Certes, il vient d’innover, en mettant en place une « convention citoyenne sur le climat ». Un gage de démocratie plus participative, diront certains. Mais d’autres y voient déjà un énième enfumage, et notamment certaines ONG. Le récent incendie de l’usine Lubrizol à Rouen et les approximations de l’État face à la situation ont en effet mis le feu aux poudres quant à leurs inquiétudes. Car en ouvrant les travaux des 150 citoyens tirés au sort pour proposer des mesures de lutte contre le changement climatique, le Premier ministre a garanti que celles-ci seraient soumises à l’examen du Parlement ou au référendum, mais indiqué qu'il ne pouvait pas promettre que toutes seraient appliquées.

Un prétexte à l’inaction ?

Pour les organisateurs de la convention citoyenne pour le climat, la démocratie participative est d’abord un moyen de gagner du temps face à l’inertie du modèle actuel. Même si les propositions seront rendues d’ici quatre mois, fin janvier 2020, soit près d’un an après le lancement du « grand débat national », « la délibération au sein d’une assemblée citoyenne permet de dépasser les clivages et les blocages inhérents au système représentatif afin de créer des mesures plus justes et plus radicales », estime Thierry Pech, le coprésident du comité de gouvernance lors d’un point presse au CESE. Selon Cyril Dion, « le gouvernement, soumis à des enjeux électoralistes et de court terme, ne peut pas prendre les décisions nécessaires s’il veut se faire réélire ou plaire a tout le monde. Les citoyens, eux, le peuvent. Ils n’ont pas ces contraintes ».

Une position que partage Sophie Guillain, directrice générale de Res publica, une entreprise chargée de l’animation de la convention. « Les expériences délibératives montrent — un peu comme dans les jurys d’assises — que les gens viennent pour se mettre au service de l’intérêt général avec l’intention de faire de leur mieux, dit-elle. La délibération permet une évolution des positions contrairement à la démocratie représentative, où l’on hystérise des points de vue en les mettant en scène. »

Plusieurs associations écologistes restent néanmoins sceptiques. Greenpeace voit dans cet outil, « une manière de faire diversion » et une forme de procrastination : « Par cette manœuvre, le gouvernement se dédouane de ses responsabilités et repousse le moment d’agir, alors que les solutions sont connues depuis longtemps et que des textes importants pour le climat, comme la loi d’orientation des mobilités ou la loi Climat-Énergie, sont déjà en cours d’examen », écrit l’ONG dans un communiqué.

Une instrumentalisation de la part du gouvernement ?

Un gouvernement qui frappe et mutile les manifestants est-il réellement capable de laisser les citoyens décider à sa place ? Il est permis d’en douter, comme le montre l’exemple des États généraux de l’alimentation  (lire aussi L’Agriculture au glyphosate reste en Travert de la gorge des consommateurs et Sans répondre à la crise sanitaire, la loi Alimentation permet à l’industrie agroalimentaire d’augmenter ses prix) ou la récente consultation sur les pesticides. « L’enfumage écologique du gouvernement a depuis quelques mois la finesse d’un nuage de gaz lacrymos, note Maxime Chedin, il vise d’ailleurs le même effet de dispersion. »

La convention pourrait être une manière de faire peser sur les citoyens le poids d’une relance de la taxe carbone, qui obtiendrait, de ce fait, une onction démocratique. On retrouve cet enjeu dans les discours médiatiques de plusieurs ministres. Le 22 septembre, Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique, déclarait au micro d’Europe 1 que « la Convention citoyenne se penchera sur la question de la taxe carbone. On a échoué à l’expliquer et à convaincre dans la période précédente. C’est pour cela que nous avons arrêté son augmentation en 2019 et en 2020. Si on veut reprendre, il faut commencer par un débat citoyen ».

Mercredi 11 septembre, à la sortie du Conseil des ministres, Sibeth Ndaye, porte-parole du gouvernement, assurait que les ministres ne devraient pas être entendus par la convention. Pourtant Élisabeth Borne et Édouard Philippe sont déjà annoncés lors du premier week-end, ces 5 et 6 octobre. On retrouve aussi au sein du comité gouvernance de la convention Léo Cohen, l’ancien conseiller spécial de François de Rugy au ministère de la Transition écologique et solidaire.

Interrogé lors d’un point presse, Thierry Pech affirme cependant ne « recevoir, pour l’instant, aucune pression de la part du gouvernement et bénéficier d’une paix royale ». Trois garants, dont Cyril Dion, ont été nommés pour respecter l’indépendance de la convention.

Une mise sous tutelle des citoyens ?

Le rôle du comité de gouvernance au sein de la convention citoyenne est critiqué. Ce groupe composé d’une douzaine de membres — climatologue, experts de la démocratie participative, acteurs du champ économique et social — doit assurer le pilotage des travaux de la convention. Il définit l’ordre du jour, les méthodes de travail, le rythme des ateliers et sélectionne une liste d’experts et de grand témoins. Un rôle important qui interroge.

Car, « la démocratie délibérative, c’est la possibilité de déterminer par soi-même de façon autonome ce dont on veut parler et ce qui importe ou non », précise Maxime Chedin. « Dans cette convention, on traite les citoyens comme des mineurs, des écoliers que l’on va former grâce à des experts soi-disant neutres », dit-il. Pour le philosophe, les citoyens n’ont aucune souveraineté. « Ils sont enfermés dans un cadre imposé, avec un objectif défini sans eux. » Comment pourront-ils alors reprendre la main ?

Le philosophe appelle à un débordement de la structure. À un acte de désobéissance civile. « Les citoyens pourraient faire le Serment du palais d’Iéna », en référence à celui du Jeu de paume, quand les députés du tiers état, en juin 1789, s’étaient déclarés en assemblée souveraine. « Le serment pourrait être de ne pas se quitter avant d’avoir établi une fiscalité mettant fin aux scandaleuses inégalités qui sont la première source des désastres écologiques », pense Maxime Chedin.

De leur côté, les membres du comité de gouvernance assurent n’avoir qu’un « rôle méthodologique » et qu’il reviendra aux citoyens de la convention de choisir le chemin qu’ils veulent tracer. Néanmoins, quand Reporterre leur demande s’il sera possible d’aborder des cas d’étude précis, comme l’abandon de l’urbanisation des terres fertiles du triangle de Gonesse ou la fin de certains grands projets inutiles, ils en doutent. Leurs réponses restent prudentes. « Peut-être, mais ce n’est pas prévu », « J’aimerais bien, mais on n’y avait pas pensé », « ça risque d’être compliqué, on a peu de temps ». Pareil pour l’impôt de solidarité sur la fortune : Sophie Guillain, directrice de Res publica, ne voit pas le lien. « Pourquoi l’ISF ? Vous pensez que l’ISF peut faire baisser les émissions de CO2 ? On aura sûrement plus de débat autour de la taxe carbone », répond-elle à Reporterre.

« J’espère que ça servira à quelque chose »

Quoi qu’il en soit, ils étaient 150 citoyens – tirés au sort parmi 250 000 numéros de téléphone –, à franchir vendredi dernier les portes des locaux du Conseil économique, social et environnemental (Cese). Six week-ends de travaux au sein de la convention climat et une mission : « Proposer au gouvernement des mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40 % d’ici à 2030 par rapport à 1990… le tout dans un esprit de justice sociale », dixit le premier ministre, Édouard Philippe. Y a plus qu’à…

« Je suis très satisfaite, j’espère pouvoir faire entendre ma voix, j’ai de fortes convictions environnementales », expliquait ainsi Muriel, intermittente du spectacle. « J’espère que ça servira à quelque chose », racontait Alexia, une étudiante originaire de Guadeloupe. « Je vais poster mes impressions des travaux sur les réseaux sociaux, pour tenir au courant ma génération », continuait-elle. D’autres moins enthousiastes s’interrogeaient déjà sur les thématiques proposées. « J’attends qu’on nous explique. On nous dit 40 % de moins de gaz à effet de serre en 2030. Pourquoi 40 % ? Pourquoi pas 30 ? »

Des explications, ils en auront. Les participants pourront en effet s’appuyer dans leurs démarches sur l’expertise de scientifiques, d’économistes ou encore de chercheurs en sciences sociales ou politiques qui apporteront leurs connaissances sur les grandes thématiques qui devraient être abordées. À savoir : se déplacer, consommer, se nourrir, se loger, produire et travailler. Au terme de ces week-ends, les résultats seront soumis « sans filtre, soit au vote du Parlement, soit à référendum, soit à application réglementaire directe », a promis le président de la République Emmanuel Macron. « Ne doutez pas que nous serons à vos côtés pour les faire respecter », a confirmé en préambule Thierry Pech, coprésident du comité de gouvernance de la convention et directeur de la fondation Terra Nova.

Un grand groupe industriel parmi les 12 membres de la gouvernance

Jusque-là, et pour une première en France, rien à redire. Pourtant, c’est souvent dans les détails que se cache le diable. C’est ainsi qu’un premier lièvre a été levé. Madame Catherine Tissot-Colle, membre du Cese, mais surtout porte-parole de la Fédération des minerais, minéraux industriels et métaux non ferreux, a été nominée pour faire partie avec 12 membres de la gouvernance de la convention citoyenne. Outre ce rôle de porte-parole, elle travaille également pour le groupe français Eramet, l’un des leaders de l’exploitation du nickel, du lithium et du manganèse. Premier élément de malaise !

De fait, cette convention est loin d’inspirer confiance aux ONG environnementalistes, qui voient aussi dans la démarche une manière pour l’État de ne pas assumer ses responsabilités. « Le lancement de cette convention ne doit pas faire oublier l’inaction continuelle du gouvernement », dénonce Greenpeace, qui demande aux participants de « s’affranchir des limites imposées par le gouvernement ». Autre subterfuge, et non des moindres, que soulèvent les ONG : la possibilité de faire peser sur les citoyens l’idée d’une relance de la taxe carbone, qui avait entraîné le début du mouvement des gilets jaunes. En septembre, Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique, le laissait déjà entendre : « La convention citoyenne se penchera sur la question de la taxe carbone. On a échoué à l’expliquer… Si on veut reprendre, il faut commencer par un débat citoyen. » À mi-mot : je refile passe la patate chaude.

Partager cet article
Repost0
4 octobre 2019 5 04 /10 /octobre /2019 09:02

La famille des pesticides SDHI est-elle dangereuse au point de devoir être retirés du marché ? L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a-t-elle laissé passer des produits susceptibles de déclencher un scandale sanitaire ? C’est ce qu’affirme l’ouvrage de Fabrice Nicolino Le crime est presque parfait, paru en ce début septembre. Personnage central de l’ouvrage de Fabrice Nicolino, Pierre Rustin, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et responsable d’une équipe de recherche à l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), est le scientifique qui a donné l’alerte sur les SDHI. Propos recueillis par Marie Astier pour Reporterre. Lire aussi Le 4 octobre, les SDHI sont nos ennemis ! et Les SDHI, ces pesticides qui alarment les scientifiques.                                    Venez manifester avec nous devant la mairie des Lilas ce vendredi 4 octobre à 18h30.

L’Anses n’a pas pris la mesure du drame des SDHI

Reporterre : Quel est votre domaine de recherche ?

Pierre Rustin : Avec mes collègues, nous travaillons depuis plus de 30 ans sur les maladies mitochondriales [1], c’est-à-dire des maladies liées à des anomalies de la respiration des cellules. Ces maladies concernent possiblement tous les organes, seuls ou en association. Elles interviennent à tous les âges de la vie. Chez le jeune enfant, le fonctionnement du cerveau, du cœur ou des muscles est souvent concerné, chez les personnes âgées ce sont des maladies de type Parkinson ou Alzheimer. En plus de ces maladies, connues depuis peut-être 40 ans, s’ajoutent depuis les années 2000 des cancers.

Nous nous sommes intéressés aux facteurs de l’environnement qui pouvaient intervenir dans le déclenchement ou l’évolution de ces maladies. En faisant des recherches bibliographiques, nous sommes tombés sur le fait que l’on utilisait des pesticides SDHI en agriculture. Or, les SDHI inhibent la SDH (la succinate déshydrogénase), qui est une des enzymes importantes dans la respiration cellulaire.

Vous avez contacté l’Anses pour l’avertir du danger sanitaire…

En fait, nous lui avons posé cinq questions scientifiques majeures auxquelles nous n’avons toujours pas obtenu de réponse.

