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19 octobre 2017 4 19 /10 /octobre /2017 09:33

Avec le « Grand Paris » et les JO, l’agglomération parisienne s’apprête à connaître une vague de grands projets urbains, portés par des élus et des multinationales. D’un côté, plusieurs de ces projets répondent à des préoccupations sociales indéniables. De l’autre, ils entraîneront une nouvelle hausse de l’immobilier et contribueront à bétonner davantage la région. Qu’en est-il des prétentions de leurs promoteurs à l’excellence environnementale ? Pouvait-on faire autrement et dessiner un « Grand Paris » plus proche des habitants ? Second volet de notre enquête. Par Olivier Petitjean le 17 octobre 2017 pour Bastamag. Cet article est le second volet de cette enquête sur le Grand Paris, après Avec le « Grand Paris » et les JO, une vague de béton s’apprête à submerger l’Île-de-France. Sur ce blog, lire aussi Vertigineuse partie de Monopoly sur le triangle de Gonesse, Grand Paris : non à la logique financière et à sa création Les écologistes participent à la création de la Métropole du Grand Paris.

Climat, qualité de vie, inégalités : vers un « Grand Paris » des alternatives ?

Nouvelles lignes de métro automatique, tours, centres commerciaux, équipements sportifs : avec les Jeux olympiques et le « Grand Paris », une déferlante de projets urbains est sur le point de métamorphoser la région parisienne. Avec l’objectif, selon ses promoteurs, de « créer un choc économique et urbain » [1]. Un « choc » qui risque de causer de graves dommages sociaux et environnementaux, malgré l’utilité de certains projets de transport ou de nouvelles offres de logements. A-t-on fait ce qu’il fallait pour en atténuer les effets dommageables ?

La préoccupation climatique, et plus généralement environnementale, ne pouvait certes pas être absente des réalisations même les plus pharaoniques liées au Grand Paris. Le comité d’organisation de Paris 2024 promet que ses JO seront « les plus verts de l’histoire ». EuropaCity, le projet de centre de loisirs et de commerce géant d’Auchan au nord de Paris, dans le Triangle de Gonesse, multiplie les affichages en matière environnementale, avec l’engagement d’installer des zones de maraîchage bio en lisière du site, afin de compenser ses émissions de gaz à effet de serre.

Pour les détracteurs de ces projets, cependant, de telles promesses servent surtout à éviter de poser une question fondamentale : n’aurait-il pas été préférable, du point de vue de l’environnement et du climat, que ces réalisations ne se fassent pas ? « On baisse peut-être de 55 % les émissions de gaz à effet de serre [des JO de Paris par rapport à ceux de Londres, ndlr], mais avait-on seulement besoin d’en créer ? Par nature, les Jeux Olympiques créent des nuisances, c’est donc l’opportunité même de les organiser qu’il faut critiquer », fait valoir David Belliard, président du groupe écologiste du Conseil de Paris, interrogé récemment par Basta !.

Exigences environnementales a minima

Les nouveaux buildings érigés dans la capitale devront, eux-aussi, respecter « toutes les performances énergétiques et écologiques en vigueur », assure l’adjoint à l’urbanisme de la Ville de Paris, Jean-Louis Missika. Il omet cependant de préciser que ce type de réalisation très énergivore vise avant tout des objectifs de prestige pour les élus et, pour les promoteurs, de rentabilisation maximale du foncier. Ces nouvelles tours abriteront plutôt des sièges de multinationales – comme Natixis ou Total – que des logements sociaux...

Les normes actuelles applicables aux bâtiments sont effectivement plus strictes que par le passé, en termes d’isolation par exemple. Elles ne suffisent cependant pas à rendre « écologique » un projet immobilier qui ne l’est pas au départ. Emmanuel Macron a d’ailleurs annoncé une réduction générale du niveau des exigences sociales et environnementales du logement, afin d’être « pragmatique » et de « libérer » la construction.

Des éco-quartiers pas vraiment écolos ni sociaux

Les groupes de BTP ne multiplient-ils pas les « écoquartiers », avec agriculture urbaine et toits végétalisés de rigueur ? « Aujourd’hui, beaucoup d’écoquartiers, comme les Docks de Saint-Ouen, ne proposent que du logement classique, avec un habillage environnemental et une hausse substantielle des loyers à la clé, estime Ivan Fouquet, du cabinet d’architectes Fair. Quand on examine la manière dont fonctionnent les certifications environnementales dans le bâtiment, comme BBC [bâtiment basse consommation, ndlr] ou HQE [haute qualité environnementale, ndlr], il n’est pas très difficile pour un promoteur de les respecter. On se contente d’appliquer les recettes existantes, sans aller de l’avant. Tout est fait pour en rester à un niveau de base et ne pas aller vers des projets qui soient réellement différents. »

Et qu’en est-il de l’appel à projets « Inventons la métropole du Grand Paris » ? Les critères environnementaux et climatiques y figurent bien, mais derrière « l’innovation » et « les ambitions urbaines ». Malgré une mention des « grands défis environnementaux » de la métropole, la plupart des projets en train d’être examinés par le jury ne vont guère au-delà des marqueurs à la mode : un peu d’agriculture urbaine ici, un peu de végétalisation là, un soupçon de « partage » et une dose de « smart ». Sans oublier une structure de l’économie sociale et solidaire dans le consortium portant le projet.

Pas de voix au chapitre pour des projets alternatifs

Étonnant ? Pas lorsque l’on constate que les promoteurs et les investisseurs ne varient pas : Vinci, Linkcity (Bouygues), Compagnie de Phalsbourg, Cogedim, Kaufman & Broad… Plusieurs des sites proposés, comme à Gonesse ou sur le Plateau de Saclay, sont des terres encore non construites, destinées à un bétonnage au moins partiel. Le projet alternatif porté par le groupement Carma sur le Triangle de Gonesse, auquel contribuent les architectes de fair, n’a pas été retenu parmi les finalistes : il ne proposait que de l’agriculture. Quand l’« innovation environnementale » passe avant la préservation de l’environnement et le maintien de productions locales…

Un autre critère brille par son absence dans cet appel à projets : celui de l’utilité sociale. C’est pourtant l’un des arguments majeurs des défenseurs du Grand Paris face aux critiques des écologistes. La création du Grand Paris Express – un ensemble de nouvelles lignes de métro – permettra en théorie de développer l’offre de transports en commun dans l’agglomération, d’améliorer les dessertes de banlieue à banlieue, et donc d’y réduire l’usage de la voiture et de faciliter la vie des habitants d’Île-de-France.

Une utilité sociale controversée

Pourtant, si certaines des futures lignes du Grand Paris Express auront une utilité indéniable si l’on en croit les prévisions de fréquentation, ce n’est pas le cas de toutes. La ligne 17, qui relie Saint-Denis et Roissy, en desservant EuropaCity, doublera la desserte du RER et sera exposée à la concurrence du CDG Express (au départ de Gare de l’Est). Résultat : quand l’actuelle ligne RER B transporte chaque jour 900 000 passagers entre la banlieue nord et la capitale, la ligne 17 ne fera voyager que 75 000 personnes pour un coût de 1,8 milliard d’euros [2]. Une partie des tronçons de ligne 18, à l’ouest, sont aussi sujets à caution pour des raisons similaires.

D’autres modalités de transport auraient pourtant pu être étudiées pour desservir ces territoires. Le choix de creuser d’immenses tunnels à grande profondeur – jusqu’à 55 mètres sous terre – est en partie responsable de l’explosion programmée des coûts. Cela aura également pour conséquence d’augmenter considérablement les émissions de gaz à effet de serre liées aux chantiers. Les architectes invités par Nicolas Sarkozy envisageaient initialement un métro aérien, ce qui avait aussi l’avantage d’assurer aux passagers une qualité de l’air bien meilleure que dans les transports souterrains. D’autres privilégieraient la rénovation des lignes existantes et la création d’infrastructures plus légères de type tram-train. Sans parler des besoins d’investissements pour rénover et améliorer les lignes RER existantes.

Résultat : entre les pollutions générées par ces chantiers et leurs apports en matière environnemental une fois mis en service le Grand Paris Express, les bénéfices ne sont pas si évidents. « Au vu de l’immensité du chantier à venir, 40 années d’utilisation des nouvelles installations pourraient être nécessaires pour compenser tout le CO2 qui aura été émis pour la construction des sites », estime une étude du cabinet Carbone 4 citée par Mediapart.

Répondre aux besoins des habitants ou des multinationales ?

La création de la future piscine olympique de Saint-Denis est souvent citée par les défenseurs de Paris 2024 comme un exemple des infrastructures « utiles » réalisées grâce aux jeux. De nombreuses voix soulignent qu’il aurait été possible, pour le même budget, de réaliser une dizaine de piscines plus proches des besoins des habitants. Son emplacement est aussi contesté : la piscine sera construite sur une partie d’un site appartenant à Engie, sponsor officiel des JO, qui bénéficiera ainsi d’une passerelle d’accès directe depuis la gare RER du Stade de France grâce à la piscine. La ville d’Aubervilliers, qui avait proposé un site alternatif, n’a pas caché sa déception.

Plusieurs réalisations du Grand Paris répondent à des besoins réels des habitants de l’agglomération. Il est cependant difficile d’échapper à l’impression qu’elles seront réalisées seulement parce qu’elles sont surtout sources de profits pour les multinationales. Que ce soit en matière de transport en commun ou de logement, les gros projets sont préférés aux aménagements plus légers et à la rénovation de l’existant. Comme s’il suffisait de créer une nouvelle offre, sans agir sur les autres paramètres, pour résoudre les problèmes réels de la métropole parisienne. « Sortir des limites du périphérique et penser le Grand Paris comme tel, c’était un vrai besoin, résume Ivan Fouquet. Faire plus de métros résoudra-t-il tous les problèmes ? Une des solutions serait plutôt la ville des courtes distances. »

D’autres visions pour le Grand Paris ?

Des projets se distinguent, comme le futur écoquartier fluvial de l’Ile-Saint-Denis. Celui-ci, conçu indépendamment de Paris 2024, a été rattaché a posteriori au village olympique, lequel s’étendra aussi sur une partie des communes de Saint-Denis et de Saint-Ouen. Construit sur le site d’anciens entrepôts du Printemps et des Galeries Lafayette, ce quartier sans voiture devrait accorder une large place aux plans d’eau, au végétal et au réaménagement les berges de la Seine pour la promenade, filtrer les eaux pluviales et gérer les risques d’inondation [3].