La première question est liée au fait que les SDHI tuent l’enzyme chez toutes les espèces biologiques que l’on connaît. En matière de conséquence environnementale, c’est le pire que l’on puisse envisager pour un pesticide : aucune spécificité entre les espèces.

La deuxième question, c’est que nous avons découvert que les SDHI de nouvelle génération ne bloquent pas seulement la SDH mais bloquent aussi d’autres éléments dans les mitochondries, ce qui veut dire qu’il n’y a pas non plus de spécificité de cible et que les conséquences attendues de l’usage de ces nouveaux SDHI sont encore pires.

Le troisième élément, c’est que les tests réglementaires actuels ne sont valables ni au niveau cellulaire — ils ne permettent pas de voir si une substance va bloquer le fonctionnement des mitochondries — ni au niveau des animaux utilisés comme modèles pour tester la toxicité des SDHI. Les rongeurs ne présentent pas du tout une susceptibilité aux mêmes cancers que ceux observés chez les humains.

Le quatrième point, c’est que d’autres produits qui, comme les SDHI, touchaient la respiration cellulaire [2], ont dû être retirés parce qu’ils causaient chez l’homme la maladie de Parkinson. Et là encore, ni les tests réglementaires ni nos autorités sanitaires ne décelaient de danger…

Le cinquième point est que l’utilisation en préventif de ces molécules SDHI, comme d’autres pesticides, est totalement inadmissible. On ne donnera pas des antibiotiques à son bébé en prévision d’une éventuelle infection. C’est pourtant ce que l’on fait en agriculture. C’est inadmissible et absurde parce que chez les champignons comme chez les bactéries, cette pratique est sans doute la meilleure façon d’induire l’apparition de résistances. Un phénomène constaté dès maintenant pour les SDHI.

Nous leur avons posé ces cinq questions simples mais cruciales, mais pour chacune, nous n’avons pas reçu de réponse.

Aviez-vous déjà eu affaire à l’Anses ?

Jamais, nous sommes tombés des nues. Très franchement, nous nous sommes quasiment disputés avec mes collègues parce que, naïvement, j’étais convaincu qu’en recevant notre coup de téléphone, l’Anses allait prendre instantanément la mesure du drame possible. Mes collègues m’ont dit : « Ce n’est pas comme cela que ça se passe ! » Elles avaient raison.

Nous avons été obligés de publier la tribune dans Libération pour que — comme l’Anses ose le dire — ils « s’autosaisissent ».

Roger Genet, directeur général de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), le 23 septembre, sur France Info

Roger Genet, directeur général de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), le 23 septembre, sur France Info

Vous vous êtes alors retrouvé dans une bataille médiatique ?

À notre corps défendant ! Parce que la toxicité des pesticides n’est vraiment pas notre domaine de recherche. Mais pour des raisons morales, il n’est pas possible de ne rien dire, de ne rien faire.

Quand j’entends le ministre de l’Agriculture dire, qu’en accord avec l’Anses et les scientifiques, « cinq mètres d’écartement entre les traitements et les maisons, c’est bien », cela me fait bondir ! Comme sur bien des problèmes de pesticides, le ministre se trompe. Concernant l’espace de cinq mètres, cela a un côté ridicule, soit les pesticides doivent être proscrits, soit non. Tout le monde sait que les pesticides sont partout dans l’air, dans l’alimentation, les rivières. Cette discussion est absurde, il est urgent de sortir des pesticides.

Le directeur de l’Anses, Roger Genet, et son directeur du pôle sciences, Gérard Lasfargue, ont été ces derniers temps très présents dans les médias, pour répondre à votre alerte, à l’ouvrage de Fabrice Nicolino, et rassurer sur les pesticides SDHI…

Mais jamais ils ne s’adressent à notre équipe. L’Anses ne répond pas à mes méls, à mes lettres. Cette agence est complètement discréditée à mes yeux, ils ne font pas leur boulot. Ce n’est pourtant pas à nous de démontrer que ces pesticides sont dangereux.

Sur les SDHI, l’Anses a constitué un comité d’experts de gens sur le sujet, qui n’ont en aucune façon répondu à nos cinq points. Nous le leur avons dit, reprécisé, nous n’avons jamais obtenu de réponse. Je ne vois pas ce que l’on peut faire de plus.

L’Anses vous reproche de ne pas donner de preuve de la toxicité des pesticides SDHI sur l’homme.

On devrait tout d’abord parler de la toxicité peu discutable des pesticides, parmi lesquels les SDHI, démontrée en laboratoire et désormais constatée sur l’environnement. Mais, si l’on ne s’intéresse qu’aux seuls effets chez l’homme, l’effet attendu est l’apparition ou l’accélération de maladies neurologiques, du type maladie de Parkinson. Or, une incidence accrue de cette maladie est justement observée dans les cohortes d’agriculteurs, et cela dans les délais attendus.

Par ailleurs, vous écrivez dans une lettre ouverte à l’Anses qu’elle vous a demandé de montrer l’effet des SDHI sur l’enzyme des mammifères. Or, ceci est fait depuis 1976 ?

Absolument. Une recherche menée il y a plus de 40 ans par les spécialistes mondiaux de l’époque montre l’effet de la carboxine, l’ancêtre de tous les SDHI. Déjà, ils concluaient que c’était et que ce serait une folie complète d’utiliser ce type de molécules.

C’est une folie que de chercher à bloquer la respiration cellulaire en visant des étapes clefs, parfaitement conservées dans l’évolution, depuis les microorganismes jusqu’à l’être humain. Au départ, nous n’avons même pas pensé à publier ces observations : les revues scientifiques n’aiment pas republier des choses connues depuis… 40 ans. Quand l’Anses nous a dit que l’on n’amenait rien de nouveau, ils avaient raison d’une certaine façon.

Quelles recherches avez-vous menées sur l’effet des SDHI ?

Paule Bénit, dans notre équipe, a notamment étudié l’action des SDHI de dernière génération. Elle l’a fait dans des conditions qui font que l’on voit l’effet des SDHI, alors que les tests réglementaires ne le permettent pas. Elle montre que des cellules humaines normales meurent en présence d’une faible concentration de SDHI, et que les cellules de patients Alzheimer meurent plus vite. Comme ce sont des maladies où les mitochondries ne marchent déjà pas bien, quand l’on ajoute des inhibiteurs touchant les mitochondries, on a une mort cellulaire encore plus rapide. L’article scientifique exposant cette recherche va être publié dans les semaines qui viennent.

Vous étiez-vous intéressé aux pesticides auparavant ?

Pas vraiment. De fait, nous sommes entrés dans le sujet différemment de toxicologues, à partir de nos études sur des maladies humaines, ce qui d’une certaine manière nous a protégés de la chape de plomb qui pèse sur une partie de la toxicologie.

Pour les SDHI, depuis 1976, les toxicologues auraient dû dire stop. Depuis des années, il était possible de savoir à partir de la littérature scientifique accessible, que les tests réglementaires n’étaient pas valables. C’était leur boulot de monter au créneau et le dire haut et fort.

Pour vous quelle est l’étape suivante ?

Que l’on arrête d’utiliser les SDHI. Il n’y a pas besoin d’étude supplémentaire. Si usage il doit y avoir, alors il faudrait revoir complètement la façon de les utiliser, c’est-à-dire au moins en finir avec les épandages préventifs, qui sont des folies, que cela soit à 5 mètres ou plus.

D’autant que beaucoup de ces molécules n’ont pas prouvé leur efficacité. Je vous engage à essayer de connaître l’effet sur le rendement de ces SDHI. Ni la FNSEA [le syndicat agricole majoritaire], ni les industriels, ni l’Anses n’ont été capables de nous donner des chiffres sur l’effet sur le rendement de ces molécules. Le bénéfice-risque n’est donc même pas connu.

Et que pensent l’Inserm et le CNRS, vos employeurs, de tout cela ?

Avec leur accord, nous pouvons librement parler.

Partager cet article
Repost0
2 octobre 2019 3 02 /10 /octobre /2019 10:59

En 1770, la première grande pollution industrielle chimique en France avait eu lieu à 500 mètres du site de Lubrizol. L’inspection des établissements dangereux, comme Lubrizol à Rouen, s’est « singulièrement assouplie » pour éviter de trop contraindre les propriétaires d’usine. Un héritage des siècles passés et de l’industrialisation à tout crin. Une tribune de Thomas Le Roux, historien, parue dans Le Monde le 2 octobre 2019. Chercheur au CNRS, Thomas Le Roux est auteur, avec François Jarrige, de « La Contamination du monde. Une histoire des pollutions à l’âge industriel » (Seuil, 2017). Lire aussi La toxicité du Roundup connue de Monsanto depuis au moins 18 ans et Amiante : un permis de tuer pour les industriels

.

L’usine Lubrizol en feu, à Rouen le 26 septembre, vue d’un drone. (©SDIS 76)

L’usine Lubrizol en feu, à Rouen le 26 septembre, vue d’un drone. (©SDIS 76)

C’est à 500 mètres de l’actuelle usine Lubrizol de Rouen qu’eut lieu la première grande pollution industrielle chimique en France, au cours des années 1770, dans le quartier Saint-Sever, sur la rive gauche : les fumées corrosives d’une fabrique d’acide sulfurique détruisirent la végétation alentour et on les soupçonna de menacer la santé publique. Malédiction sur le site ou simple coïncidence ? Ni l’un ni l’autre : mais c’est au miroir du passé que l’on peut mieux comprendre comment le risque industriel et les pollutions sont encadrés aujourd’hui.

Le procès instruit en 1772-1774 après la mise en cause de la fabrique d’acide, a en effet produit un basculement dans l’ordre des régulations environnementales, un vrai changement de paradigme lourd de conséquences.

Une mise en lumière du processus historique aide à répondre à un panache de questions, telles que : « Seveso, quèsaco ? », « Une usine dangereuse dans la ville, est-ce possible ? », « Tire-t-on les leçons d’une catastrophe industrielle ? » Ou encore : « l’industriel : responsable, pas coupable ? »

Les directives européennes Seveso

L’usine d’additifs pour essence et lubrifiants Lubrizol est classée « Seveso – seuil haut ». Elle est donc parfaitement connue des autorités de régulation, à savoir l’Inspection des établissements classés, qui dépend du ministère de la transition écologique et solidaire, et qui a un rôle préventif et de surveillance.

Le classement Seveso découle d’une harmonisation européenne des règles de droit des différents Etats régissant les industries les plus dangereuses. Il tire son nom de celui de la ville de Lombardie où, en juillet 1976, l’usine chimique Icmesa laisse s’échapper un nuage toxique de dioxine qui contamine les environs. Pour prévenir ce type d’accident, trois directives européennes Seveso sont successivement adoptées en 1982, 1996 et 2012 (entrée en vigueur en 2015). Une telle exposition des faits pourrait laisser penser que, tirant les leçons de l’expérience (un accident), les autorités réagissent et fondent un droit protecteur, sans cesse amélioré. Il n’en est rien.

D’une part parce qu’avant la mise en place des directives Seveso, les Etats avaient déjà leur propre réglementation, parfois plus sévère. D’autre part parce que les centrales nucléaires, par exemple, y échappent. Enfin, parce que l’on peut douter de l’efficacité du dispositif.

En matière d’industrie dangereuse, l’accident n’est pas exceptionnel, c’est la norme. Les accidents dans les établissements classés français sont passés de 827 en 2016 à 978 en 2017, et 1 112 en 2018 et près de la moitié d’entre eux laissent s’échapper dans l’environnement des substances dangereuses. Les établissements Seveso contribuent sensiblement à cette progression : pour 15 % en 2016, 22 % en 2017 et 25 % en 2018.

Relâchement dans la régulation depuis la directive Seveso 3 de 2012 ? Remontons quelques années plus en amont, car, au nom d’une simplification des règles administratives, l’inspection des établissements dangereux s’est singulièrement assouplie pour moins contraindre les industriels.

Ainsi, depuis 2010, la nouvelle procédure de « l’enregistrement » a fait baisser significativement le nombre des usines devant se plier aux procédures d’autorisation de fonctionnement. Et cela malgré le souvenir, pas si lointain, de l’explosion mortelle d’AZF à Toulouse en 2001.

Cette procédure a accouché du dispositif des PPRT – plans de prévention des risques technologiques (2003), dans le but de réduire la proximité des installations classées avec les habitations, et dans lesquels, par un curieux renversement de perspective, il est prévu d’exproprier non pas l’industriel source de danger mais le résident qui a eu l’imprudence de venir habiter trop près ou la malchance de voir s’installer une usine près de chez lui. Chacun appréciera.

Comment comprendre que près de quarante ans après la première directive Seveso, la coexistence des habitations et des industries dangereuses soit encore possible ? C’est que ces directives reprennent l’esprit de législations nationales déjà existantes dont le but est, depuis le XIXe siècle, d’encourager l’industrialisation, quitte à sacrifier des zones au nom de l’utilité publique.

Revenons au procès de l’usine d’acide sulfurique de Rouen et son verdict par un arrêt du Conseil du roi, où l’affaire a été renvoyée, en 1774 : à l’encontre de la jurisprudence établie depuis des siècles et qui visait à protéger la santé publique en supprimant toute nuisance de voisinage, il est décidé, après moult débats entre les ministres, que l’usine peut continuer à fabriquer son acide, défense faite au voisinage de gêner son fonctionnement. L’acide sulfurique est alors un nouveau produit, puissant, innovant et indispensable au décollage des industries textile et métallurgique, moteurs de l’industrialisation.

Les populations doivent s’adapter

La décision du Conseil crée une brèche inédite dans la régulation des pollutions et risques industriels ; elle est à l’origine d’un bras de fer de plusieurs décennies entre industrialistes (acception large incluant les industriels, de nombreux scientifiques et la plupart des administrateurs de l’Etat) et défenseurs d’une jurisprudence rétive aux activités de production polluantes (voisins, agriculteurs, polices et justices locales).

La Révolution française et l’Empire napoléonien scellent finalement le nouveau pacte entre l’industrie et l’environnement, dans un contexte de guerre et de mobilisation de masse. La période voit une libéralisation considérable des contraintes juridiques environnementales.

En 1810, au plus fort de l’Empire, une loi sur les industries polluantes (la première du monde) se surimpose au droit commun et y déroge. Elle instaure un régime administratif industrialiste, qui est copié immédiatement sur tout le continent, puis adapté outre-Manche et outre Atlantique à la fin du XIXe siècle.

Les réformes ultérieures de la loi (en 1917 et en 1976 en France), y compris celle de Seveso, n’y changent rien : c’est aux populations de s’acclimater à l’industrie et son cortège de risques et de pollution, au nom de l’utilité publique, l’industrialisation étant assimilée au bien général. Plutôt que d’interdire un produit, on commence à définir une acceptabilité par la dose et les seuils. D’où la banalité de la proximité des usines dangereuses avec des zones habitées depuis deux cents ans.

Surtout, en conséquence de la loi de 1810 et du contrôle administratif, l’industriel échappe à la sphère pénale en cas de pollution : déjà responsable sans être coupable. Les seuls recours judiciaires possibles sont civils, pour déterminer des indemnités pour dommages matériels. Encore aujourd’hui, les poursuites pénales sont extrêmement rares, et les condamnations très faibles, l’exemple de l’entreprise Lubrizol venant confirmer cette règle, avec sa condamnation pour un rejet de gaz toxique, en 2013, à 4 000 euros d’amende – soit une broutille pour une entreprise de cette taille.

Autre leçon des régulations post-1810 : leur insistance sur l’amélioration technique, censée rendre, toujours à court terme, l’industrie inoffensive. La récurrence de l’argumentation, décennie après décennie, laisse rêveur au regard de la progression parallèle de la pollution au niveau mondial. Si la pression du risque industriel est partiellement contenue en Europe depuis les années 1970, c’est en grande partie la conséquence des délocalisations principalement en Asie, où les dégradations environnementales sont devenues démesurées.

La régulation des risques et des pollutions ne protège donc pas assez les populations, parce qu’elle protège avant tout l’industrie et ses produits, dont l’utilité sociale et l’influence sur la santé sont insuffisamment questionnées. Les garde-fous actuels (dispositifs techniques, surveillance administrative, réparation et remédiation, délocalisations) ont pour but de rendre acceptables les contaminations et les risques ; ils confirment une dynamique historique tragique dont l’accident de l’entreprise Lubrizol n’est que l’arbre qui cache la forêt dense de pollutions toujours plus chroniques, massives et insidieuses.

Partager cet article
Repost0
1 octobre 2019 2 01 /10 /octobre /2019 21:55

Le vendredi 4 octobre à 18H30, les signataires de l’Appel à la résistance pour l'interdiction de tous les pesticides Nous voulons des Coquelicots se retrouvent à nouveau devant les mairies de leurs villes et villages. 421 événements sont annoncés pour le 4 octobre ! Lire aussi  Les SDHI, ces pesticides qui alarment les scientifiques  et Nous voulons des coquelicots...

Le 4 octobre, les SDHI sont nos ennemis !

Pour le premier anniversaire de notre beau mouvement des Coquelicots, nous avons décidé de passer à la confrontation. Avec le système infernal et criminel qui autorise l’empoisonnement de tous.

Car il y a du nouveau, avec ce sigle que tout le monde va découvrir : SDHI. Ces nouveaux pesticides sont partout en France, et représentent un danger inouï. Ils sont pourtant soutenus et même félicités par nos autorités d’État, ainsi que le raconte un livre explosif qui parait le 11 septembre.

Notre agence de sécurité sanitaire, l’Anses, est partie prenante du lobby des pesticides et démontre d’une manière éclatante qu’elle ne protège ni les humains ni les écosystèmes. La situation est si grave qu’elle remet en cause le contrat social qui lie nos vies et nos institutions.

Bien sûr, le mouvement des Coquelicots est, reste et restera non-violent et démocratique. Mais cela n’empêche pas la révolte, la saine révolte contre un ordre qui n’est plus respectable. Nous découvrirons ensemble, au fil des semaines, quelles actions peuvent être menées. Sachez que le petit groupe d’origine a des idées précises, qui en étonneront plus d’un. En voici une première, à découvrir ici.

Il va de soi que chacun peut proposer sa propre partition, éventuellement meilleure que nos propositions. Retenez que la deuxième année des Coquelicots doit montrer sa force sur le terrain. Les rassemblements devant les mairies doivent être maintenus et amplifiés, mais ouvrez grand vos oreilles, et préparez-vous à l’action. C’est le moment.

L'association Nous voulons des coquelicots

Partager cet article
Repost0
25 septembre 2019 3 25 /09 /septembre /2019 10:16

François Sureau, avocat aux conseils et écrivain, s’alarme du désintérêt croissant des citoyens pour ce fondement de la démocratie qu’est la liberté, tandis que les gouvernements grignotent l’Etat de droit dans une indifférence totale. Ecouté des politiques, proche de François Fillon comme d’Emmanuel Macron, l’avocat remet, sans prendre de gants et sans illusions, la liberté au cœur de ce qui devrait être la conscience politique. Extraits de « Sans la liberté » , à paraître le 26 septembre chez Gallimard, collection « Tracts ».

François Sureau (photo Editions Tallandier)

François Sureau (photo Editions Tallandier)

Chaque année un peu plus depuis vingt ans, les plaques tectoniques de notre société politique se déplacent dans une mesure telle que j’ai fini, comme bien d’autres, par me demander si l’amour de la liberté, ou celui de l’Etat de droit qui vise à le garantir, n’étaient pas un simple vernis, une référence morte, un propos de fin de banquet. Je parle moins ici des coups de canif, bientôt de scie égoïne, portés à la Constitution, que des raisonnements produits en nombre pour les justifier, et qui semblaient passer sans obstacle de la police aux procureurs, des procureurs aux parlementaires, personne ne paraissant s’aviser de l’étrangeté d’un ordre où on laisserait aux chiens de garde le soin de redessiner la maison.

Je me suis aperçu qu’il suffisait d’un rien – même si ce à quoi nous assistions pouvait chaque jour plus difficilement être assigné à cette catégorie – pour que l’air de la liberté se raréfie. Pire encore, que personne ne paraissait étouffer pour autant. Un jour viendra peut-être où nous pourrons recommander sans nous trahir de remplacer le blanc au milieu du drapeau tricolore par un beau gris préfectoral.

Que les gouvernements, celui d’aujourd’hui comme les autres, n’aiment pas la liberté, n’est pas nouveau. Les gouvernements tendent d’abord à l’efficacité. Que des populations inquiètes, après un demi-siècle passé sans grandes épreuves et d’abord sans guerre, du terrorisme ou d’une insécurité diffuse ne soient pas portées à faire le détail n’est pas davantage surprenant. Mais il ne s’agit pas de détails. L’Etat de droit, dans ses principes et dans ses organes, a été conçu pour que ni les désirs du gouvernement ni les craintes des peuples n’emportent sur leur passage les fondements de l’ordre politique, et d’abord la liberté.

C’est cette conception même que, de propagande sécuritaire en renoncements parlementaires, nous voyons depuis vingt ans s’effacer de nos mémoires sans que personne ou presque ne semble s’en affliger. Je tiens pour vain l’exercice de l’indignation. L’indignation suppose je ne sais quel optimisme que je ne partage plus, l’idée qu’une protestation bien argumentée pourrait faire dévier le cours des choses. Nous n’en sommes plus là. Nous nous sommes déjà habitués à vivre sans la liberté. (…)

Les hasards de la vie m’ont amené à voir comment se prenaient les décisions qui affectent nos libertés, qu’elles soient gouvernementales, législatives ou juridictionnelles. Je n’ai pas été rassuré à ce spectacle, qui m’est apparu comme celui de la démission des acteurs principaux de la démocratie représentative face aux réquisitions intéressées des agents de la répression. A eux non plus il n’est pas possible d’en vouloir, mais bien plutôt à ceux qui ont la charge de les contrôler et de les commander et qui s’en abstiennent, soit par incapacité, soit par inculture – je parle ici d’inculture constitutionnelle –, soit par démagogie. On peut tenir pour peu de chose la déclaration de tel ministre de l’intérieur selon laquelle les forces de l’ordre le trouveront toujours derrière elles, pour les suivre en effet et les absoudre autant qu’il est possible, et non pas devant elles, pour les commander. On peut aussi y voir l’aveu d’une démission que tous les grands mots du monde ne pourront plus effacer de notre mémoire collective, si du moins nous ne cessons pas d’oublier que nous sommes des citoyens avant d’être des électeurs.

Citoyens, tant que nous le restons, nous devons accepter de prendre sur nous une large part des fautes de ceux que nous nous sommes donnés pour nous diriger. Il n’y a pas de ministre de l’intérieur. Il dépend à la fin de nous que ceux qui gouvernent et répriment puissent ou non aller jusqu’au bout de cette inclination à l’autoritarisme qui est le lot de tout pouvoir, raison pour laquelle nos constituants ont voulu précisément que les pouvoirs fussent séparés. C’est pourquoi l’article 16 de la Déclaration dispose que « toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Ce texte, comme la plupart de ceux de son époque, mêle l’optimisme quant aux citoyens – jugés capables de discernement et d’action – et le pessimisme quant aux gouvernants – jugés portés à abuser des pouvoirs et à méconnaître les droits. Ces deux propositions tendent à s’inverser ces jours-ci.

Un édifice des droits parcouru de lézardes

Ce que je disais du ministre de l’intérieur vaut pour les autres. Le plus souvent les ministres n’existent pas, les ministres d’aujourd’hui moins que ceux du régime parlementaire. Sitôt nommés, ils vivent dans la crainte d’un mot du président, dans l’angoisse d’une note technique défavorable produite par un de ses conseillers, d’une révélation de presse, obligés d’être partout, au Parlement ou à la radio, de tweeter, d’exister enfin. Les ministres ne sont que notre miroir, certes taché par la buée de leurs ambitions, ou notre image collective par instants se voile, mais pas davantage. (…)

Après vingt ans, tous les gouvernements, tous les Parlements y ayant prêté la main, nous pouvons regarder un édifice des droits parcouru de lézardes. Une part de la difficulté vient de ce que ces lézardes ne sont pas toujours perceptibles, hors le spectacle des forces de l’ordre armées en guerre patrouillant dans les rues des villes, l’abus des sirènes de police, la recension des blessures mutilantes dues aux armes modernes. Lorsqu’on les perçoit, nombreux sont ceux parmi nous qui sont portés à détourner le regard, à absoudre les fautes parce que les temps sont difficiles. L’excuse est commode. Les temps sont toujours difficiles pour ceux qui n’aiment pas la liberté.