« Nous avons été sollicités par le comité de candidature, qui a été séduit par notre projet d’écoquartier, dont la première tranche était en cours de construction et dans lequel ils ont vu un atout vis-à-vis du Comité international olympique, explique Michel Bourgain, ancien maire (EELV) de la commune. Nous en avons débattu au sein de la municipalité et avec la société civile. Même si les Jeux olympiques, avec le passif accumulé, n’étaient pas forcément notre tasse de thé, nous avons raisonné de manière pragmatique, dans le contexte d’un rapport de forces défavorable à une petite commune comme la nôtre, et essayé de voir ce qui pouvait en ressortir de bon. » La petite ville de 7000 habitants réussit à obtenir plusieurs infrastructures, comme des murs anti-bruits autour de l’autoroute A1 ou l’enfouissement des lignes à haute tension. « Nous avons même réussi à imposer le principe de la neutralité carbone de l’ensemble du village olympique et celui de la réversibilité des aménagements pour les JO, car notre but est bien d’en faire, au final, un quartier de vie. »

Quand le Grand Paris bétonne, Paris réfléchit à « débitumiser »

Hasard du calendrier : la ville de Paris présentait elle aussi, fin septembre, sa « stratégie de résilience », fruit de deux ans d’élaboration [4]. Objectif : mettre la capitale et sa population en position de répondre aux crises majeures – inondations, hausse des températures, attentats... – mais aussi aux difficultés quotidiennes de la métropole. Contrairement aux critères choisis par les aménageurs du Grand Paris, l’accent est mis sur les inégalités et les solidarités concrètes entre les habitants. « Indépendamment des crises, il s’agit aussi de remettre du lien entre les gens, de renforcer la cohésion sociale, expliquait Célia Blauel, adjointe à la maire de Paris en charge de l’eau et du climat, à nos confrères du Monde. Une ville soudée et solidaire est une ville plus résiliente. »

Autre paradoxe : alors que le Grand Paris bétonne, Paris cherche à enlever le bitume. Une « débitumisation » des cours d’écoles – plus de 600 000 m2 dans la capitale – et une collaboration avec les agriculteurs franciliens pour protéger la qualité de l’eau voire alimenter les cantines scolaires de la ville sont envisagées [5]

Cette « stratégie de résilience » envisage également des projets plus ambitieux, comme la transformation du boulevard périphérique en avenue urbaine « verte » ou la création, à l’image de Rotterdam, de grands espaces verts publics pouvant se transformer en cas de fortes pluies ou d’inondations en bassins de rétention d’eau [6]. Ces velléités, déjà fortement combattues par tous ceux qui s’opposent à la réduction de la place de la voiture à Paris, réussiront-elles à faire contrepoids au rouleau compresseur urbanistique du Grand Paris et des Jeux olympiques ? L’exemple de l’extension du palais des sports de Bercy Paris Arena, sous prétexte de Jeux olympiques, aux dépens du parc de Bercy, illustre à petite échelle la contradiction entre deux visions très différentes de l’avenir de la capitale.

Vers un nouveau festival de « greenwashing »

Les grandes entreprises cherchent désormais à s’approprier le discours de la « participation », de « l’humain », de la « résilience » et de « l’innovation sociale ». Au moment même où Paris annonce sa stratégie de résilience, l’Institut Veolia et la Fabrique de la cité, un think tank créé par Vinci, organisent une semaine de débats sur le même thème. La « stratégie » parisienne elle-même, élaborée avec le soutien de la fondation Rockefeller et citant Veolia et Engie parmi ses partenaires [7], n’est pas sans entériner un certain mélange entre intérêts publics, philanthropiques et privés. Si cette approche semble désormais la règle en matière d’action officielle contre le changement climatique, elle n’est pas sans créer des risques de détournement ou de confusion.

L’organisation des JO et les chantiers du Grand Paris promettent en effet un nouveau festival de « greenwashing » (lire nos articles sur la COP21 ici et ). Suez, BNP Paribas, Air France, La Poste, Engie, Orange, Accor, LVMH, JC Decaux… les listes des sponsors officiels des deux événements se recouvrent largement. Autant d’entreprises qui auront à cœur de faire la démonstration de leurs « excellence environnementale », en profitant de multiples opportunités de marketing et de relations publiques.

Les JO, une opportunité ?

Il risque d’être bien difficile de faire la part entre les opérations de pur marketing, les projets intéressants mais limités, les opérations dites vertes légitimant une appropriation privée de l’espace urbain, et les véritables projets innovants. Comment ne pas laisser de réelles opportunités écologiques et sociales être dénaturées ? Sans l’échéance symbolique des JO et la perspective d’organiser certaines épreuves sur la Seine et ses canaux, la municipalité parisienne bénéficierait-elle de la même dynamique pour y améliorer la qualité de l’eau, ce dont bénéficieront in fine les Parisiens ?

De même pour le projet d’écoquartier fluvial de L’Ile-Saint-Denis, qui peinait à obtenir les financements nécessaires pour réaliser tous ses objectifs. Pour l’ancien maire Michel Bourgain, le fait d’avoir préservé la gouvernance préexistante du projet et que la commune obtienne un siège au conseil d’administration de l’entité chargée de livrer les équipements des JO – présidée par Anne Hidalgo – constituent une garantie que l’écoquartier ne sera pas dénaturé par rapport à ses ambitions initiales.

L’ancien maire estime même que son intégration dans le village olympique a contribué à tirer vers le haut les ambitions écologiques du comité d’organisation, y compris pour les parties du village situées à Saint-Denis et Saint-Ouen. Véronique Dubarry, élue écologiste au conseil municipal, est moins optimiste. L’envergure nationale, voire internationale, que prendra le projet de village olympique risque, selon elle, de nuire au respect des conditions posées par la commune. D’autant que des interrogations financières subsistent. S’inscrire dans une dynamique de méga-projet urbain, comme les JO ou le Grand Paris, avec tous les risques que cela implique, serait-il désormais le seul moyen pour les communes de sortir du carcan de l’austérité et de se donner les moyens de leurs ambitions écologiques et sociales ?

S’appuyer sur ces alternatives qui viennent des habitants

Toute option alternative se confronte au profil très technocratique des personnages clés du Grand Paris. Thierry Lajoie, président de Grand Paris Aménagement, a navigué dans tous les cabinets socialistes depuis les années 1980. Le président de la Société du Grand Paris. Philippe Yvin, est un proche de Claude Bartolone, l’ancien président socialiste de l’Assemblée nationale. Quant à David Lebon, directeur du développement d’Alliages et Territoires, la filiale d’Auchan en charge d’EuropaCity, il est un ancien de la gauche socialiste et du cabinet d’Arnaud Montebourg...

Pour certains élus de gauche, le Grand Paris a été conçu avec des ambitions sociales louables – celles de rééquilibrer l’agglomération entre les zones riches – Hauts-de-Seine et Yvelines – et les autres. Leur conviction que, pour y parvenir, il faut travailler avec les multinationales plutôt qu’avec les citoyens demeure profondément ancrée. La ville de Paris est l’héritière de ces contradictions : comment concilier son ambition d’être pionnière sur l’enjeu climatique et la qualité de vie de ses habitants, et celle de bien figurer dans la « compétition mondiale » des grandes métropoles, telle que l’imaginent les élites politiques et économiques ?

Tiraillées entre des impératifs peu compatibles, les politiques urbaines de l’agglomération parisienne peuvent-elles déboucher sur un nouvel équilibre ? Pour les architectes du cabinet Fair, une démarche plus audacieuse et moins technocratique aurait été possible, en partant de la multitude d’alternatives concrètes portées par des associations, des coopératives ou des groupes de citoyens en Ile-de-France. « Les organisateurs des Jeux de 2024 devraient s’inspirer des centaines d’initiatives collaboratives, les multiples expériences de vie associative, d’actions bénévoles qui fourmillent déjà sur le territoire francilien », estiment-ils dans un billet de blog. Basta ! a déjà recensé plus d’une centaine d’initiatives de ce type en région parisienne (voir notre carte des alternatives).

Le Grand Paris des alternatives

Le Grand Paris des alternatives

Les exemples ne manquent pas : des ateliers R’Urban, ces mini-cités d’agriculture urbaine vouées à la résilience (lire ici) à des des projets où paysagistes travaillent avec des enfants des cités pour embellir leur quartier, en passant par des supermarchés collaboratifs comme La Louve (lire ici). Amplifier ces initiatives et leur donner une portée régionale nous emmènerait aux antipodes du Grand Paris tel qu’il se dessine pour l’instant.

Olivier Petitjean

Notes

[1] Formule utilisée par Philippe Yvin, président de la Société du Grand Paris, citée dans un article du Monde.

[2] Lire à ce sujet l’article récent de Mediapart.

[3] Voir le site officiel du projet.

[4] Voir ici et .

[5] Lire notre enquête. Un projet est à l’étude pour la fourniture des cantines du XIe arrondissement par des exploitations agricoles « sans pesticides » de la région, sur le modèle de ce qui se fait depuis des années à Munich.

[6] Les Néerlandais ont même transformé leur expertise en matière d’urbanisme « résilient » en opportunité commerciale. Voir cet article récent du New York Times.

[7] Le document a été élaboré dans le cadre du réseau « 100 villes résilientes », initié par la fondation Rockefeller, héritière d’une partie de la fortune de la Standard Oil mais pionnière du désinvestissement des énergies fossiles. La fondation a ainsi financé un poste de « haut responsable à la résilience » au sein de la municipalité parisienne, et contribué à l’élaboration de la stratégie, y compris en offrant l’expertise de ses entreprises partenaires. Partenaires parmi lesquels on retrouve à nouveau Veolia, ainsi que des géants du béton comme Cemex, mais aussi de nouveaux acteurs plus inquiétants comme Microsoft et surtout Palantir, l’entreprise spécialisée dans la surveillance, de Peter Thiel, proche de Donald Trump, qui a multiplié les marchés avec le gouvernement états-unien (lire notre article).

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30 août 2017 3 30 /08 /août /2017 10:21

Une enquête publique critique l'urbanisation du triangle de Gonesse et le gigantesque projet commercial et de loisirs mené par Auchan. Par Rémi Barroux le 29 août 2017 pour Le Monde. Lire aussi Vertigineuse partie de Monopoly sur le triangle de Gonesse, Le Bêtisier d'Europacity, chapitre 1 : Images d'Épinal, Le Bêtisier d'Europacity, chapitre 2 : La prolifération d'emplois fantômes et Le bêtisier d'Europacity, 3. Des emplois inaccessibles à la population locale.