Notre système des droits n’a pas été pensé seulement pour les temps calmes. A l’époque où il est apparu sous sa forme moderne, l’insécurité était assez générale. On ne traversait pas la forêt de Bondy sans escorte. C’est en des temps bien plus calmes que nous nous sommes éloignés des principes. Il n’est pas nouveau que les gouvernants s’impatientent de la liberté. Il est plus étonnant que le citoyen y consente, parce qu’il est inquiet bien sûr, mais plus profondément parce qu’il se pense moins désormais comme citoyen que comme individu, réclamant des droits pour lui et des supplices pour les autres, prêt à ce que la liberté de tous s’efface pour peu qu’on paraisse lui garantir la sienne, sous la forme d’une pleine capacité de jouissance des objets variés qu’il aime. Bernanos écrit que la liberté des autres lui est aussi nécessaire que la sienne. Cette idée n’est plus si communément partagée. Les gouvernements n’ont pas changé. C’est le citoyen qui a disparu.

Nous pouvons voir à présent où ce chemin nous mène. Il s’en est fallu de peu que, sous prétexte de terrorisme, ne soit introduit dans le droit français un pur délit cognitif, celui de la consultation de sites Internet, motif pris de leur caractère dangereux ; c’est-à-dire que nous consentions à cette censure qui, à la fin, ne peut se fonder que sur l’idée que le citoyen n’est pas un être majeur et capable de discernement ; il s’en est fallu de peu que, répudiant une conception qui animait notre droit criminel depuis le Moyen Age, nous ne considérions qu’il était possible de condamner quelqu’un sur la vague intention du passage à l’acte, sans même pouvoir relever un commencement d’exécution ; il s’en est fallu de peu que les agents du gouvernement ne pussent assigner à résidence de simples suspects, comme sous la Terreur ou dans les pires moments de la Restauration. Gouvernements et Parlement de droite et de gauche ayant cédé sous la vague, par lâcheté, inculture ou démagogie, il n’a dépendu que du Conseil constitutionnel que ces errements soient arrêtés. Encore n’est-ce, on peut le redouter, que temporaire. Tout le monde voit bien, si l’on en juge par tant de déclarations fracassantes, que le moindre attentat nous met à la merci des mêmes emportements.

Ce qui est troublant, c’est qu’on ne peut pas les réputer fondés sur la recherche d’une efficacité maximale dans la répression. Le droit pénal français, modifié pratiquement chaque année depuis dix ans, est l’un des plus durs qui soient, et personne ne peut tenir les procureurs et les juges du siège pour des agneaux bêlant les litanies de l’humanitarisme. Ainsi le sacrifice des principes ne sera-t-il jamais payé d’une autre monnaie que celle de l’abaissement en pure perte. Tout se passe comme si, depuis vingt ans, des gouvernements incapables de doter, de commander, d’organiser leur police ne trouvaient d’autre issue que celle consistant à restreindre drastiquement les libertés pour conserver les faveurs du public et s’assurer de son vote, dans une surprenante course à l’échalote qui nous éloigne chaque année un peu plus des mœurs d’une véritable démocratie. (…)

Nous avons renoué avec une préférence ancienne

Ce qui est inattendu, c’est que les atteintes portées au droit depuis vingt ans ont été le fait de gouvernements et de Parlements en réalité plutôt centristes. De tels pouvoirs ne sont d’ordinaire pas portés aux excès dans la gestion des libertés publiques, puisqu’ils ne peuvent se réclamer d’aucun horizon, d’aucune perspective qui les justifieraient. Si bien que le viol des libertés par un gouvernement généralement centriste manifeste simplement son manque de fermeté d’âme dans l’occupation du terrain qui est le sien propre, ce qui, et de loin, ne permet pas de l’absoudre. Pris d’ailleurs dans une autre perspective cavalière, celle qui embrasse les deux camps opposés qui ont longtemps structuré la vie politique française, le paysage n’est pas plus hospitalier : la gauche a abandonné la liberté comme projet. La droite a abandonné la liberté comme tradition, comme élément central d’une tradition nationale au sens de Burke. Le premier camp réclame des droits « sociétaux » comme on dit aujourd’hui, dans un long bêlement progressiste, le deuxième réclame des devoirs dans un grand bêlement sécuritaire.

Nous avons renoué avec une préférence ancienne pour l’ordre social, justifiant de tenir pour négligeables, comme sous la Terreur, l’Empire, la République de l’ordre moral ou le régime de Vichy, les atteintes portées aux libertés individuelles. Nous nous sommes engagés dans cette logique de l’office si bien décrite par Agamben, une logique dans laquelle les droits sont définis par les titulaires des offices au lieu que les citoyens n’imposent à ceux-ci la norme de leur liberté. Et c’est ainsi que le ministre de l’intérieur a pu faire voter une disposition qui fait, sur près du tiers du territoire, du contrôle administratif au faciès la norme, et cela dans un texte visant à réprimer le terrorisme, liant ainsi de manière insultante et injuste le terrorisme à l’étranger, dans l’indifférence à peu près générale ; c’est ainsi que le président de la commission des lois du Sénat a réintroduit le délit d’opinion dans le droit français quarante-huit heures après l’annulation par le Conseil constitutionnel du délit de consultation des sites terroristes ; c’est ainsi qu’un Parlement égaré aura consacré, sans que le Conseil constitutionnel y fasse vraiment obstacle, le principe selon lequel les agents du gouvernement peuvent trier parmi les citoyens ceux qui sont admis à manifester. (…)

Nous avions fait des droits de l’homme le principe de notre gouvernement, mais nous n’avons pas cessé de nous trouver de bonnes raisons de les méconnaître, si bien que nous n’avons plus ni vraiment de liberté ni vraiment de gouvernement. Nous sommes devenus incapables, par voie de conséquence, de respecter ces instruments qui ne sont que des instruments mais qui conditionnent l’exercice de la liberté effective, et d’abord la séparation des pouvoirs, continûment violée dans sa lettre et dans son esprit depuis près de dix ans, au mépris des droits du citoyen.

C’est un ministre de l’intérieur ou des syndicats de police, on ne sait trop, critiquant les décisions des tribunaux répressifs. C’est un président de la République missionnant, à propos de la rétention de sûreté, le premier président de la Cour de cassation pour qu’il lui indique comment contourner la jurisprudence constitutionnelle. C’est le Sénat recueillant des déclarations sous serment en période d’enquête judiciaire au mépris des principes élémentaires de la procédure pénale. Les exemples sont innombrables de cette dégradation de nos mœurs.

A la fin nous sommes devenus cette nation que les pauvres indiffèrent mais qui va ficher les cyclistes, que le costume des femmes dérange sur les plages mais qui se voile la face devant le harcèlement d’une crèche par des fanatiques religieux, et qu’aucun principe ne retient plus lorsqu’il s’agit de réclamer les échafauds pour les puissants et des bagnes pour le commun des mortels. Qu’est-ce qu’une société juste ? Comment l’atteindre ? Qu’est-ce qu’une société libre ? Comment peut-on la défendre sans la faire disparaître ?

Devant nous ces questions, non pas, si je puis dire, intactes mais dégradées. Une génération de politiques formés par l’administration, serviteurs devenus maîtres, aura renoncé à l’action véritable tout en diminuant nos libertés. Nous ne jouissons plus vraiment des avantages, il y en avait, de l’Etat gaullien. Nous sommes régis désormais par ces autorités indépendantes anonymes dont la bureaucratie augmente paradoxalement avec les injonctions de la doxa concurrentaliste. Les fonctionnaires ne dirigent plus mais « animent », et dans le même temps, les juges ne sauraient vraiment, faute de moyens, remplir l’espace laissé vide par la décadence des exécutifs. Et je persiste à trouver étrange que, dans ces circonstances, on fasse plutôt le procès de la presse, qui n’est après tout qu’un pouvoir social, que celui des institutions que la Constitution a établies.

Soumis à l’imperium d’autorités dégradées et de personnalités faibles, nous nous sommes en outre laissé empoisonner l’esprit par un langage abâtardi qui emprunte à tous les registres, à la psychologie, à la mécanique des fluides, à tous les registres sauf à celui de la politique. Le vocabulaire proprement politique disparaît avec les idées qui le fondaient, et emprunte de plus en plus à la médecine (les « phobies »), à l’ingénierie (les « chantiers »), à l’art militaire (les « gardes rapprochées »), à l’anthropologie (les « familles politiques »), au théâtre (l’« acte XXX des « gilets jaunes » », l’« acte II » du quinquennat).

Partager cet article
Repost0
14 septembre 2019 6 14 /09 /septembre /2019 12:49

Ils sont massivement utilisés dans l’agriculture depuis les années 2000, et on en retrouve partout, jusque dans nos assiettes. Selon un groupe de spécialistes, qui réclament leur suspension, les fongicides SDHI présentent un risque important pour la santé. Et la Consultation publique sur les pesticides lancée par le gouvernement concernant la distance minimale entre les habitations et les zones d’épandage est hypocrite - seuls les commentaires sur 5 ou 10 m sont possibles. D’après Émilie Torgemen pour Le Parisien, Fabrice Nicolino et https://nousvoulonsdescoquelicots.org/, 6 au 12 septembre 2019. Lire aussi Fongicides SDHi : vers un nouveau scandale sanitaire ?

Villefranche-de-Lauragais (Haute-Garonne), en 2018. Parmi les fongicides SDHI, on compte notamment le Boscalid, vaporisé sur les champs de blé, d’orge et les vergers. (Illustration.) AFP/Rémy Gabalda

Villefranche-de-Lauragais (Haute-Garonne), en 2018. Parmi les fongicides SDHI, on compte notamment le Boscalid, vaporisé sur les champs de blé, d’orge et les vergers. (Illustration.) AFP/Rémy Gabalda

Fraises, salades, pommes, blé, gazons des terrains de sport… « Personne ne les connaît, ils sont pourtant épandus partout ! » s'alarme Fabrice Nicolino, qui publiera jeudi 12 septembre une enquête très fouillée sur les SDHI : « Le Crime est presque parfait » (Ed. Les liens qui libèrent, 224p., 20 euros). Cette famille de fongicides est au cœur d'une guerre de tranchées entre scientifiques et experts des autorités sanitaires.

Pourquoi ? Côté pile, les SDHI s'attaquent à la succinate déshydrogénasse, enzyme qui participe à la chaîne respiratoire des champignons, et permettent ainsi de détruire ces nuisibles qui attaquent les récoltes. Mais côté face, selon plusieurs chercheurs, ils peuvent de la même manière bloquer le système respiratoire des animaux et des êtres humains.

« Conséquences potentiellement catastrophiques »

« C'est une folie que d'utiliser massivement ce produit. Nous avons testé ces inhibiteurs en laboratoire, ils tuent aussi bien l'enzyme du ver de terre, de l'abeille que de l'homme avec des conséquences potentiellement catastrophiques », affirme Pierre Rustin, chercheur à l'Inserm.

Ce spécialiste mondialement reconnu a découvert par hasard que les agriculteurs utilisaient massivement ces produits potentiellement très toxiques. « On en relargue des centaines de tonnes dans la nature », se désole le scientifique, qui a aussitôt contacté les autorités sanitaires. Une alerte restée sans réponse pendant des mois.

Alors, aux côtés de huit autres chercheurs -cancérologues, médecins, toxicologues-, Pierre Rustin a publié une tribune appelant à « suspendre l'utilisation tant qu'une estimation des dangers et des risques n'aura pas été réalisée par des organismes publics indépendants ». On soupçonne la SDHI d'entraîner de graves encéphalopathies et d'être à l'origine de cancers.

Des évaluations vont être lancées

En réponse, l'ANSES, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, a publié un rapport en janvier qui conclut que l'alerte n'est pas fondée et qu'il n'y a pas lieu d'interdire ces produits. « Le rapport était d'une indigence incroyable, regrette Pierre Rustin. Il évoque par exemple l'effet dose de ces produits chimiques. Or, dans les maladies mitochondriales ( NDLR : pathologie en rapport avec la chaîne respiratoire ), on ne connaît pas grand-chose mais l'on sait que ce n'est pas la quantité de produit qui crée le problème. »

Les neuf spécialistes travaillent aujourd'hui d'arrache-pied pour publier dans des revues scientifiques des preuves de la dangerosité scientifique des SDHI. Contactée, l'Anses renvoie de son côté vers le point publié cet été sur son site. Ce communiqué rappelait d'une part qu'« à ce jour, aucun nouvel élément n'est venu confirmer l'existence d'une alerte sanitaire », tout en précisant que l'agence qui ne clôt pas ce dossier et va lancer des projets de recherche pour vérifier la dangerosité de ces pesticides.

Quels sont les noms de ces fongicides ?

Il y a le Boscalid, commercialisé par BASF et « vaporisé » sur le blé, l’orge, les vergers. Il y a aussi l’Exteris stressgard spécialiste des gazons de foot, ou encore l’Isopyrazam de Syngenta, entre autres pour protéger les bananes d’un terrible champignon. Sous ces noms commerciaux, onze substances actives de la famille des inhibiteurs de la succinate déshydrogénase (SDHI) sont autorisées en France.

Controversés, ces pesticides luttent contre certains champignons et moisissures qui attaquent les cultures. Ces fongicides ont été utilisés entre les années 1960 et les années 1990, mais c’est surtout depuis les années 2000 que les SDHI font leur grand retour. La plupart ont été autorisées en 2013 en France.

Ils sont depuis omniprésents dans le traitement des récoltes, parfois utilisés en enrobage directement sur les semences. Jusqu’à 80 % des champs de blé sont traités avec des SDHI. Le Boscalid est selon les ONG, le pesticide qui laisse le plus de traces dans nos assiettes.

-------------------------

Il faut cesser cette folie

Les SDHI, ces pesticides qui alarment les scientifiques

Dans son nouveau livre d'enquête qui est sorti le 12 septembre, « Le Crime est presque parfait » (Ed. Les liens qui libèrent, 224p., 20 euros), Fabrice Nicolino s'est penché sur les très controversés fongicides SDHI. L'auteur de « Nous voulons des coquelicots », qui avait initié le mouvement anti-pesticides des coquelicots, réclame avec sa faconde un moratoire immédiat sur ces fongicides.

Pourquoi ? Côté pile, les SDHI s'attaquent à la succinate déshydrogénasse, enzyme qui participe à la chaîne respiratoire des champignons, et permettent ainsi de détruire ces nuisibles qui attaquent les récoltes. Mais côté face, selon plusieurs chercheurs, ils peuvent de la même manière bloquer le système respiratoire des animaux et des êtres humains.

Dans votre ouvrage, vous semblez accuser l'Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail) d'avoir délibérément négligé l'alerte de grands chercheurs ?

Fabrice Nicolino : Bien sûr. L'Anses est l'organisme qui donne les autorisations de mise sur le marché pour les pesticides et qui doit ensuite en être le juge. De qui se moque-t-on? Cette agence a démontré que, même secoué par d'éminents scientifiques, elle ne peut pas fournir une expertise indépendante. Après la première alerte de Pierre Rustin (NDLR : ce chercheur à l'Inserm a publié une tribune appelant à « suspendre l'utilisation tant qu'une estimation des dangers et des risques n'aura pas été réalisée par des organismes publics indépendants » ), qui aurait dû stopper la diffusion le temps d'avoir des études indépendantes, l'agence a fait le mort près de neuf mois.

Le problème n'est-il pas simplement celui des tests réglementaires moins performants que la recherche fondamentale ?

Non. Les autorités sont désormais trop liées aux industries. Chaque année, elles publient des notes pour vanter ce type de fongicides et dire comment épandre ces produits potentiellement toxiques. Est-ce le rôle de l'Anses qui vit de l'argent public et promet de protéger la société? Poser la question, c'est y répondre. Le problème est que cette famille de fongicide est un nouvel Eldorado. On estime que son chiffre d'affaires mondial de 2 milliards d'euros va encore augmenter.

Que réclamez-vous ?

Moi, je me contente de répéter la demande légitime de scientifiques reconnus. Ils estiment que les SDHI représentent un danger colossal, qu'il faut stopper l'utilisation immédiatement. De mon point de vue, rien ne changera sans une mobilisation massive de la société. Il faut cesser cette folie avant que les SDHI ne deviennent le nouveau scandale sanitaire, comme la chlordécone dans les Antilles (un insecticide cancérigène utilisé dans les bananeraies) ou le DDT (interdit depuis trente ans mais dont on trouve encore des traces).

--------------------

5 ou 10 mètres des habitations ? Vous vous        foutez de nous !
Les SDHI, ces pesticides qui alarment les scientifiques

Le gouvernement organise depuis le lundi 9 septembre une consultation publique sur les conditions d’épandage des pesticides, à laquelle chacun est invité à donner son avis. Cette consultation publique est une farce, car le résultat en est d’ores et déjà annoncé: à partir de 2020, il faudra respecter une distance de 5 à 10 mètres entre les traitements chimiques et les habitations.

Ni 5 mètres, ni 10 mètres

Une telle décision est une insulte à la science et à notre santé, car les pesticides ne respectent pas les décrets. Ils voyagent sur des kilomètres, rejoignent les cours d’eau, montent dans l’air et les nuages, atteignent facilement le cœur des villes et jusqu’aux foetus. Ils saturent l’air et polluent les pluies. Le lobby des pesticides vient de montrer une nouvelle fois sa puissance. La seule solution scientifiquement fondée, comme le réclame le mouvement des Coquelicots depuis un an: la fin de tous les pesticides de synthèse.

Le gouvernement regarde ailleurs

Des maladies en pagaille. Une nature qui disparait silencieusement. Un monde agricole au désespoir. Une autonomie alimentaire qui n’est plus qu’un rêve… Si près de neuf Français sur dix sont pour la fin des pesticides en cinq ans, c’est qu’ils ont compris que ces poisons sont une impasse mortelle. Pour tous. Mais il n’y a pire sourd que celui qui a intérêt à ne pas entendre et l’incroyable scandale des pesticides montre le gouffre qui s’agrandit chaque jour entre dirigeants et dirigés. La démocratie, ce n’est pas cela. Un élu de la République n’est pas au service des intérêts privés. Il doit d’abord et avant tout protéger la population dont il a la charge. Et il ne le fait pas. C’est très grave.

A quoi joue l’ANSES?

Pour préparer son décret-scélérat, le gouvernement et son ministère de l’Agriculture s’appuient sur des recommandations de l’ANSES, notre agence publique sanitaire. Entre 5 et 10 mètres, donc. Mais nous n’avons plus aucune confiance en elle. L’affaire des SDHI https://www.youtube.com/watch?v=dDjHyukzu-k&t=22s – une nouvelle classe de fongicides toxiques pour la santé – montre qu’elle a partie liée avec l’industrie des pesticides (1). Car malgré des alertes lancées par des scientifiques indépendants, elle laisse ce redoutable poison être épandu dans toute la France. Cette agence, celle-là même qui donne les autorisations de mise sur le marché (AMM) de ces poisons peut-elle sérieusement nous protéger contre ses propres décisions? Cela ne peut plus durer. Cette consultation publique est une honte pour notre République.

Plus que jamais, l’Appel des coquelicots, qui exige la fin de tous les pesticides de synthèse, est la seule issue!

(1) Un livre paru ce 12 septembre 2019 raconte cette affaire: «Le crime est presque parfait, l’enquête-choc sur les pesticides et les SDHI» (LLL), par Fabrice Nicolino, fondateur de Nous voulons des coquelicots.

Partager cet article
Repost0
4 septembre 2019 3 04 /09 /septembre /2019 16:09

Elisabeth Borne et Agnès Buzyn ont lancé mardi 3 septembre la deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens. Simultanément, l’Agence nationale de santé publique a mesuré pour la première fois la présence de ces polluants dits « du quotidien » dans l’organisme d’un large échantillon représentatif de la population française, et publie une étude alarmante sur l'imprégnation du public aux polluants. D’après Stéphane Mandard et Santé Publique France le 4 septembre 2019. Lire aussi Le bisphénol S, substitut du bisphénol A, est un perturbateur endocrinien aussi dangereux et Le rapport-choc de l’IGAS sur les perturbateurs endocriniens interrogent l’inaction des pouvoirs publics.

Des chercheurs analysent la présence de bisphénol A dans la nourriture, à Saint-Martin-du-Touch près de Toulouse, le 4 avril 2015. (REMY GABALDA / AFP)

Des chercheurs analysent la présence de bisphénol A dans la nourriture, à Saint-Martin-du-Touch près de Toulouse, le 4 avril 2015. (REMY GABALDA / AFP)

Bisphénols, phtalates, parabens, éthers de glycol, retardateurs de flamme bromés, composés perfluorés (PFC)… Pour la première fois, Santé publique France a mesuré la présence de ces polluants dits « du quotidien » dans l’organisme des enfants et des adultes, auprès d’un large échantillon (1 104 enfants et 2 503 adultes) représentatif de la population française.

Les résultats sont aussi édifiants qu’alarmants : ces substances omniprésentes dans les objets de la vie courante et qui sont souvent des perturbateurs endocriniens ou des cancérigènes, avérés ou suspectés, sont « présents dans l’organisme de tous les Français » et « des niveaux d’imprégnation plus élevés sont retrouvés chez les enfants ».

Cette étude inédite a été publiée mardi 3 septembre. Elle doit servir de référence à la nouvelle stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (PE), présentée le même jour par la ministre de la santé, Agnès Buzyn, par son homologue à la transition écologique, Elisabeth Borne, et par le secrétaire d’Etat chargé de la protection de l’enfance, Adrien Taquet. Les PE sont capables d’interférer avec le système hormonal et sont impliqués dans une variété de troubles et de pathologies : obésité, baisse du quotient intellectuel, cancers du système reproducteur, etc.

Etablir des valeurs de référence d’imprégnation

L’étude de Santé publique France devrait notamment permettre d’établir enfin des valeurs de référence d’imprégnation dans la population, qui existent parfois à l’étranger pour certains polluants, mais font toujours défaut en France.

Cette première grande étude de biosurveillance sera par ailleurs suivie de deux autres volets, sur les métaux et les pesticides. Pour ce premier volet, près de soixante-dix biomarqueurs ont été analysés. A quelques exceptions près, les niveaux d’imprégnation relevés sont comparables à ceux d’autres études menées à l’étranger, notamment aux Etats-Unis et au Canada.

Plusieurs hypothèses pourraient expliquer les niveaux plus élevés chez les enfants. Des contacts cutanés et de type « main-bouche », plus fréquents avec les objets du quotidien comme les jouets ou les peintures, vecteurs de bisphénols ou d’éthers de glycol (solvants) notamment. Des expositions plus importantes, par exemple, aux poussières domestiques pouvant contenir ces substances. Ou un poids relativement plus faible par rapport à leurs apports alimentaires, également contaminés par ces polluants. L’imprégnation par les bisphénols S, utilisés depuis plusieurs années comme alternatives au bisphénol A, augmente ainsi avec la consommation d’aliments préemballés dans du plastique.

Effets toxiques sur la reproduction

Mais, souligne l’étude, l’alimentation n’est pas la source d’exposition exclusive à ces substances. L’utilisation de produits cosmétiques et de soins, notamment, augmente les niveaux d’imprégnation des parabens et des éthers de glycol. Pour certains des composés de ces solvants, Santé publique France relève que les concentrations retrouvées chez les Français dépassent les « valeurs seuils sanitaires » établies à l’étranger.

Or, rappelle l’organisme, les éthers de glycol sont suspectés d’entraîner des effets toxiques sur la reproduction et le développement chez l’homme : diminution de la fertilité masculine, augmentation du risque d’avortement spontané ou encore de malformation fœtale.

La fréquence de l’aération du logement a également une influence sur les niveaux d’imprégnation pour les retardateurs de flamme bromés et les PFC, avertit Santé publique France. Logiquement, plus l’air des logements est renouvelé, moins l’imprégnation est forte.

L’organisme préconise enfin de répéter ce type d’étude, afin de suivre à la fois les évolutions des expositions des Français dans le temps et d’évaluer l’impact des politiques publiques visant à les réduire, à commencer par la nouvelle stratégie nationale sur les PE pour la période 2019-2022. Dévoilée mardi, elle ne comporte pas de mesures radicales.

« Un plan d’urgence pour protéger les populations »

L’Agence nationale de sécurité sanitaire devra établir une liste de perturbateurs endocriniens, en expertisant au moins six substances en 2020, puis neuf par an à partir de 2021. Un site Internet devrait être lancé avant la fin de l’année pour permettre au grand public de s’informer sur la présence éventuelle de PE dans les objets de la vie courante. Un autre site (Agir pour bébé) a été mis en ligne, mardi, pour donner des conseils pratiques aux jeunes parents, afin de limiter l’exposition aux produits chimiques, dont les perturbateurs endocriniens, pendant la grossesse et après la naissance.