Vue d'artiste du projet Europacity, méga-complexe de loisirs et de commerce porté par le français Auchan et le chinois Wanda qui prévoit la construction d’une gigantesque surface commerciale, ainsi que des hôtels, des salles de spectacle, un parc aquatique au nord de Paris. EUROPACITY

Vue d'artiste du projet Europacity, méga-complexe de loisirs et de commerce porté par le français Auchan et le chinois Wanda qui prévoit la construction d’une gigantesque surface commerciale, ainsi que des hôtels, des salles de spectacle, un parc aquatique au nord de Paris. EUROPACITY

Il n'est pas certain que le projet d'EuropaCity, censé installer un immense complexe – méga-centre commercial, hôtelier et de loisirs… au nord de Paris, dans le triangle de Gonesse, à cheval sur le Val-d'Oise et la Seine-Saint-Denis –, sera prêt pour les Jeux olympiques de 2024, attendus à Paris. Dans les conclusions d'une enquête publique, qui s'est déroulée du 29  mai au 30  juin, le commissaire-enquêteur Ronan Hébert émet un avis défavorable sur " la révision générale du plan local d'urbanisme - PLU - de Gonesse ", commune de quelque 26 000 habitants du Val-d'Oise.

Cette révision du PLU avait pour principal objectif de permettre l'urbanisation du triangle de Gonesse, par la conversion de terres agricoles en zone d'activité. L'artificialisation devrait concerner 300  ha de terres agricoles environ sur moins de 700  ha que compte aujourd'hui cette zone, dont 80  ha pour le seul projet d'EuropaCity.

Pour Ronan Hébert, par ailleurs vice-président adjoint chargé des infrastructures et du développement durable de l'université de Cergy-Pontoise, derrière la remise en question de la révision du PLU de Gonesse se joue d'abord le bien-fondé du projet d'Immochan, filiale du groupe Auchan alliée au chinois Dalian Wanda, pour construire le complexe d'EuropaCity, d'un coût annoncé de 3,1  milliards d'euros. M.  Hébert souligne " des impacts environnementaux négatifs importants à très importants ", en particulier s'agissant de la consommation massive de " terres agricoles fertiles les plus proches de la capitale (…) favorables à l'autosuffisance alimentaire et -aux circuits courts ", l'imperméabilisation des sols, l'atteinte à la biodiversité, etc.

" Prise de distance "

Le commissaire indique aussi que ce projet alliant commerces et loisirs – sont annoncés notamment un parc aquatique et un " parc des neiges ", un parc de loisirs, une ferme et des zones de cueillette, des restaurants, des salles de spectacle, un " cirque contemporain "… – risque d'" impacter les équilibres économiques locaux et régionaux existants ". La région est en effet déjà largement dotée d'importants centres commerciaux et parcs de loisirs (Astérix, Disney…).

Cet avis défavorable, s'il n'est que consultatif, a été accueilli avec une " grande satisfaction " par les opposants au projet, regroupés au sein du Collectif pour le triangle de Gonesse. " Cela ne signifie pas la victoire, mais nous aurons plus de force pour les recours juridiques. Nous ferons tout pour refuser EuropaCity et tous les projets visant à détruire ces terres agricoles ", déclare Bernard Loup, son président.

Les opposants espèrent aussi beaucoup du ministre de la transition écologique et solidaire. " Il faut que nous entrions en phase de dégrisement sur la consommation abusive des sols et notamment des terres agricoles, et que nous cessions d'avoir la folie des grandeurs sur un certain nombre de projets commerciaux, a expliqué au Monde, lundi 28  août, Nicolas Hulot. Nous ne gagnerons pas la bataille climatique si nous ne cessons pas d'artificialiser les sols. " Le ministre avait déjà tenu des propos similaires le 6  juillet, lors de la présentation de son plan climat, aussitôt salués par les opposants, qui y ont vu une " prise de distance ", remettant en cause le soutien gouvernemental et régional à ce projet de développement économique, qui devrait, selon ses promoteurs, se traduire par la création de plus de 10 000 emplois.

Pour autant, les déclarations de M. Hulot ou les conclusions du commissaire-enquêteur ne signifient pas l'arrêt du projet. Le maire (PS) de Gonesse, Jean-Pierre Blazy, ardent défenseur du projet, a annoncé qu'il ferait connaître sa position sur la révision du PLU au cours de la première quinzaine de septembre – il peut le maintenir en l'état ou en élaborer un nouveau. La mairie a néanmoins expliqué sur son site que " les -conclusions du rapport ne sont pas de nature à remettre en cause le principe de l'aménagement du triangle de Gonesse ".

Quant aux porteurs du projet, ils estiment que l'avis concerne l'ensemble de l'urbanisation de la zone et pas seulement le triangle et EuropaCity. " Je m'étonne que les opposants se focalisent sur ce projet alors que l'urbanisation se fera avec ou sans, que le PLU correspond aux attendus du schéma directeur régional d'Ile-de-France, qui a reconfirmé l'objectif de l'urbanisation du triangle de Gonesse ", a déclaré au Monde David Lebon, directeur du développement d'EuropaCity. Pour ce dernier, c'est désormais aux élus de la ville de trancher.

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8 juillet 2017 6 08 /07 /juillet /2017 09:14

Europacity est un pôle "ultra-spécialisé" (80 métiers, alors qu'on en répertorie 10 000) qui ne peut pas recruter sa main-d'oeuvre dans un périmètre de proximité. Tout comme Roissy ou Disneyland, deux pôles métropolitains spécialisés (qui offrent respectivement 200 et 500 métiers), Europacity devrait étendre sa zone de recrutement sur un périmètre immense. Par Jacqueline Lorthiois le 14 juin 2017 sur son blog, qui fait suite aux chapitres 1, Le Bêtisier d'Europacity, chapitre 1 : Images d'Épinal et 2, Le Bêtisier d'Europacity, chapitre 2 : La prolifération d'emplois fantômes. Lire aussi Vertigineuse partie de Monopoly sur le triangle de Gonesse.

3.1. Une échelle territoriale gigantesque, un très faible impact local

Dans le chapitre précédent, nous n’avons pas tenté de recalculer catégorie par catégorie le nombre d’emplois réellement engendrés par Europacity.

- Pour des raisons déontologiques d’abord : le Collectif pour le Triangle de Gonesse s’est vu refuser par le Conseil régional (sous l’ancienne mandature 2010-2015) une modeste subvention pour réaliser l’étude détaillée sur l’emploi qui aurait dû être conduite par le maître d’ouvrage : sans budget, nous n’aurions pas pu effectuer des enquêtes d’entreprises indispensables à la qualité d’une évaluation sérieuse. Mieux valait alors s’abstenir et se contenter de faire ressortir les contradictions, les bourdes notoires, voire la mauvaise foi ou la manipulation statistique d’un certain nombre de données avancées par Auchan… avec des exemples. L’étude à dire d’expert commandée par la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) a rectifié les exagérations les plus criantes, mais est restée macro-économique et théorique. Il n’y a pas eu d’enquêtes de terrain, et encore moins d’analyse des qualifications et compétences de la main-d’œuvre locale, qui constitue la grande oubliée des différentes expertises conduites. Or, c’est la question cruciale : quelle garantie a-t-on que les besoins des travailleurs habitant le territoire soient pris en compte par les activités qui y seraient implantées ? (Ce qui ne veut pas dire « créés », comme le prétend avec témérité p.20 l’étude du cabinet Sémaphores, commanditée par le maître d'ouvrage. (voir figure 1 - …) [1]

Figure 1 © Sémaphores

Figure 1 © Sémaphores

 - Pour des raisons stratégiques ensuite : à quoi bon se battre sur les chiffres ? Quand bien même ce projet générerait des milliers de postes, nous sommes en mesure de démontrer que ces emplois seraient dans leur majorité, inaccessibles aux populations locales. La théorie du « ruissellement » déjà défendue pour Roissy par bon nombre d’élus val d’oisiens se révèle totalement illusoire (croire que forcément l’implantation d’un grand pôle d’emplois ferait fatalement « ruisseler » sur le territoire environnant des richesses économiques dont bénéficieraient les populations riveraines [2].) Auchan a mobilisé un énorme budget pour le portage du projet Europacity, essentiellement en communication. Dans le chapitre 2, nous avons relevé un grand nombre d’erreurs et d’approximations contenues dans le volet « Emploi ». Pourtant, le maître d’ouvrage n’a pas jugé utile de réactualiser une étude totalement sommaire. On ne saurait mieux démontrer que les questions d’emplois sont le cadet du souci du promoteur. Les membres de la famille Mulliez, propriétaires du groupe Auchan, sont des commerçants. Après avoir vendu des produits, ils vendent du rêve avec la même efficacité qu’ils ont vendu des centres commerciaux… Et ça marche ! Les promesses d’emplois aussi séduisantes que trompeuses… sont considérées comme argent comptant par une bonne partie des acteurs locaux, entraînant partiellement le soutien des populations, réduits à de pauvres alouettes se laissant prendre aux miroirs

Les promesses n’engagent que ceux qui les croient

Il est intéressant d’étudier en Ile-de-France les effets en matière d’emplois de deux précédents cas d’implantations de grands pôles métropolitains : Roissy et Disneyland-Paris, qui peuvent nous fournir des enseignements et des hypothèses de scénarios pour Europacity. Les promoteurs de ces projets « historiques » ont ceci de commun avec celui d’Auchan : ils ont reçu le soutien de l’État et des collectivités territoriales grâce à la promesse de création de milliers d’emplois. D’où l’interrogation suivante : comment ces deux implantations ont-elles « vieilli » ? Les promesses ont-elles été tenues ? Et surtout, s’agissant d’installations « effectives » d’activités, peut-on mesurer a posteriori leur bénéfice réel pour les populations locales?

a/ En ce qui concerne l’implantation de l’aéroport de Roissy, dans les années 60, les communes rurales de la plaine de France étaient unanimement opposées au projet. C’est le « rapport Lachaize » (1970), du nom du préfet rédacteur, qui a levé les réticences des acteurs, en promettant la création de 70 000 emplois dès la mise en service de l’aéroport, en 1974. À l’époque, travaillant comme chargée de mission « Activités-Emploi » à l’Atelier d’Urbanisme de la Direction Départementale de l’Équipement 95, rattachée à la Préfecture du Val d’Oise, je me souviens d’une réunion organisée par ADP (Aéroports de Paris) boulevard Raspail à Paris, où l’un des directeurs avait déclaré : « Le choix de Roissy ? Il s’imposait ! C’était le seul endroit à 30 kms de Paris-Notre-Dame où il suffisait d’exproprier 3 fermes pour disposer de 2000 ha… » Une pure opportunité foncière, donc, qu’il a fallu ensuite déguiser en substantifiques retombées de milliers d’emplois, afin d’obtenir le soutien des élus locaux. A la parution du recensement INSEE de 1975, j’ai été chargée par le préfet du Val d’Oise du premier rapport d’évaluation des emplois de Roissy [3]. J’ai trouvé péniblement 15 800 postes de travail, et encore… en raclant les fonds de tiroirs, car à une époque où les 2/3 des appareils décollaient d’Orly et 1/3 de Roissy, ADP avait affecté la totalité des 5000 navigants (personnel travaillant à bord des avions) à l’aéroport Charles-de-Gaulle.

b/ L’implantation d’EuroDisney ne s’est pas heurtée aux mêmes résistances [4]. Concoctée par le premier ministre Laurent Fabius, puis ratifiée par son successeur Jacques Chirac, elle s’est effectuée dans un consensus général gauche/droite, national et local. Il était annoncé 12 200 emplois à l’ouverture du parc, chiffre très comparable à l’effectif avancé en 2011 pour Europacity par le cabinet Sémaphores (11 800), mais pour un territoire (80 ha) d’une taille… 24 fois inférieure. Le gouvernement français avait posé à la World Disney Company une condition expresse pour donner son accord : que le Service Public de l’Emploi (à l’époque, l’ANPE) ait le monopole du recrutement pour les deux phases « chantier » et « exploitation » du parc de loisirs [5]. Mais malgré une énorme  préparation, deux ans d’études de faisabilité, une stratégie conçue 3 ans à l’avance pour un projet connu (3 autres parcs existaient déjà aux USA et au Japon), la participation de 16 agences locales, de la Direction régionale de l’ANPE, de la Région, sans compter une mission interministérielle « EuroDisney » créé spécialement, les exigences de l’employeur se sont révélées particulièrement difficiles à satisfaire.

 c/ Côté État : mission impossible. En effet, l’entreprise avait formulé des demandes très éloignées du fonctionnement du marché du travail français. On se heurtait à un phénomène essentiellement « culturel » : les contenus américains des fiches de postes réclamaient des « moutons à 5 pattes » aux caractéristiques décalées avec les compétences de la main-d’œuvre locale disponible. Exemple : il était réclamé 800 femmes de chambre parfaitement bilingues (français-anglais) ou encore des « Characters » (des comédiens multi-fonctions) pouvant chanter, jouer de la musique, défiler dans des parades en costumes de Mickey [6], mais susceptibles aussi dans les intervalles, de pouvoir assurer la billetterie ou œuvrer sur les attractions. Or, en peignant les fichiers de l’ANPE de toute l’Ile-de-France, nous avions trouvé péniblement 40 femmes de chambre au chômage ayant des notions d’anglais. Quant à la main-d’œuvre des activités « Spectacles », nous nous sommes heurtés à une organisation française en filières professionnelles cloisonnées : contrairement aux USA, les chanteurs ne dansent pas, les danseurs ne savent pas chanter, les ténors d’opéra refusent avec mépris un répertoire de variétés, etc… Il n’y avait guère que dans les métiers du cirque que nous avons trouvé des candidats multi-casquettes correspondant aux exigences de l’employeur.

 Résultat : les objectifs du monopole de l’ANPE n’ont pu être tenus. Alors que les conditions du marché du travail national étaient beaucoup plus favorables qu’aujourd’hui, la main-d’œuvre au chômage beaucoup moins éloignée de l’emploi, sans compter une seule organisation gérant l’ensemble de l’offre et de la demande, avec la mobilisation d’un énorme partenariat : l’ensemble des Chambres de Commerce et des métiers, tous les prestataires de formation sous-traitants des services publics, le tout chapeauté par une mission interministérielle spécifique. Malgré quelques négociations réussies (par exemple, introduire un métier en Hôtellerie inconnu aux USA, de « gouvernante d’étage » parlant correctement anglais, assurant la relation clientèle et dirigeant une vingtaine de femmes de chambre dispensées ainsi de compétences linguistiques), l’ANPE n’a pu couvrir l’ensemble des besoins de l’entreprise. Des ouvriers sont venus de toute l’Europe pour respecter le planning très serré du chantier. Et à l’ouverture d’EuroDisneyland, en dépit de tous les efforts pour maximiser les retombées de l’implantation pour la population locale, le recrutement s’est largement ouvert à l’extérieur. Le monopole ANPE ayant été partiellement assuré, EuroDisney s’est considéré déchargé de ses engagements et a recruté dans toute la France et l’Europe.

 d/ Un maître d’ouvrage libéré de ses obligations. Aujourd’hui, ce mode de recrutement du parc de loisirs est parfaitement assumé : le site internet de Disneyland-Paris déclare 100 nationalités ; la dernière campagne de recrutement ouverte à l’automne pour la saison 2017 a organisé des castings à Dublin, Bologne, Athènes… Il est certes indiqué que 70% des « cast members » sont français (et non franciliens), ce qui correspond à 4500 salariés étrangers, dont 2700 originaires d’autres pays européens. Mais attention : 70% de personnel français ne signifie pas 70% des emplois, car il y a des CDI de 16 h fonctionnant uniquement le week-end. Nous ignorons la correspondance avec des équivalents-temps-plein (ETP), dans une confusion de chiffres (volontaire ou non) entre postes et emplois. Toujours sur le même site, l’interview du cadre britannique Daniel Harding, chargé du casting, nous incite davantage à la prudence. Il déclare « voyager dans le monde entier » pour trouver « une grande diversité de talents… », se rendre « plusieurs fois par an au Royaume-Uni » et, selon les besoins, « aux États-Unis et en Australie ». Il est offert aux candidats de provenance lointaine des logements dans « 6 résidences sociales » de Val d’Europe, dont près d’un millier de places pour le personnel temporaire, ce qui permet d’afficher un taux de salariés « habitant sur place » très honorable sur le plan statistique, mais sans aucune signification réelle.

Par ailleurs, une évaluation a posteriori des emplois supprimés par l’implantation d’EuroDisneyland reste à faire. Un exemple : il est impossible qu’en 1992, à l’ouverture du pôle de loisirs, l’accroissement soudain de +  25% du parc d’hôtels-cafés-restaurants d’Ile-de-France… n’ait eu aucun impact négatif sur les établissements et les postes de travail existants ! De même, j’ai souvenir de nombreuses faillites d’entreprises de BTP sous-traitantes au cours de la phase chantier, dans l’incapacité de respecter des cahiers des charges draconiens dont certains faisaient 600 pages… en anglais. Mais aucune comptabilité des fermetures d’activités n’a été effectuée à cette époque. À l’inverse, lors de l’anniversaire des 20 ans d’existence de Disneyland-Paris, des chiffres parfaitement surestimés ont été publiés. Il a été notamment valorisé un grand nombre d’« emplois induits » (40 000… [7]), alors que les biais statistiques en la matière sont nombreux et la méthode de comptabilisation discutable [8]. Force est de constater qu’aujourd’hui, si ce pôle a généré un substantiel développement économique (à l’avantage réel de qui ?)… il ne s’est pas effectué au bénéfice de l’emploi de la main-d’œuvre seine-et-marnaise, même si l’importance du personnel logé sur place fausse notablement les données…

Bassin de recrutement d’Europacity « non identifié »

Dans l’étude Sémaphores, il est explicitement dit page 3 qu’il est impossible de déterminer une aire de recrutement pour Europacity : « …nos travaux portent essentiellement sur des estimations objectivées des emplois mobilisés (…), sans que nous soyons en mesure de déterminer quelle sera l’origine géographique des actifs mobilisés pour occuper ces emplois. » Cet aveu d’impuissance est significatif du manque de sérieux des auteurs de l’étude et du désintérêt des commanditaires pour faire appel en priorité aux ressources de la main-d’œuvre locale.

 Pourtant, il y a 25 ans, la mission EuroDisneyland à laquelle je participais a réussi à déterminer une « zone pertinente » de recrutement, avec des moyens informatiques et de communication bien moins sophistiqués qu’actuellement, pour un projet d’échelle bien plus vaste et un éventail de métiers beaucoup plus conséquent. Nous disposions en 1990 d’une liste des filières d’activités et des métiers établie par EuroDisneyland S.A.[9] L’ANPE a ensuite « peigné » ses fichiers de demandeurs d’emplois, avec l’appui de ses agences locales, selon une classification par métiers et lieux de résidence, afin d’identifier le nombre et la localisation des chômeurs susceptibles d’être embauchés dans les différents postes ciblés par l’employeur - directement ou après formation par les organismes mobilisés -. On trouvera en annexe la carte du bassin de recrutement de la main-d’œuvre francilienne ainsi déterminée, avec les critères qui ont été utilisés. Malheureusement, il n’a jamais été effectué d’évaluation « longitudinale » (suivi sur le temps long), qui permettrait de confronter les perspectives initiales d’embauches (devant être couvertes à 100% en Ile-de-France) avec la réalité constatée aujourd’hui sur le terrain.

Bassin d’activités de Roissy : un modèle d’étalement urbain

a/ Le pôle ultra-spécialisé de Roissy (avec 47% de ses emplois concentrés dans la filière Transport-Logistique) constitue un deuxième cas d’implantation en Ile-de-France d’une infrastructure métropolitaine majeure, déconnectée de son territoire local. Etabli sur un site interdit à l’habitat, il concentre un grand nombre d’établissements rattachés à l’aéroport, sans liens avec l’espace environnant. C’est pourquoi je considère Roissy comme un «pôle d’activités» [10] plutôt qu’un « pôle d’emploi », générant un « bassin d’activités »10 qui ne joue pas un rôle de structuration du territoire comme le ferait un bassin d’emploi. Ce cas de figure s’observe lorsqu’un pôle rassemble des filières fortement spécialisées sur quelques créneaux, réclamant une très vaste aire de recrutement pour attirer la main-d’œuvre adéquate. Tandis qu’un véritable pôle d’emplois engendre une forte intensité de flux domicile-travail dans son périmètre de proximité, que j’appelle « aire directe » [11]. Pour rattacher une commune à un pôle d'emplois, l’INSEE avait fixé autrefois un seuil minimum de 40% de la population active occupée y exerçant son activité. Dans le cas de Roissy, il n’y aurait que 3 communes répondant à cette définition en dehors du pôle lui-même, non pas en raison de l’importance de leur attraction, mais de la modestie de leur poids démographique [12] ! Ce sont les localités qui figurent en rouge sur les cartes du bassin de Roissy ci-après.

b/« L’aire directe » de l’aéroport Charles-de-Gaulle est des plus réduites, puisque la localité la plus « impactée » par le pôle (Goussainville) possède moins de 10% de sa main-d’œuvre qui y travaille… On peut lui adjoindre les communes de Tremblay-en-France, Villepinte, Sevran et Gonesse. Sans oublier le cas particulier d’Aulnay-sous-bois, car cette ville de 82 000 habitants au passé industriel florissant (PSA, l’Oréal) constitue en réalité le véritable pôle d’emploi «historique» du territoire et exerce son influence - en sous-jacence au pôle de Roissy - sur un bassin d’emploi local d’une certaine densité, malgré une grave crise de désindustrialisation qui affecte la ville elle-même et son environnement de proximité (Blanc-Mesnil, Drancy, Sevran)… Ainsi, depuis 1975, le pôle s’est fortement développé sans intensifier son attraction de proximité. Au total, l’aire d’influence directe de Roissy ne dépasse guère les 6 communes citées plus haut, dont le nombre n’a pas varié en une quarantaine d’années - depuis l’implantation de l’aéroport [13] - et qui fournissent moins de 10% de sa main-d’oeuvre. On enregistre même au cours des années récentes (2008-2013) un déclin de l’attraction sur ces 6 communes, passant de 9724 résidants travaillant à Roissy à… 7688, soit une réduction de plus de 2000 actifs : -21 % en cinq ans !