« Un site Internet pour informer le grand public ? A l’évidence, ça ne suffit pas ! », réagit Gérard Bapt, l’ancien député socialiste et médecin à l’origine de l’interdiction du bisphénol A dans les contenants alimentaires, en 2012. Il manque des mesures concrètes et contraignantes pour en finir avec les revêtements dangereux des poêles ou les sols en PVC dans les habitations privées. » M. Bapt s’offusque également qu’à l’issue de son étude Santé publique France « ose conclure qu’on ne peut pas prédire un risque sanitaire, alors qu’il est maintenant avéré pour les perturbateurs endocriniens ».

Insuffisant aussi pour l’association Générations futures, qui a participé aux différents groupes de travail mis en place par le gouvernement pour élaborer sa nouvelle feuille de route sur les PE. Elle réclame « un plan d’urgence pour protéger les populations de ces polluants dangereux ». Pour son directeur, François Veillerette, « les ambitions de la nouvelle stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens doivent être revues à la hausse pour faire de la disparition rapide des substances pointées par Santé publique France de notre environnement une priorité de santé publique absolue ».

Le Réseau Environnement Santé (RES) demande, lui, un financement équivalent à celui du plan cancer (1,5 milliard d’euros sur cinq ans). Le RES a lancé en 2017 la charte des villes et territoires sans perturbateurs endocriniens. Deux cents communes, trois régions (Ile-de-France, Occitanie, Nouvelle-Aquitaine) et trois départements (Tarn, Haute-Garonne, Bouches-du-Rhône) l’ont déjà signée.

Partager cet article
Repost0
24 juillet 2019 3 24 /07 /juillet /2019 09:08

A Paris et en Île-de-France, l'eau du robinet est radioactive. Presque deux millions de personnes alimentées par l’usine d’eau potable de Choisy-le-Roi consomment une eau polluée par un élément radioactif, le tritium. Plus de 6 millions de personnes en France boivent de l’eau légèrement contaminée au tritium, un élément radioactif. L'Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (ACRO) a révélé cette contamination dans sa publication du 17 juillet 2019. La concentration moyenne de tritium dans cette eau du robinet atteint les 10 Bq/L (becquerel par litre). D’après l’ACRO, Reporterre et Candice Vacle pour son blog sur Mediapart du 17 au 20 juillet 2019. Lire aussi Ils disent non au lave-linge du nucléaireCes déchets nucléaires près de chez vous et La face cachée des expérimentations atomiques en France.

Pollution radioactive de l'eau du robinet le long de la Seine, de la Loire, à Paris, en Île-de-France...

Ce n'est pas un cas isolé car, en France, 6,4 millions de personnes sont concernées par la présence de pollution au tritium dans l’eau du robinet.

Qu’est-ce que le tritium ?

C’est un atome d’hydrogène radioactif et sa demi-vie est de 12,32 ans. Ce qui veut dire qu’après 12,32 ans, il en reste encore la moitié et ainsi de suite.

D'une manière générale, est-ce dangereux pour la santé de boire une eau contenant du tritium ?

Le tritium a une radiotoxicité faible. Il émet des rayons radioactifs bêta sur une faible distance. Sa demi-vie de 12,32 ans, lui laisse largement le temps d’aller s’infiltrer là où il se trouve.

Aucune étude ne permet de savoir s’il peut causer le cancer chez l’homme. Le danger du tritium provenant de l’industrie du nucléaire est si important que les sénateurs de notre Sénat (chambre haute du Parlement français ) ont rédigé un texte sur le sujet. Le site du Sénat écrit concernant les dangers de la contamination interne par le tritium que le résultat des expériences sur le tritium « nous imposent d'appliquer strictement le principe de précaution et de tout mettre en œuvre pour réduire au maximum l'exposition au tritium des travailleurs et des populations ». «  Les rejets de tritium dans l'environnement risquent de devenir dans les années à venir un problème majeur et certainement un des principaux axes de la contestation antinucléaire. » Toutefois, « certaines études ont ... montré de façon très nette que, chez des animaux, l'exposition ou l'injection de tritium entraînait une importante augmentation des cancers. » Site du Sénat - Les dangers de la contamination interne par le tritium. Ce que l'on sait scientifiquement c’est qu'il s’incorpore facilement à l’eau. Et sachant que 65% de notre corps est fait d'eau, il peut facilement s'y intégrer et passer dans le sang.

« Le tritium peut poser un risque pour la santé s’il est ingéré par la consommation d’eau ou de nourriture, ou s’il est inhalé ou absorbé par la peau. » « L'eau tritiée (contenant du tritium) a été estimée être la première source de risque d' exposition humaine au tritium » (Rejets de tritium et conséquences sur les doses au Canada en 2006 Wikipédia - Tritium dans l'environnement).

Dans le Livre Blanc du Tritium de l’ASN, il est reconnu que les risques du tritium sont sous-évalués. En effet, un rapport d’experts a montré que le tritium peut s’intégrer à l’ADN. Alors, les rayons ionisants (rayons radioactifs) du tritium risquent d'endommager l’ADN (Livre Blanc du Tritium Le tritium Le tritium et l’environnement Les effets des rayonnements sur la santé  p.268).

Est-ce dangereux pour la santé de boire l'eau de Paris et d'Île-de-France ayant une concentration moyenne de tritium de 10 Bq/L ?

Déjà, l'idée de boire une eau radioactive est fortement déplaisante. D'autant plus, lorsqu'on sait qu'il s'agit d'une radioactivité artificielle provenant des rejets radioactifs liquides dans la Seine de la Centrale Nucléaire de Nogent située à environ 100 km en amont de Paris. Et oui, aussi aberrant que se soit, une centrale nucléaire a été construite en amont de Paris alors que l’on savait qu’elle rejetterait de la pollution radioactive dans l’eau venant alimenter les réservoirs d'eau potable de Paris !

La Préfecture d’Île-de-France se veut rassurante et dit qu'à Paris « l’eau du robinet peut être consommée ». Ceci est de la pure désinformation car l'ACRO est un organisme agréé avec qui Greenpeace a pour habitude de travailler. L'ACRO s'est basé sur les données fournies par le Ministère de la Santé pour faire cette étude.
Selon Eau de Paris, entreprise publique qui gère l'eau potable à Paris, la pollution au tritium ne représente aucun risque car les mesures sont en dessous de la référence de qualité française.

A partir de quelle quantité est-il dangereux de boire de l’eau contenant du tritium ?

Pour le tritium, la référence de qualité de la réglementation française est de 100 Bequerelles par litre (transposition d’une directive de l’Union Européenne). Sachant que la radioactivité naturelle des eaux de surface se situe entre 0,1 et 0,9 Bq/L (UNSCEAR), et que dans les nappes phréatiques anciennes, (qui n'ont pas été touchées par les retombées en tritium des essais nucléaires) les niveaux de tritium sont de l'ordre de 0,1 Bq/L, cette référence de qualité correspond, donc, à plus de 100 fois la radioactivité naturelle (Doc Criirad Tritium contamination p.2, et Fiche IRSN - Tritium et environnement p.5.). Cette référence peut être dépassée, en toute impunité - rien de contraignant pour la faire respecter.

Pour l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la valeur de référence est de 10 000 Bq/L. Soit 100 fois plus que la référence européenne et française. Les variations de ces valeurs de références interrogent sur leur crédibilité.

La CRIIRAD conteste ce chiffre de l’OMS car il est le résultat d’un calcul et non pas d’une expérience scientifique. Qui plus est ce chiffre de 10 000 Bq/L a été arrondi, par l’OMS, largement au dessus du résultat du calcul initial qui était de 7 800 Bq/L. Pourquoi ? L’OMS est liée à l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA) qui est pro nucléaire. Le Dr. Michel Fernex ancien médecin de l’OMS dénonce ce qu'il appelle les « liens malsains » entre l’OMS et l'AIEA comme l’accord référencé «WHA12-40», l’exigence de confidentialité dans certains domaines ou le fait que l’OMS répète les chiffres de l’AIEA. L’OMS ne fait pas ses propres mesures de la radioactivité.

Il y a une seconde hypothèse, selon la CRIIRAD, c’est qu'il est difficile de garder le tritium dans un contenant. Comme il est difficilement confinable, il est difficile (voir impossible) pour l'industrie nucléaire de ne pas le laisser s'échapper dans l’eau ou dans l’air car il traverse le béton et le métal (Sortir du nucléaire - Contaminations au tritium).

Alors, comme l’OMS est liée à l'AIEA et que le tritium est difficilement confinable, l’OMS a peut être préféré choisir la référence douteuse et surévaluée de 10 000 Bq/L.
En bref, même s’il existe des valeurs de références institutionnelles concernant le tritium, il n’y a pas d’études scientifiques permettant de dire la dangerosité de doses précises de tritium dans l’eau pour l’être humain. Sans compter, qu'il n'y a aucune normes pour les enfants ou les femmes enceintes alors qu'ils sont plus sensibles à la radioactivité que le reste de la population.
En somme, les valeurs de références institutionnelles du tritium ne nous protègent pas et correspondent à un risque que l’Etat accepte de nous faire prendre pour pouvoir avoir une industrie nucléaire. Ceci sans que notre avis ait été consulté.

Est-ce que cette quantité de tritium de 10 Bq/L dans l’eau de Paris et d’Île-de-France est dangereuse pour la santé, selon des spécialistes de la santé et du nucléaire ?
Selon la Docteur Françoise Boman, « aucune dose de radioactivité, si faible soit-elle, n'est anodine pour le corps humain. Or, le tritium n'a rien à faire dans l'eau et ne devrait pas y être. Pour ma part, je veux zéro radioélément artificiel dans l'eau que je bois. »

Roland Desbordes, de la CRIIRAD, pour répondre, utilise le sievert qui est l'unité permettant d’évaluer l'impact des rayonnements de la radioactivité sur l'homme. « Il explique que si une personne boit presque 2 litres d’eau de Paris à 10 Bq/L par jour soit environ 7OO litres par an, ça ferait 0,12 μSv/ an (microsievert par an) soit 0,000 12 mSv (millisievert par an).

Il ajoute: « La Commission internationale de protection radiologique (CIPR) et les directives Euratom, reprises dans le droit français (Code de la Santé Publique), estiment qu’à partir de 0,01 mSv le risque existe. »  (mail Roland Desbordes 20/07/2019) Ce risque est jugé acceptable par les experts scientifiques à partir de 0,01 mSv/an. Et, à partir de 0,1 mSv/an et pour l’eau du robinet seule, le risque est considéré comme inacceptable par ces mêmes experts, selon la directive euratom 96/29 et 2013/59. (mail Roland Desbordes 22 juillet 2019).

Donc, dans la logique de la réglementation française. C'est cohérent.  Site du Ministère de la Transition écologique et solidaire - La radioprotection  »

L'ennui, c’est que cette dose de 0,01 mSv correspond à un niveau de risque jugé acceptable. Donc, le risque réel pour la santé n’est pas totalement écarté. De plus, la CRIIRAD sait, avec certitude, que cette norme de 1 millisievert par an est basée sur un risque sanitaire (nombre de malades et morts) sous-évalué, mais les scientifiques ne savent pas encore de combien. « 1 mSv infligé à 100 000 personnes va causer 5 morts par cancer (dont 17 cancers et 12 guérissables à court terme) et environ 3 anomalies génétiques graves. Ce n'est pas rien ! Cela ressort des études validées sur Hiroshima et Nagazaki.» (mail R. Desbordes, 7 avril 2018).

Sans compter que 10 Bq/L de tritium pour l'eau provenant de l'usine de Choisy-le-Roi est une moyenne. Les mesures en tritium provenant de cette usine peuvent être bien plus élevées. Selon David Boilley de l'ACRO, « Pour l'eau de l'usine de Choisy-le-Roi :
- En 2016, 20 mesures ont été réalisées avec une valeur moyenne de 5,75 Bq/L.
- En 2017, 20 mesures ont été réalisées avec une valeur moyenne de 14,25 Bq/L.
» En bref, une fois encore, on constate que les valeurs ou dose de références institutionnelles concernant la radioactivité ne nous protègent pas.
 
Est-ce que l’exposition à une radioactivité de faible dose sur un temps prolongé est sans risques, selon les scientifiques ?