Bassin d'emploi Roissy en 1975, en 2008
Bassin d'emploi Roissy en 1975, en 2008

Bassin d'emploi Roissy en 1975, en 2008

c/ A l’inverse, une « aire diffuse » immense est générée par les flux domicile-travail de ce pôle d’activités. Elle ne cesse de s’étaler de plus en plus, en tache d’huile, au fur et à mesure que la zone aéroportuaire se développe (voir ci-dessus cartes figures 2 et 3). En 1975, avec moins de 16 000 emplois, l'aire d'influence du pôle est modeste. Mais dès les années 80, le périmètre d’attraction de Roissy s’élargit au Nord en forme de cône et dépasse les frontières d’Ile-de-France, atteignant presque Senlis dans l’Oise. En 1990, il gagne les frontières de l’Aisne, et accentue son influence dans la vallée de la Goëlle ; sans compter des effectifs originaires de toute la Seine St Denis et des arrondissements de Paris nord et est. Et en 2008, l’attraction du pôle capture 20 à 40% de la main-d’œuvre (en rose sur la carte) d’un vaste espace allant de Roissy-Mauregard jusqu’à Crépy-en-Valois, sans compter des flux en provenance du Val-de-Marne, de l’ouest seine-et-marnais, des Hauts-de-Seine, et même du nord de l’Essonne. Désormais, cette aire d’influence diffuse gigantesque s’étend sur 10 départements : l’ensemble de l’Ile-de-France, auquel il convient d’adjoindre la moitié de l’Oise et l’ouest de l’Aisne.

 Une minorité de cadres réfugiée dans des sites plus agréables

En ce qui concerne la main-d’œuvre qualifiée, Roissy constitue un véritable « repoussoir » dans son périmètre de proximité. Il engendre de telles nuisances de bruit (en continu, puisqu’il est le seul grand aéroport européen à ne pas bénéficier d’un couvre-feu, à la différence d’Orly), que ses cadres préfèrent s’installer dans un environnement plus agréable, dans l’Oise aux abords de la forêt de Chantilly, dans le Parc Naturel Régional Oise-Pays de France, dans la vallée de la Goëlle au nord de la région, ou carrément en banlieue sud, dans la vallée de Chevreuse ou le bassin de Saint-Germain-en-Laye (voir figure 4). Ainsi, seules des populations pauvres et de faible niveau de qualification habitent à proximité de l’aéroport et ne peuvent donc pas offrir l’ensemble du réservoir de main-d’œuvre spécialisée dont le pôle a besoin.

Bassin d'emploi Roissy des cadres

Bassin d'emploi Roissy des cadres

Pour toutes ces raisons, l’INSEE il y a une dizaine d’années a redéfini la zone d’emploi de Roissy, rebaptisée d’ailleurs « Roissy-Sud Picardie » qui regroupe désormais 393 communes, dont 241 dans l’ancienne Picardie, contre 87 en Val d’Oise et 47 en Seine-et-Marne. Il s’agit donc statistiquement aujourd’hui d’un pôle qui est d’abord picard plutôt que francilien ou même val d’oisien….

Notons au passage que dans le cas d’un pôle très peu enraciné localement comme Roissy, il apparaît peu pertinent de concevoir le développement de l’emploi du « Grand Roissy » comme relevant du ressort local de l’intercommunalité Roissy-Pays de France, ni même de la seule région Ile-de-France, en faisant l’impasse sur les travailleurs de l’aéroport des 241 communes des Hauts-de-France. Pourtant, les élus du Val d’Oise - refusant cette réalité – s’entêtent à considérer Roissy comme le plus beau fleuron d’emplois du Val d’Oise[14], et passent leur temps à s’insurger contre les oppositions des élus du 93 à Europacity, considérant une telle ingérence comme insupportable pour un projet considéré comme appartenant au Val d’Oise.

L’hypothèse d’un très faible impact local d'Europacity et d’un bassin de recrutement gigantesque ?

Selon toutes probabilités, par analogie aux deux exemples existants analysés précédemment, dans le cas où le projet porté par Auchan se réaliserait, le scénario d’étalement urbain se reproduirait, sans doute en plus accentué. L’aire d’influence d’un pôle comme Europacity couvrirait une aire d’influence encore plus gigantesque, avec un impact local encore plus modeste pour les communes situées à proximité. En effet, on recense plus de 10 000 métiers dans le Répertoire ROME [15] : Disneyland-Paris en identifie 500 ; Roissy 200, soit respectivement 5% et 2% du champ, ce qui est très faible. C’est pourquoi les aires de recrutement sont si vastes, pour pouvoir trouver la main-d’œuvre correspondante. Le champ d’Europacity apparaît encore plus restreint, avec 80 métiers identifiés, moins de 1% (0,8) de l’éventail professionnel. Cette structure de l’emploi est propre aux grands pôles métropolitains et les actions de formation ne pourront corriger cette spécificité qu’à la marge. De plus, si Roissy et Disney couvrent des domaines d’activités qui se recoupent faiblement (sauf les filières commerce, hôtellerie-restauration, sécurité…), ce n’est pas le cas d’Europacity dont un grand nombre de filières professionnelles concurrencent celles du parc d’attractions seine-et-marnais (culture, loisirs, animation, commerces, hôtellerie-restauration…) Peut-on envisager la cohabitation de deux coqs dans la même basse-cour ? Roissy a perdu près de 14 000 emplois en 5 ans entre 2008 et 2013… Disneyland-Paris a vu son nombre de visiteurs chuter de 16 millions de visiteurs en 2012 à 13,4 millions en 2016… Peut-on considérer qu’il s’agit de deux pôles parvenus à maturité qui ne se développeront pas davantage, mais qui par contre d’être très sensibles à la concurrence ? Prend-on le risque « d’anticiper un déclin qui de toutes façons aurait eu lieu ? » interrogeait M. Carenco, alors qu’il était préfet d’Ile-de-France. On peut douter que la population concernée souhaite abandonner « un tiens » contre deux « tu l’auras ».

CONCLUSION

Tout comme Disneyland-Paris et Roissy, Europacity est un pôle métropolitain ultra-spécialisé qui ne peut avoir qu’un impact très limité sur son territoire local d’implantation. Entre d’un côté Disney qui recrute dans la France entière et l’Europe et de l’autre Roissy, dont le périmètre d’influence couvre toute l’Ile-de-France et la moitié de l’ancienne Picardie, probablement l’aire de recrutement d’Europacity se situerait entre les deux, peut-être à l’échelle du Bassin Parisien, avec un ancrage local très limité. Pour employer un actif résidant dans son périmètre de proximité, Roissy doit en accueillir 9 autres venus d’ailleurs. On peut craindre que ce taux d’efficacité soit plutôt de 1 à 20 dans le cas d’Europacity, si l’on en croit le panel particulièrement réduit de métiers offerts par le projet.

 Nous verrons dans le prochain chapitre, que cette faible utilité locale d’Europacity est encore renforcée par le décalage Emplois/Main-d’œuvre en matière d’offre et de demande de qualification et de formation.

 

ANNEXE

Quel bassin de recrutement pour Disneyland ?

En 1989, l’ANPE Île-de-France a ouvert l'agence de Chessy en Seine-et-Marne, afin de couvrir les besoins en recrutement du personnel du chantier, puis du parc de loisirs EuroDisneyland, dont l'ouverture au public était fixée au printemps 1992.

Pour définir la zone pertinente de recrutement, il a fallu se baser sur :

- la localisation de la main-d'œuvre disponible dans les filières recherchées, située essentiellement dans les quartiers est de Paris et dans la partie sud de la Seine-Saint-Denis ;

- l'emplacement des agences ANPE susceptibles de diffuser les offres auprès des demandeurs d'emploi, qui figurent sous forme de «points noirs » sur la carte ci-après ;

- les périmètres d'intervention des partenaires de l'opération (la plupart en Seine-et-Marne), tels que le département 77, les comités de bassin de Meaux et du nord-ouest seine-et-marnais, les différentes intercommunalités de l’agglomération nouvelle de Marne-la-Vallée, l'Éducation Nationale, les PAIO et Missions locales.

 Il a fallu ensuite restreindre le territoire ainsi identifié, en raison d'une exigence fondamentale de l'employeur : disposer d'un personnel opérationnel, même en cas de grève de transport. D'où la nécessité pour les candidats d'habiter dans des sites disposant d’une double desserte de transports (route et RER ou train) et d'un véhicule pour aller travailler à Disney en cas de besoin.

Cette condition impérative, additionnée aux précédentes, a généré une aire pertinente en forme d'entonnoir :

– la partie située à l’est résulte du plus grand périmètre d'intervention des différents partenaires (notamment la très vaste zone de formation n°1 de l'éducation nationale 77) ;

– la zone centrale couvre les lieux de résidence de la main-d'œuvre spécialisée dans les branches demandées (hôtellerie-restauration, spectacles, sécurité, entretien, animation-tourisme);

– la forme générale allongée, à l'ouest du site, prend en compte le tracé du RER A et le pôle de transit de Nanterre, intégrant une bande de territoire et un pôle de main-d'œuvre bien desservis par les transports en commun. Alors que des zones plus proches du site de Chessy et d'accès routier plus facile (à l'est ou au sud), mais mal desservies par le RER ou le train, ont dû être exclues.

D'où la carte du territoire opérationnel ainsi défini, validée par l'ANPE Île-de-France.

Source : « EuroDisneyland, bilan prévisionnel de l'emploi », op. cit. note n° 5

Le bêtisier d'Europacity, 3. Des emplois inaccessibles à la population locale

NOTES

[1] Citons l’exemple de l’International Trade Center (Roissy), qui a accueilli ses deux premières entreprises… déplacées : une activité logistique originaire de Gonesse et un grossiste textile chinois d’Aubervilliers.

[2] Voir Dominique Herbert « Théorie du ruissellement économique, bidon… », 3 février 2016, Médiapart.

[3] J. Lorthiois, « Les emplois localisés à Roissy-en-France », Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme de Sarcelles-Gonesse, Direction Départementale de l’Equipement du Val d’Oise, 1978.