Ernest Sternglass, physicien, a joué un rôle pionnier, comme scientifique et lanceur d’alerte, dans l’étude des conséquences sanitaires des faibles doses de radioactivité. De même, Alice Stewart, en 1955, épidémiologiste pionnière, a démontré pour la première fois que la radiographie des femmes enceintes provoque des leucémies infantiles. John Gofman, chimiste nucléaire, médecin et professeur de biologie cellulaire et moléculaire, a, lui aussi, joué un rôle central dans des travaux ayant conduit la communauté scientifique à prendre en compte les risques de cancer dus aux faibles doses de radiation.

Plus récemment, le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a publié sur le site internet de la revue scientifique The Lancet Haematology, une étude validant, entre autre, le fait qu'il n’y a pas de dose radioactive sans risque.
De même, à la fin de la vidéo de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire
IRSN, il est écrit: « Toute dose présente un risque ». La Docteur F. Boman écrit: « La contamination interne par ingestion d’eau...contaminés par des radionucléides est nocive pour la santé et pour la vie, même à très faibles doses. Les contrôles de la radioactivité ou "qualité radiologique" de l’eau de boisson en France sont insuffisants. »

En somme, il serait une erreur de considérer l’exposition à une faible dose de radioactivité sur un temps prolongé, comme anodine. Donc, boire 2 litres de l’eau de Paris et d’Île-de-France contenant du 10 Bq/L tritium tous les jours sur une longue période, ce n’est pas rien. Tous les risques et dangers que ça comportent ne sont pas connus.

Candice Vacle remercie Roland Desbordes, de la CRIIRAD, pour les informations données et sa relecture. 

Une carte de France de l’eau contaminée par du tritium radioactif

Une carte de France de l’eau contaminée par du tritium radioactif

Mercredi 17 juillet, l’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (Acro) a publié une carte de la contamination radioactive de l’eau potable en France métropolitaine. Les données lui ont été fournies par le ministère de la Santé et représentent la valeur moyenne de tritium, l’hydrogène radioactif rejeté par les installations nucléaires, présent dans l’eau potable sur les années 2016-2017.

Plus de 268 communes sont concernées par la présence de tritium dans l’eau potable en France métropolitaine, soit 6,4 millions de personnes, mais aucune valeur relevée ne dépasse le critère de qualité fixé à 100 Bq/L par les autorités sanitaires. Cependant, comme l’a noté le réseau Sortir du nucléaire suite à la parution de la carte, la Criirad — une commission de recherche indépendante sur la radioactivité — estime que le taux de tritium relevé dans l’eau potable ne devrait en aucun cas dépasser 10 Bq/L, seuil déjà franchi par des communes comme Tours, Nantes ou Corbeil-Essonnes. Et au Canada, l’Ontario Drinking Water Advisory Council demande à ce que le niveau de tritium dans l’eau potable municipale des collectivités ne dépasse pas 20 Bq/L.

Le tritium est composé d’hydrogène radioactif issu de la réaction nucléaire. « Extrêmement mobile dans l’environnement, il s’associe à l’oxygène pour former de l’eau tritiée, qui pénètre facilement dans les matières organiques et peut endommager l’ADN des cellules », a détaillé le réseau Sortir du nucléaire dans un communiqué.

La carte fait apparaître plusieurs zones avec une présence régulière de tritium dans l’eau du robinet :

  • Le long de la Seine, de la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine à l’Île-de-France ;

  • Le long de la Vienne et de la Loire à cause des rejets radioactifs des installations nucléaires d’EDF (Belleville, Dampierre, St-Laurent, Chinon et Civaux) ;

  • Autour du centre du CEA de Valduc, non loin de Dijon, où le tritium est produit pour l’armement nucléaire ;

  • Autour du centre CEA de Saclay, dans les Yvelines, « où il doit s’agir d’une pollution rémanente », selon l’Acro.

Pour le réseau Sortir du nucléaire, « cette pollution quotidienne doit d’autant plus alerter qu’elle concerne une eau prélevée dans des rivières et fleuves, où la contamination est diluée. En outre, la manière dont les mesures ont été effectuées peut laisser soupçonner l’existence de valeurs encore plus élevées. En effet, certaines petites communes situées en aval d’une installation nucléaire n’apparaissent pas sur la carte, n’effectuant de prélèvement que tous les cinq ans. »

L’Acro demande ainsi que la pollution radioactive soit mieux prise en compte et prévenue par les autorités, et que des contrôles plus fréquents soient effectués pour l’eau potable des petites communes. Par ailleurs, l’Acro demande que les rejets radioactifs soient soumis au principe pollueur-payeur et entrent dans le périmètre des Agences de l’eau, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Partager cet article
Repost0
23 juillet 2019 2 23 /07 /juillet /2019 10:24

« Les preuves d’effets néfastes sur la santé liés à l’exposition aux émissions issues du trafic routier sont fortes », alerte l’Agence nationale de sécurité sanitaire.  « Notre système de surveillance de la qualité de l’air est obsolète parce qu'il ne mesure que les grosses particules », alerte l'association Respire. D’après l’ANSES, Stéphane Mandard pour Le Monde et France Infos le 16 juillet. Lire aussi Un communiqué reconnaît une « faute » de l’Etat pour « insuffisance » dans la lutte contre la pollution de l’air – pas le jugement !Des ONG attaquent la France en justice pour inaction climatique et Des citoyens attaquent en justice l’Europe pour son échec à les protéger contre le réchauffement climatique.

Des agents de police pratiquent des contrôles antipollution à Paris. GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

Des agents de police pratiquent des contrôles antipollution à Paris. GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

Les transporteurs routiers menacent de bloquer le pays à la rentrée pour protester contre la décision du gouvernement de rogner de deux centimes le remboursement de leurs frais de consommation de diesel. Des automobilistes franciliens râlent de devoir laisser leurs vieilles voitures au garage pour se conformer à l’interdiction des véhicules Crit’Air 5 dans le périmètre de la métropole parisienne (et Crit’Air 4 dans Paris), en vigueur depuis le 1er juillet. Pour répondre à ces récalcitrants, les pouvoirs publics vont pouvoir brandir une nouvelle étude accablante sur les effets de la pollution d’origine automobile.

Dans un avis, rendu mardi 16 juillet, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) conclut que « les preuves d’effets néfastes sur la santé liés à l’exposition aux émissions issues du trafic routier sont fortes ». Le rapport recommande non seulement la promotion de technologies alternatives au moteur thermique capables de « réduire drastiquement l’émission de polluants » comme l’électrique, « mais aussi et surtout la réduction du trafic ».

Les particules ultrafines à cibler en priorité

L’Anses avait été saisie, en juin 2014, par trois directions générales (santé, énergie et climat, prévention des risques), afin d’évaluer d’une part les effets sanitaires des particules de l’air et d’autre part de déterminer l’impact sur la pollution atmosphérique du parc de véhicules automobiles circulant en France.

L’Anses a passé en revue la littérature épidémiologique et toxicologique produite depuis la parution, en 2013, du premier rapport de référence de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur la pollution de l’air. Un corpus de 160 études portant sur 20 composés, 16 sources et 83 modifications physiologiques ou effets sur la santé sur lequel s’est appuyée l’agence pour classer les preuves selon cinq niveaux allant d’« absence d’effet » à « fort ».

Les niveaux de preuve les plus élevés concernent trois types de particules aujourd’hui non réglementées, alerte l’Anses : les particules ultrafines (de diamètre inférieur à 100 nanomètres), le carbone suie et le carbone organique. L’Anses recommande aux autorités de les « cibler en priorité » dans les politiques publiques de lutte contre la pollution, en complément des particules qui font déjà l’objet d’une surveillance : les PM2,5 (inférieurs à 2,5 micromètres [µm]) et les PM10 (inférieurs à 10 µm).

"Notre système de surveillance de la qualité de l’air est obsolète parce qu'il ne mesure que les grosses particules", alertait mardi 16 juillet sur France infos Olivier Blond, président de l’association Respire. Selon les informations du Monde, Airparif, l’organisme de surveillance de la qualité de l’air en Ile-de-France sera en mesure de contrôler les particules ultrafines à partir de septembre. De nouveaux capteurs, capables de détecter des particules inférieures à 10 nanomètres, seront en particulier installés près de voies à forte circulation. Un premier pas.

Aussi appelées « nanoparticules », elles sont particulièrement dangereuses en raison de leur petite taille. A la différence des PM10, qui restent bloquées au niveau des voies respiratoires supérieures (nez et pharynx) et des PM2,5 (alvéoles pulmonaires), elles pénètrent dans le sang et peuvent atteindre le cerveau ou traverser le placenta des femmes enceintes.

Parmi les effets délétères les mieux documentés recensés dans le rapport d’expertise : les pathologies respiratoires (de l’asthme au cancer du poumon), les maladies cardio-vasculaires (infarctus du myocarde ou accident vasculaire cérébral) et les décès anticipés. Selon les estimations, le nombre de morts prématurées, attribué à la pollution de l’air en France, oscille entre 48 000 et 60 000 par an. Les preuves existent, mais sont jugées plus faibles – en raison du corpus d’étude limité – sur la santé neurologique (altération du développement cognitif de l’enfant) ou périnatale (faible poids de naissance).

Évolutions technologiques

Des effets similaires ont été mis en évidence pour le carbone suie et le carbone organique. Le carbone suie est une composante des particules, constituée uniquement de carbone – qui lui donne sa couleur noire –, issue du phénomène de combustion incomplète d’énergies fossiles (carburant des voitures, pétrole dans l’industrie) ou de bois (chauffage). Le carbone organique est un carbone suie auquel est ajoutée une molécule organique qui peut être un hydrocarbure (comme les très toxiques HAP –hydrocarbures aromatiques polycycliques – des fumées de cigarette ou de diesel) ou des impuretés métalliques issues de l’essence ou de l’abrasion des plaquettes de frein.

Les évolutions technologiques (généralisation du filtre à particules, recul des motorisations diesel) devraient permettre « des diminutions plus ou moins marquées » de la pollution, mais « insuffisantes » pour améliorer la qualité de l’air dans les agglomérations, note l’Anses, qui a étudié plusieurs scénarios. A l’horizon 2025, les valeurs limites de l’OMS pour l’exposition aux PM2,5 (10 µg/m3 en moyenne annuelle) seront ainsi toujours dépassées sur la quasi-totalité du territoire.

Principale explication, relève Guillaume Boulanger, l’un des auteurs du rapport, le « faible taux de renouvellement du parc automobile français toujours constitué de vieux diesel ». Spécialiste de la pollution, le radiologue Thomas Bourdel relève, lui, l’« effet paradoxal » des filtres à particules de nouveaux modèles diesel : ils tendent à augmenter la formation de nanoparticules en fragmentant les particules en sortie de pot d’échappement. Outre les polluants issus des gaz d’échappement, l’Anses recommande de s’attaquer également aux autres sources (abrasion des systèmes de freinage et des pneus) qui concernent également les véhicules électriques.

Seul un « scénario ambitieux » permettrait d’améliorer sensiblement la situation (en réduisant les émissions de carbone suie et de PM2,5 d’au moins 30 %) d’ici à 2025. Réalisé à partir des données de l’Île-de-France, il combine une hausse importante des ventes de véhicules électriques (40 %) à une réduction tout aussi drastique (20 % à 25 %) du trafic à l’échelle des grandes agglomérations. « La réduction du trafic peut être encouragée par le renforcement des transports en commun, de l’intermodalité et de modes actifs de transport comme la marche à pied ou le vélo », insiste l’Anses.

En marge de cette analyse centrée sur la pollution automobile, l’agence souligne la nécessité d’accumuler davantage de données sur les effets sur la santé associés à l’exposition à d’autres sources de particules moins étudiées : agriculture, activités aéroportuaires ou transport maritime.

Partager cet article
Repost0
12 juillet 2019 5 12 /07 /juillet /2019 09:23

Face au retard accumulé par la France et avant d’accueillir la Convention citoyenne pour la transition écologique, le Conseil économique, social et environnemental a adopté ce 10 juillet lors de sa conférence annuelle un nouveau projet d’avis intitulé « Climat, énergie, biodiversité : contribution du CESE à la Convention citoyenne pour la transition écologique ». La présentation d’une nouvelle trajectoire de la « taxe carbone » figure en bonne place dans ses recommandations. Par Dominique Pialot pour La Tribune le 11 juillet 2019. Lire aussi Premier rapport du Haut Conseil pour le climat : la France parle beaucoup mais agit peu et Le projet de loi Énergie-Climat ne répond pas à l'urgence climatique.