[4] En dehors de quelques protestations isolées, dont Gilles Smadja journaliste à l’Humanité auteur du livre Mickey, l’arnaque (1988) et d’Alain Lipietz, militant écologiste.

[5] EuroDisneyland, bilan prévisionnel de l'emploi, J.L. Husson, J. Buzy. Commanditaires : ANPE et Conseil Régional d'Ile-de-France 4 volumes, 432 pages, 1990.

- volume 1: synthèse critique des données disponibles

- volume 2: phase chantier: emploi et besoins de formation

- volume 3: les métiers de la phase Parc de Loisirs

- volume 4: annexes - comptes-rendus d'enquêtes

[6] Il y avait une exigence « moins de 35 ans » justifiée (en raison du poids des têtes – 28 kilos - portées par les « characters ») mais théoriquement illégale en France, en raison de son caractère discriminant.

[7] Préfecture d’Ile-de-France, Disneyland Paris, étude de contribution économique et sociale, dossier de presse, 14 mars 2012.

[8] Qui peut croire à la validité d’une méthode qui consiste à comptabiliser 30% des salaires versés aux travailleurs de Disneyland-Paris – transformés en dépenses commercialisables – affectées en totalité au lieu d’habitat des actifs et calculées en équivalents-emplois de personnels de ménage, d’agents de sécurité, ou de vendeurs? Et comment intégrer la part de gains envoyés (selon toutes probabilités) par les étrangers à leur famille ?

[9] « Liste des emplois à créer par le projet Euro Disneyland », document du 20 avril 1990, Délégué Interministériel du projet Euro Disneyland.

[10] Voir définitions dans l’article http://j-lorthiois.fr/wp-content/documents/pdf/509.pdf

[11] Voir sur mon site les définitions détaillées de tous ces termes, www.j-lorthiois.fr in Concepts généraux.

[12] Le village de Roissy (2700 habitants) ; Mauregard (800 h, Seine-et-Marne) ; Eve (430 h, Oise) et Ancienville (79 h, Aisne).

[13] Le bassin de Sarcelles et les communes qui lui sont rattachées (Villiers le Bel, Garges-lès-Gonesse) n’est pas tourné vers Roissy, mais constitue l’aile ouest du « Grand Bassin de St Denis ». Pour voir l'évolution en 5 cartes successives, voir sur mon site www.j-lorthiois.fr in Concepts Généraux.

[14] Les pôles d’emplois de Cergy-Pontoise et d’Argenteuil-Bezons font travailler davantage les vals d’oisiens que le pôle de Roissy.

[15] Répertoire Opérationnel des Métiers géré aujourd’hui par Pôle Emploi.

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6 juillet 2017 4 06 /07 /juillet /2017 09:03

Pour valider la construction de son pharaonique centre commercial et de loisirs Europacity sur les excellentes terres agricoles du Triangle de Gonesse, Auchan n'a reculé devant aucun argument valorisant les retombées soi-disant mirifiques de son mégaprojet. Revue de détail de l'argument Emploi. Par Jacqueline Lorthiois le 14 juin 2017 sur son blog, qui fait suite au chapitre 1, Le Bêtisier d'Europacity, chapitre 1 : Images d'Épinal. Lire aussi Vertigineuse partie de Monopoly sur le triangle de Gonesse.

CHAPITRE 2. LA PROLIFÉRATION            D'EMPLOIS FANTÔMES

Malgré un débat public en 2016 qui a mis en lumière la pertinence des arguments des opposants à Europacity [1], Auchan entend poursuivre son projet à tout prix, quitte à effectuer quelques retouches mineures et autres mesurettes (par exemple : la fonte de son parc des neiges)… via sa nouvelle société porteuse « La Belle Étoile », dans un système de sociétés emboîtées dont le groupe a le secret [2]. Rappels historiques et revue de détail de l’argument clé des promoteurs : la création de MILLIERS D’EMPLOIS ACCESSIBLES à la population locale, censée faire baisser miraculeusement le taux de chômage élevé du territoire.

 Certains lecteurs débusqueront peut-être certaines redondances par rapport à des textes antérieurement publiés, notamment sur le site du Collectif Pour le Triangle de Gonesse (CPTG) [3] dont je suis membre. Mais c’est que, malgré la tenue du débat public qui a démontré le caractère discutable des promesses du maître d’ouvrage, bon nombre de promoteurs d’Europacity continuent à citer les anciens chiffres, alors que les estimations d’emplois ont été officiellement révisées à la baisse.

Première partie : LE NOMBRE

 Dès 2011, notre Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG) opposé à Europacity s’est élevé contre les absurdités proférées en termes d'emplois par le maître d'ouvrage, répétées en boucle par les élus du Val d'Oise et les techniciens de l'EPA Plaine de France dans un discours incantatoire, basé sur des affirmations sans aucune justification. Avec une inflation incessante de chiffres qui n’était pas sans rappeler l’histoire de Perrette et le pot au lait. Comme dans la fable de La Fontaine en effet, les nombres grossissaient à mesure de leur propagation. On avait démarré à 20 000 emplois… Mais en 2015, Mme Moustachir, alors maire-adjointe à l’emploi de Gonesse interpellait nos militants à une réunion dite de « concertation » organisée par l’EPA : « Comment peut-on passer à côté de 50 000 emplois ? » Comme s’ils étaient déjà là, en « chair et en hausse»…

 Dès septembre 2012, lors d’une exposition-propagande d’Immochan à la Maison de l’architecture en Ile-de-France, j’avais dénoncé devant un public averti (essentiellement des architectes et urbanistes) resté goguenard le tour de passe-passe que représentait l'addition des emplois du chantier et ceux du projet Europacity après ouverture, comme si ces postes étaient simultanés alors qu'ils se succédaient. Intervention qui avait suscité l’hilarité des participants et des applaudissements. Allègrement cumulées en effet, les deux phases « chantier » (construction de l’édifice et de ses aménagements) et « exploitation » (une fois la mise en service du centre) permettaient d’obtenir le total appréciable de 24 000 emplois, comme si les postes étaient interchangeables. On imagine pourtant difficilement un grutier ou un coffreur-boiseur qui, à l’issue du chantier, aurait poursuivi son activité comme vendeur en « vins et spiritueux » Moët /Hennessy ou en montres de luxe dans une boutique LVMH…

Étude Sémaphores peu éclairante

On aurait pu croire que ces calculs fallacieux fussent corrigés dans la version 2015 du dossier adressé par le maître d'ouvrage à la Commission nationale de débat public (CNDP) qui a permis enfin le démarrage de celui-ci, repoussé à deux reprises… Nous avions en effet observé que nos analyses et autres communiqués de presse étaient suivis de près par le promoteur qui rectifiait ensuite les exagérations par trop criantes. Pourtant, force est de constater qu’en matière d’emplois, les données se positionnent toujours – encore actuellement en 2017 – dans du PUR « DÉCLARATIF » : aucune étude sérieuse effectuée par le porteur de projet n’étant venue corroborer les allégations d’une manne d’emplois générés par l’implantation d’Europacity.

 Jusqu’en 2016, nous ne disposions d’aucune information venant étayer les affirmations contenues dans une débauche de plaquettes, tracts, livre et autres magazines abondamment distribués par Immochan dans une intense propagande. Aussi, dès que le dossier du maître d’ouvrage fut publié sur le site de la CNDP, nous nous sommes réjouis d’avoir accès ENFIN à la fameuse étude sur l’emploi du cabinet Sémaphores, que nous avions réclamée à de nombreuses reprises et restée jusque-là sous embargo. Même les auteurs de l’étude ECODEV commanditée par l’EPA Plaine de France en 2012 [4] sur l’estimation des nouveaux emplois des 25 projets du Grand Roissy (dont Europacity) n’avaient pas eu accès au dossier et il leur avait été communiqué un simple total non justifié de 12 600 emplois pour la phase chantier et de 11 800 emplois directs pour la phase exploitation sans autres explications [5]. C’est donc avec une légitime curiosité que nous avons consulté le document Sémaphores, dont la version initiale datait de 2009, mais qui portait la mention prometteuse de « mise à jour 2015 » [6].

 Hélas, quelle ne fut pas notre déception : ce rajout s’est révélé totalement mensonger. Bien que la première phrase du document démarrât par « Dans un esprit d’anticipation »... ( !), dans les tableaux chiffrés, le temps s’était arrêté en 2009 (pour un chantier censé démarrer en 2019 et un centre ouvrir en 2024 !) Alors que fin 2015 pourtant, la parution du recensement INSEE de 2012 permettait une réactualisation des données. L'indigence de ce document de 21 pages qui (lorsqu'on enlevait les intercalaires de titres et les 2 tableaux annexes) n’en comportait en réalité que… 16 (en caractères 12 et avec une marge gauche et droite totalisant 6 cm !) …n’était pas sans rappeler le fameux rapport de Mme Tiberi sur la francophonie [7]. Constat sans appel : la boîte noire des estimations d’emplois ne s’était qu’entrebâillée, le cabinet Sémaphores (mal nommé) nous ayant fort peu éclairés.

C’est ainsi que nous avons lu avec stupéfaction page 9 du document – que nous rechignions à qualifier d’«étude » - le calcul ci-après (figure 1). Les chiffres du chantier étant évalués à 4200 emplois par an pendant 3 ans, il s’ensuivait ce résultat incroyable de : 4200 × 3 = 12 600 emplois. En effet d'après les auteurs (non cités), quand on occupe un emploi pendant 3 ans, cela représente 3 emplois ! Une absurdité qui n'avait été dénoncée par aucun acteur du territoire en dehors de notre Collectif, mais qui n’avait pas échappé à Mediapart [8] … Sans doute M. Dalstein, directeur de la société Alliages et Territoires [9] qui présentait inlassablement ces données dans les différentes réunions du débat public, formé en tant qu’ingénieur au maniement d’équations complexes, n’avait pas repéré une erreur de niveau cours élémentaire.

Figure 1

Figure 1

Pire encore, un petit encadré en grisé à la page 10 du dossier Sémaphores, sous le titre « mise à jour des données » (Figure 2), évoquait un allongement de la durée du chantier à 4,5 ans (à nouveau sans aucune justification, alors que le chantier de Disneyland en avait duré 3, pour une surface 4 fois supérieure), d’où un total prétendument réactualisé de 18 820 « personnes », apparemment confondues avec des emplois !! À noter toutefois qu’au cours du débat public, ce chiffre abracadabrantesque n’a jamais été cité par le maître d’ouvrage et est tombé en désuétude, sans doute en raison de son invraisemblance notoire.

Figure 2

Figure 2

Autre motif d’effarement : dans le tableau récapitulatif de la page 12 (fig. 3), nous avons découvert que le cabinet Sémaphores - sans crainte du ridicule, alors que notre Collectif avait dénoncé cette absurdité 4 ans plus tôt - avait reconduit l’addition aberrante des chiffres des phases chantier et exploitation, inscrivant un effectif global de : 24 380 emplois. A ce nombre s’ajoutaient 12 075 emplois induits, notion abandonnée depuis belle lurette par la plupart des bureaux d’études sérieux [10]. D’où un nombre total « d’emplois mobilisés sur le territoire » évalués à 36 455. Nous avions enfin débusqué l’origine de l’inflation des « 40 000 emplois d’Europacity » cités alors par la presse et les élus de l’est du Val d’Oise, arrondissant le chiffre au montant supérieur, dans un élan de générosité créant au passage d’un coup de calculette magique [11] 3 500 emplois supplémentaires ! Une ambigüité savamment entretenue entre le nombre d’emplois artificiellement gonflé d’Europacity et la totalité des postes escomptés, en adjoignant ceux du centre d’affaires prévu.

Figure 3

Figure 3

Ainsi, les membres du Conseil Départemental du Val d’Oise, les techniciens de l’EPA Plaine de France et d’Immochan ont continué à répéter à l’envi les calculs d’apothicaire de Sémaphores, jusqu’à ce que, ENFIN, en juin 2016, la CNDP ait commandé un dire d’expert indépendant sur cette question brûlante du nombre d’emplois générés par Europacity. Nous reviendrons sur cette « Analyse des impacts du projet EuropaCity en termes d'emplois » effectuée par M. Arnaud Degorre [12].

Multiplication miraculeuse d’emplois sur le chantier

En 2012, notre Collectif ignorait l’origine des comptes fantastiques des 12 600 emplois du chantier d’Europacity. Mais par chance, j’avais jadis participé à une mission d’étude et de conseil auprès de l’ANPE Ile-de-France (1989-1992) dans le cadre de l’implantation du parc d’attractions EuroDisney [13], qui avait pour objectif de déterminer le nombre de postes et les métiers générés par la phase chantier (durée : 3 ans), puis par la phase d’exploitation, prévue au printemps 1992 [14]. (Constatons au passage que notre étude de 432 pages était 20 fois plus conséquente que celle de Sémaphores). En ce qui concernait le programme « construction », notre référence en 1990 en matière de grands chantiers était Eurotunnel qui venait de s’achever, le plus grand ouvrage du XXème siècle, représentant 10  000 emplois. Afin de calculer les besoins d’EuroDisney (d’importance équivalente), nous avions estimé des taux de productivité par analogie à Eurotunnel et détaillé avec la FNB (Fédération Nationale du Bâtiment, devenue aujourd’hui la FFB) les différents corps de métiers nécessaires, en référence à la construction d’autres sites Disney en Californie, en Floride et à Tokyo. Aussi, je savais pertinemment qu’il était impossible d’alléguer pour le chantier d’Europacity - trente ans plus tard - un nombre d’emplois supérieur à Eurotunnel ou EuroDisney, ne serait-ce qu’avec les gains de productivité acquis depuis les années 90, liés à la mécanisation, à l’organisation du travail et à la qualification du personnel, sans commune mesure avec ces chantiers « historiques ». Sans compter des dimensions (EuroDisney, 1940 ha à l’ouverture, contre 80 ha pour Europacity) et un niveau de complexité (Eurotunnel, 55 kms dont 35 sous la mer) largement supérieurs. Pourtant, à aucun moment n’était évoquée par Sémaphores la question des gains de productivité à prévoir d’ici 2024. Alors que l’étude ECODEV du Grand Roissy signalait dès son introduction la nécessité de prendre en compte « la poursuite des gains de productivité (+ 1,5% / an) ».

Cette intuition d’une forte surestimation des emplois m’a ensuite été confirmée par l’analyse des grands chantiers en cours sur le territoire national lors du débat public. Car les effectifs affirmés par Immochan traduisaient une méconnaissance totale du fonctionnement actuel de la filière Construction. En effet, il n’y a en France que 3 ténors du bâtiment en capacité de remporter un marché de l’ampleur d’Europacity : Bouygues, Eiffage et/ou Vinci. Ces grandes entreprises possèdent des salariés permanents qu’elles affectent successivement sur leurs différents sites en fonction de leur planning de travaux et généralement logés sur place. C’est pourquoi les métiers du Bâtiment listés par Sémaphores (page 15) ne représentent aucune signification pour les travailleurs du territoire. Seuls comptent les postes non pourvus par l’entreprise qui conduit le chantier.

Ainsi, prétendre que les emplois générés par la construction d’Europacity constituent une opportunité pour la main-d’œuvre locale est une affirmation totalement fallacieuse. D’autant plus que fin 2015, l’activité du BTP traversait une phase de récession (la Fédération Française du Bâtiment déclarait cette année-là une baisse de 3% de son activité et le licenciement de 42 000 salariés), ce qui poussait bien évidemment les entreprises à conserver en priorité leur personnel permanent et à ne pas renouveler les contrats temporaires, réduisant d’autant les chances d’embauche d’actifs locaux. Rien n’empêche non plus l’entreprise - en l’absence d’une législation européenne rigoureuse dont la mise en place se fait attendre - de contractualiser avec des agences d’intérim étrangères ou des filiales d’Europe de l’Est par exemple, pour faire venir des travailleurs détachés.

Autre point : les activités à effectuer ne dépassent généralement pas quelques mois. Les différents corps de métiers ne travaillent pas toute la durée d’un chantier, mais se succèdent. D’abord les terrassements, ensuite le gros-œuvre et la structure, après le clos et le couvert, puis les corps d’état techniques (électriciens, plombiers)… puis vient le temps des finitions (peintres, carreleur, solier, serrurier)… A titre d’exemple, la construction du centre commercial Le Millénaire (50 000 m2, Aubervilliers) a enregistré une moyenne de 250 travailleurs sur le site, avec une pointe de 700 salariés présents ensemble. De même, pour le chantier du nouveau Ministère de la Défense boulevard Victor à Paris, 13 000 travailleurs se sont succédé en 3 ans, dont 2500 simultanément, réduisant à 7 mois la durée moyenne d’un emploi [15].

Au cours du débat public, l’erreur grossière de la multiplication par 3 des chiffres du chantier a miraculeusement disparu des déclarations du maître d'ouvrage. Mais Auchan a continué à affirmer 4200 postes pour la construction de son mégaprojet. L’étude « dire d’expert » commandée par la CNDP effectuée par M. Degorre, a réduit ces effectifs à 3350 emplois. Si on appliquait à ce total une durée moyenne d’activité de 7 mois, nous obtiendrions 1950 emplois ETP, maintenus pendant 3 ans. Pourtant les partisans d’Europacity s’entêtent encore aujourd’hui à brandir le chiffre de 4200. Mais surtout, il convient d’identifier sur ce total révisé la part dédiée aux travailleurs locaux. Nous reviendrons sur cette question.

En France en 2016, un seul grand chantier dépassait 4 000 emplois. Il s’agissait de la construction sous l’égide de Vinci de la LGV Bordeaux-Tours « Sud Europe Atlantique » d’une dimension sans précédent : 350 kms, 117 communes concernées, 400 ouvrages d’art dont 19 viaducs, 1,1 million de traverses en béton… Des travaux qui ont mobilisé 4500 salariés directs, dont 3200 personnels permanents et 1300 agents recrutés le long du parcours, dont 400 en insertion. De même, l’EPR de Flamanville qui couvre 120 ha, représentant 300 000 m3 de béton, 500 000 m3 de coffrage, 40 000 tonnes d’acier… n’a mobilisé que 3000 salariés dont 2000 permanents de l’entreprise Bouygues. En 2011, 500 demandeurs d’emplois locaux ont été embauchés après une formation financée par la région Basse-Normandie. Mais malgré l’organisation par Pôle Emploi d’un « bus de l’emploi » qui a drainé plusieurs centaines de candidats, le maître d’œuvre a préféré recruter un millier de travailleurs déplacés (roumains, bulgares, italiens, espagnols) en utilisant notamment les services de la société intérimaire aujourd’hui disparue Atlanco, déclarée à Dublin et établissant des contrats de travail par une filiale chypriote… Cette affaire qui a défrayé la chronique, a fait l’objet d’un jugement particulièrement laxiste [16], propre à encourager les pratiques de patrons peu scrupuleux.

Autre promesse non tenue : le tunnel du Lyon-Turin dont les annonces se sont envolées… jusqu’à 30 000 emplois. Pourtant, fin mars 2016, le chantier n'employait que 700 personnes (sous-traitants et intérimaires compris), tellement le taux de mécanisation est élevé [17]. Sans compter les incertitudes qui pèsent aujourd’hui sur la poursuite des travaux. À noter le revirement significatif de M. Carenco, alors préfet de la région Ile-de-France, sur la surenchère des emplois escomptés à Europacity. Tout d’abord, dans une vidéo mise en ligne sur notre site [18] qui date du 7 mars 2016, il affichait un mépris total pour les opposants au projet : « ceux qui sont contre… se foutent de l’emploi… ça ne les intéresse pas… ils sont retraités… » [19] Dans un deuxième temps, M. Carenco montrait davantage de circonspection sur les retombées en emplois du métro Grand Paris Express (19 à 20 000 ?) : « Je ne suis pas sûr qu’il en créera beaucoup au début, car les quatre gros chantiers de ligne à grande vitesse se terminent et les entreprises vont rapatrier leurs équipes » [20].

Pour le moment, les tunneliers, très mécanisés, mobilisent pour la construction de ce métro 1500 agents sur le terrain, essentiellement pour la prolongation de la ligne 14, qui accuse déjà deux ans de retard [21]. Au niveau national, la branche Bâtiment a enregistré en 2016 - pour la première fois depuis huit ans - une augmentation d’effectifs, mais fort modeste : 10 000 emplois pour l’ensemble du territoire, dont 4000 intérimaires [22]. Cela ne fait jamais qu’une centaine d’emplois par département, dont 40% à statut précaire. On est loin d’une masse mirifique d’embauches ! Et l’ensemble de la branche française des Travaux Publics avoue une « année blanche » (sans suppressions, ni créations) pour son bilan 2016, espérant une reprise en 2017.