(Crédits : Wikipédia.org)

(Crédits : Wikipédia.org)

Le constat est connu. Qu'il s'agisse d'émissions de gaz à effet de serre, d'économies d'énergie ou de baisse de consommation des énergies fossiles, la France est en retard sur ses objectifs. Et le tableau n'est pas plus favorable sur le front de la biodiversité. Sur fond d'une prise de conscience accrue de l'urgence sur ces sujets et de l'inadéquation de certaines pistes suivies, qui se manifeste notamment par la mobilisation citoyenne mais aussi le mouvement des « gilets jaunes », ces retards deviennent de plus en plus visibles.
Lors de son discours de politique générale le 12 juin dernier, le Premier ministre a assuré vouloir faire « des douze prochains mois ceux de l'accélération écologique » et souhaiter « que les Français en soient les premiers acteurs ».

Une démarche inédite pour le CESE

A l'occasion de sa conférence annuelle, le CESE a repris la balle au bond. La section de l'environnement, présidée par Anne-Marie Ducroux (Groupe environnement et nature) pour la section de l'environnement, a préparé à partir des contributions des douze(*) formations de travail un nouveau projet d'avis rapporté par Marc Blanc (Groupe CFDT), portant sur les défis climatiques, énergétiques et de biodiversité soulignant leurs interactions économiques et sociales.
Le CESE adopte cette démarche inédite pour alerter les pouvoirs publics sur la nécessité de mieux prendre en compte ses préconisations, qui  soulignent la nécessité d'un changement de modèle et le besoin d'une approche écosystémique et concertée. Ce projet d'avis servira également à nourrir les travaux des 150 personnes tirées au sort pour composer la Convention citoyenne pour la transition écologique, qui sera justement accueillie par le CESE à compter de septembre.

Le bâtiment et les transports, mauvais élèves

Sur le climat, comme il l'avait déjà souligné dans des avis précédents, le CESE rappelle que la France est d'ores et déjà en retard sur ses engagements, puisque ses émissions de gaz à effet de serre (GES) ont augmenté en 2015, 2016 et 2017. Le bâtiment, avec un dépassement de 22 % en 2017 par rapport au budget carbone prévu dans la SNBC 2015 et des conditions météorologiques plutôt favorables et celui des transports (30 % des émissions de GES nationales en 2015 contre 22 % en 1990, à 8 % au-dessus des performances visées) sont les mauvais élèves.
En outre, en tenant compte des émissions liées à la production des biens importés, déduction faite de celles des biens exportés, l'empreinte carbone française a augmenté chaque année entre 2014 et 2017, une hausse notamment imputable à une timide reprise économique et à un pétrole peu cher.
Sur l'énergie, l'absence de vision concertée quant au poids respectif de l'électricité et du gaz qui nuit à la planification des infrastructures, existantes ou à développer, de distribution et de stockage 34 de gaz et d'électricité et de leur équilibre économique.
Le CESE insiste à nouveau, comme dans son avis de 2016, sur la nécessité de prendre en compte les inégalités entre territoires, acteurs ou citoyens dans un esprit de justice climatique.

Retard sur la biodiversité aussi
Même écart entre les constats relatifs à la dégradation de la biodiversité aux multiples causes (surexploitation des ressources, artificialisation des sols, destruction des habitats, extension de l'agriculture, pêche et agriculture intensives, pollutions, changement climatique, etc) et les politiques mises en œuvre depuis les premiers états de lieux dressés dans les années 1960 et 1970, malgré son rôle essentiel dans la de régulation du climat, la qualité de l'air, la purification de l'eau, l'alimentation, les paysages, etc...
Pourtant un cadre réglementaire existe avec l'adoption, en août 2016, de la loi « pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages » qui a notamment mis en place l'Agence Française pour la Biodiversité, puis l'Office français de la Biodiversité (OFB), puis en 2019, le projet de loi proposant de reconnaître la valeur de la biodiversité : « La République agit pour la préservation de l'environnement et de la diversité biologique et contre les changements climatiques ».

L'Europe, un échelon incontournable

A la veille d'une nouvelle mandature de l'Union européenne, le CESE insiste également sur la nécessité de penser les politiques du climat, de la transition énergétique et de la biodiversité au niveau européen, d'autant plus que l'Europe représente chacun des pays européens au sein des négociations internationales.
Il rappelle à cet égard que la Commission européenne, qui s'est prononcée le 18 juin 2019 sur les projets de plans des différents Etats membres, note que « dans leur état actuel, [ils] n'apportent pas de réponses suffisantes tant au regard des énergies renouvelables que des contributions à l'efficacité énergétique ». Concernant les émissions de GES, la Commission estime que si la réduction globale prévue par les plans « est conforme à l'objectif d'une réduction de 40 % » d'ici 2030 (par rapport à 1990), la trajectoire européenne dépendra in fine de la mise en œuvre de ces plans par chacun des Etats.

Réviser la stratégie Europe 2020

Elle demande par exemple à la France de rehausser son niveau d'ambition concernant les énergies renouvelables de 32 à 33% dans la consommation finale brute d'énergie en 2030, de revoir ses efforts de réductions de la consommation d'énergie primaire, de mieux intégrer les aspects liés à une transition juste et équitable et approfondir son approche en matière de lutte contre la précarité énergétique pour y inclure un objectif indicatif de réduction de cette précarité.
Quant aux textes européens eux-mêmes, le CESE préconise de réviser la stratégie Europe 2020 (définie en 2010) avec des objectifs compatibles avec les engagements climatiques et de développement durable, d'élaborer une politique de l'énergie cohérente avec celle du climat et d'accorder une place centrale à « l'exigence du mieux-disant environnemental et social » dans le cadre des négociations commerciales.

50 à 70 milliards nécessaires à la transition chaque année

Concernant le financement de la transition écologique, le CESE note qu'en dépit d'une hausse continue des investissements publics et privés dans l'énergie depuis 2014, cela ne permet pas de compenser l'insuffisance d'investissement annuel, dont le besoin est évalué entre 50 et 70 milliards d'euros par an. Avec 20 milliards d'euros dédiés à la transition écologique, le Grand Plan d'investissement 2018-2022 paraît sous-dimensionné par rapport aux besoins réels.
En France, la fiscalité écologique ne représente en 2017 que 4,9 % des 7 prélèvements obligatoires, contre 8,7 % aux Pays-Bas, 5 % en Belgique, 7,2 % au Royaume-Uni et 8,2 % en Italie selon Eurostat. Le plan Climat de juillet 2017 a tenté d'y remédier en inscrivant pour 5 ans dans la loi de finances une hausse accélérée de la contribution climat énergie (CCE), en prévoyant la révision du mécanisme européen de quotas de CO2 (ETS) ainsi qu'une fiscalité incitative sur les hydrofluorocarbures (HFC).

Nouvelle trajectoire de la taxe carbone

Mais la suspension face au mouvement des gilets jaunes de la hausse de la CCE, que le CESE considère comme un élément déterminant de la capacité à réaliser la Programmation Pluriannuelle de l'Energie (PPE) et de cohérence entre les ambitions et les moyens, entraîne la suppression de tout signal prix sur les énergies fossiles mais également une baisse des financements disponibles pour la transition énergétique.
C'est pourquoi le CESE exhorte le Gouvernement à présenter très rapidement une nouvelle trajectoire de la « taxe carbone », cohérente avec les objectifs de baisse des consommations à horizon 2030, à un niveau suffisamment incitatif pour avoir un effet sur les émissions et dont les recettes devront être affectées à la fois aux territoires avec une clef de répartition transparente, pour les aider à financer leurs engagements en la matière et aux mesures destinées à amortir les effets de sa hausse pour les plus vulnérables.
___
NOTE
(*) Ces douze sections comprennent l'environnement, l'agriculture, la pêche et l'alimentation, l'aménagement durable des territoires, l'économie et des finances, les activités économiques, les affaires européennes et internationales, les affaires sociales et la santé, le travail et l'emploi, la délégation Outre-mer, la délégation de la prospective et de l'évaluation des politiques publiques, et enfin, la délégation au droit des femmes et à l'égalité.

Partager cet article
Repost0

Archives

L'écologie aux Lilas et au Pré ...

Les maires et élus écologistes ne se résignent pas à laisser l’avenir s’assombrir de jour en jour

Pour une restauration scolaire de qualité, durable, équitable, accessible aux Lilas

Les zadistes de Gonesse ont-ils raison de s’opposer à une gare en plein champ ?

Une nouvelle ZAD près de chez vous

Pour le projet CARMA contre la reprise des travaux de la gare "Triangle de Gonesse"

Les Lilas écologie - en campagne pour gagner

Les Lilas Ecologie en campagne

Le gouvernement abandonne Europacity, pas l’artificialisation des terres agricoles

Il faut stopper EuropaCity - marche citoyenne de Gonesse à Matignon 4 et 5 octobre

Aux Lilas, les citoyens s’unissent pour produire de l’électricité verte

Les promoteurs, les arbres et la cité - lettre ouverte à BNP Paribas

Toxic Tour de Pantin à Romainville dimanche 16 juin 2019

Une Biorégion Ile-de-France résiliente en 2050

Merci aux 1779 Lilasiennes et Lilasiens qui ont voté " Pour le climat, tout doit changer ! "

Pollution de l’air dans les écoles et crèches franciliennes

Volonté politique de créer une régie publique de l’eau à Est Ensemble, mythe ou réalité ?

À la base … un revenu ?

Balade naturaliste Parcs de la Corniche des Forts et abords de la forêt de Romainville le 9 mars 2019 à 11h

La forêt de Romainville, un enjeu écologique et politique

La Forêt passe à l'attaque !

Plâtre et béton sur la Corniche

Agir ensemble pour les Coquelicots le 7 décembre

Marche pour le climat, Défendons la forêt de la Corniche des Forts

Destruction des océans, sur-pêche, pêche électrique... avec Bloom mardi 20 novembre

À Romainville, les habitants défendent une forêt sauvage contre une base de loisirs régionale

Marches pour le climat et la biodiversité 13 et 14 octobre

Les amis des coquelicots étaient bienvenus...

Amis des coquelicots, agissons ensemble vendredi 5 octobre à 18H30

La forêt urbaine de la Corniche des Forts - une chance unique à nos portes

Mobilisation citoyenne à la marche pour le climat samedi 8 septembre à Paris

Un coup de pouce Vert pour les Électrons solaires ! 

Le collectif Eau publique des Lilas invite au dialogue le 21 mars

Entre le nucléaire et la bougie, il y a l’intelligence - du 10 au 18 mars aux Lilas

En Ile de France, les énergies renouvelables citoyennes ont le vent en poupe...

Le Syctom a organisé une concertation réservée aux sachants – et après ?

Une enquête publique sur le PLU des Lilas… qui change la donne !

Une victoire pour l'eau publique en Île-de-France

L’eau publique, c’est maintenant !

L’Ouest de la Seine Saint-Denis se mobilise pour la création d’un service public de l’eau

Romainville : le Syctom lance une concertation préalable pour la modernisation du centre de transfert et de tri des déchets

Que sont ces CSR - Combustibles Solides de Récupération - qu’on veut brûler à Romainville ?

Ces parents qui mijotent une cantine publique

De nouvelles préconisations nutritionnelles... Pas d'usine, on cuisine !

À Romainville contre l’incinération

Une victoire de l'engagement citoyen aux cantines rebelles du 10 novembre

Derniers échos de la révision du PLU des Lilas

Les Sans Radio retrouvent les ondes

Europacity : le débat public se conclut sur des positions inconciliables

Le parc (George-Valbon La Courneuve) debout !

Grand Paris : non à la logique financière

Pour une gestion publique, démocratique et écologique de l'eau

Le revenu de base ? Débat mardi 14 juin 20h

C'était la Grande Parade Métèque 2016...

La nature : une solution au changement climatique en Île-de-France

Participer à la Grande Parade Métèque samedi 28 mai 2016

PLU des lilas: enfin un diagnostic et état initial de l'environnement ... à compléter

Avec la loi « Travail », où irait-on ? Débattons-en mercredi 30 mars

Réduire la place de la voiture des actes pas des paroles

La COP 21 aux Lilas

La nature est un champ de bataille

Alternatiba et le Ruban pour le climat des Lilas à la République

Un compost de quartier aux Lilas

Devoir d'asile : de l'Etat jusqu'aux Lilas

Un ruban pour le climat aux Lilas

Six propositions vertes pour une révision du PLU véritablement utile

La Grande Parade Métèque samedi 30 mai

Fête de la transition énergetique et citoyenne le 9 mai aux Lilas