Confusion entre « emplois » et « postes »

Les emplois que fait miroiter Auchan à Europacity constituent en réalité des « postes » de travail. Une partie de ceux-ci (laquelle?) ne représente que des « morceaux d'emplois », qu'il faudrait additionner pour obtenir des « emplois ETP » : équivalent temps plein. Sortir de cette incertitude statistique réduirait sans doute sensiblement les effectifs ETP escomptés… Lors du débat public, notre Collectif a posé la question des ressources humaines réellement mobilisées par les emplois affichés par Immochan : quelle était la part de temps partiels, de postes saisonniers ? Il nous a été affirmé que l’ensemble des emplois avait été calculé par le cabinet Sémaphores en ETP [23]. Qu’il nous soit permis de douter d’une réponse aussi globale ! A nouveau, nous nous situons dans du « déclaratif », des affirmations sans preuve, démenties par les pratiques des entreprises positionnées dans certaines filières (Commerces de détail en grandes surfaces ; activités de Tourisme-Loisirs…)

En France, en effet, la grande distribution est une championne de l’emploi à temps partiel, notamment féminin. D’après une étude de la DARES [24] la répartition de la durée du travail dans ces entreprises est la suivante :

  • 25% des salariés ont une durée hebdomadaire courte (moins de 24 h par semaine), répartie sur un nombre de jours restreint (moins de 5 jours) ;
  • 7% ont une durée hebdomadaire courte (moins de 24 h par semaine), étalée sur un grand nombre de jours (5 jours ou plus) ;
  • 12% travaillent moins de 5 jours et 24 h par semaine ou plus ;
  • 56% cinq jours ou plus, avec une durée hebdomadaire longue (24 h ou plus par semaine).

La forte proportion de ce qu’on appelle les « temps partiels longs » s’étalant sur au moins 5 jours traduit l’importance d'une flexibilité imposée au personnel. Un mode d'organisation qui permet de répondre à des pics d'activité quotidiens (heures de pointe) et à l'amplitude hebdomadaire, renforcée encore par la nouvelle législation sur le travail du dimanche. Travailler peu sur une grande amplitude de jours représente la forme de temps partiel la plus « subie » par les salariés, avec de longs moments d’absence du domicile et leurs effets collatéraux (problèmes de garde d’enfants, mais aussi insuffisance d’offre de transports en période creuse, impossibilité d’accès aux services locaux…), tout en ayant peu d’heures effectivement travaillées et donc payées.

Par ailleurs, les parcs de loisirs français sont soumis à une forte saisonnalité, ce qui incite une grande partie d’entre eux à cesser leur activité durant l’hiver. Le parc d’attraction Astérix (n°3 français), ouvre 7 mois, du 1er avril au 15 novembre. Avec 220 permanents, il recrute 1000 personnes chaque année, soit un taux de saisonnalité de 82 %. Le Puy du Fou - au deuxième rang national derrière Disneyland – est en activité d’avril à septembre inclus. Il fonctionne avec 150 salariés permanents pour un effectif total de 1800 personnes, soit un taux de saisonnalité de 92%. Et chaque année, Disneyland organise une grande campagne de recrutement, la dernière en octobre 2016 [25] : 8000 postes à pourvoir d’ici mars 2017, dont probablement un millier en CDI comme dans le casting de l’année précédente. Ce qui traduit bien le fort turnover du personnel, renouvelé chaque année à 53% et aussi l’importance des flux de CDD, dont la majorité pour 4 mois en période d'été.

Prétendre que les emplois estimés d’Europacity seraient tous à temps plein, alors que 30% de ceux de la grande distribution sont à temps partiel, et que la saisonnalité des emplois des trois plus grands parcs d’attraction français varie de 53% à 92% n’est pas sérieux. Cette question a été totalement occultée par le cabinet Sémaphores. Mais aussi par l’expert M. Degorre choisi par la CNDP pour émettre un avis indépendant sur les effectifs générés par Europacity. Si nous appliquons les moyennes observées plus haut (hypothèse basse : Disney) aux effectifs indiqués par ce dernier, nous serions conduits à réduire les emplois de commerce à 3300 ETP et ceux de loisirs à 650 ETP.

Quelle corrélation entre investissements et nombre d’emplois ?

Dernière incertitude sur le nombre d’emplois escomptés : la méthode de calcul utilisée pour estimer les effectifs par catégorie. Pour mesurer l’emploi direct en effet, le bureau d’études Sémaphores s’est basé sur les investissements annoncés par Immochan et les a convertis en emplois, en s’appuyant sur des ratios d’investissements par emplois issus de l’Enquête Annuelle des Entreprises (EAE) de l’INSEE. Ici encore, sont utilisées des données anciennes (2009) pour un chantier censé démarrer en 2019 et une ouverture du centre en 2024, respectivement 10 et 15 ans plus tard. Sans aucune réactualisation, démentant l’annonce indiquée en page de couverture « mise à jour 2015 ».

Généralement, les études prospectives sur l’emploi identifient les différents volumes d’activités prévus et les déclinent ensuite en catégories d’emplois et en métiers. C’est la procédure utilisée par l’étude ECODEV, qui a interrogé les différents syndicats professionnels de branche et un certain nombre d’entreprises présentes sur le bassin de Roissy. Cette double approche - macro-économique par filières, et locale appuyée sur des exemples existants - permet une identification fine des besoins, mis en regard ensuite avec des statistiques émanant de l’UNEDIC, de Pôle Emploi et du Ministère du Travail (DARES, CEREQ, CEE… ) et bien entendu de l’INSEE. En quarante ans de carrière, je n’ai jamais observé une corrélation scientifiquement prouvée entre les investissements mobilisés par un projet et son nombre d’emplois. Je dirais même que plus l’investissement est lourd, plus les entreprises sont mécanisées (cf. les tunneliers du métro express) et moins elles génèrent d’emplois. Par exemple, le chantier de l’EPR de Flamanville représente plus de 10 milliards/€ pour 3000 emplois. Et le tunnel Lyon-Turin pourrait coûter 26 à 30 milliards/€… pour 3000 emplois, dernier chiffre évoqué par Louis Besson, ancien maire de Chambéry, un des plus ardents défenseurs du projet.

Curieusement, dans l’expertise indépendante commandée par la CNDP, M. Degorre a reconduit cette méthode macro-économique, en la tempérant, mais sans la refuser. Ce qui aboutit au chiffre de 10 115 emplois, qui est maintenant repris par l’équipe de La Belle Étoile, le nouvel intitulé du maître d’ouvrage porteur d’Europacity. 

Nous n’entrerons pas davantage dans ces querelles de chiffres. Car il ne faudrait pas que la bataille sur le nombre d’emplois fasse oublier l’enjeu essentiel du débat. Quand bien même ce projet générerait des milliers d’emplois, nous sommes en mesure de prouver qu’ils ne seraient guère utiles au territoire. Un point essentiel qui est systématiquement évacué. Les discussions sans fin sur les hypothèses du nombre de postes effectivement créés constituant un écran de fumée, qui permet d’éclipser la question centrale : quelle proportion - sur le total de ces emplois – serait attribuée à la main-d’œuvre locale ?

C’est ce que nous examinerons dans la deuxième partie de ce chapitre : l’UTILITE LOCALE DES EMPLOIS d’EUROPACITY.

[1] Le nom officiel « EuropaCity » avec deux majuscules semblerait indiquer qu’il s’agit d’une ville. Impossible : le site est interdit à l’habitat, frappé de servitudes liées à la proximité de l’aéroport de Roissy. C’est pourquoi, refusant le terme usurpé de « ville », « city » est volontairement écrit en minuscules.

[2] Le groupe Auchan, spécialiste de ce qu’un doux euphémisme appelle « optimisation fiscale » a récemment remplacé la société maître d’ouvrage d’Europacity « Alliages et Territoires » par une nouvelle structure « La Belle Etoile » pour des raisons inexpliquées, société elle-même filiale d’Immochan, à son tour filiale immobilière d’Auchan. Dans un système de « poupées russes » à emboîtements successifs contribuant à son opacité. D’où le surnom donné parfois à Europacity : Eur- Opacity.

[3] www.nonaeuropacity.com

[4] Estimation quantitative et qualitative des nouveaux emplois futurs, du Grand Roissy au pôle métropolitain du Bourget, ECODEV-CONSEIL, 1992, consultable sur le site www.plainedefrance.fr

[5] Ce qui n’a d’ailleurs pas empêché ensuite les promoteurs du projet de désigner ces chiffres par le terme usurpé « d’emplois estimés par ECODEV ». Jugeait-on que ce cabinet-conseil constituait une meilleure caution scientifique que celle de Sémaphores ?

[6] Ce document fortement décrié est consultable sur www.debatpublic.fr/projet-europacity in « documents du porteur de projet ».

[7] Nous ignorons si les émoluments versés aux auteurs ont été négociés aussi généreusement.

[8] Cf. le communiqué de presse du CPTG, dont la date est bien trouvée : 1er avril 2016. Ces méthodes statistiques douteuses ont été dénoncées dans un article de Jade Lindgaard, Le projet Europacity, un mirage aux emplois, 12 avril 2016, Mediapart.

[9] Il a été remercié depuis. Et nous notons que M. Lebon, n° 2 de la société, parle désormais de 10 000 emplois (phase d’exploitation).

[10] L’étude ECODEV de 2012 précisait en introduction que les emplois induits étaient « non intégrés dans la démarche car non identifiables et très diffus ». En effet, la méthode de calcul qui consiste à affecter une partie des revenus des salariés de l’entreprise à des consommations effectuées exclusivement sur le lieu d’habitat des travailleurs, traduites ensuite en équivalents-emplois repose sur un cumul d’hypothèses tout à fait discutables.

[11] Expression de Jade Lindgaard, op. cit., note 8.

[12] Arnaud Degorre, Analyse des impacts du projet Europacity en termes d’emplois, expertise complémentaire présentée à Aulnay-sous-bois, le 16 Juin 2016, consultable sur le site de la CNDP.

[13] Dénommé aujourd’hui Disneyland-Paris.

[14] EuroDisneyland, bilan prévisionnel de l'emploi, J.L. Husson, J. Lorthiois, J. Buzy. Commanditaires : ANPE et Conseil Régional d'Ile-de-France 4 volumes, 432 pages, 1990.

- volume 1: synthèse critique des données disponibles

- volume 2: phase chantier: emploi et besoins de formation

- volume 3: les métiers de la phase Parc de Loisirs

- volume 4: annexes - comptes-rendus d'enquêtes

[15] On observe avec cet exemple que la confusion entre les « emplois » ETP effectivement occupés… et les « personnes » qui défilent sur un chantier permet de passer d’un chiffre de 2500 emplois ETP maintenus pendant 3 ans à 13 000… Se reporter à la figure 2 de la page 3.

[16] En mars 2017, Bouygues a été condamné à 29 950 € d’amende pour 460 salariés polonais et roumains détachés par Atlanco en 2009-2011. L’amende inférieure à 30 000 € permet à l’entreprise de conserver l’accès aux marchés publics. La CGT estime le préjudice d’ensemble pour l’URSSAF à plus de 11 millions d’euros.

[17] www.lelanceur.fr/emploi-le-lyon-turin-ne-tiendra-pas-ses-promesses/

[18] « Grand Paris : quand J. F. Carenco fait un déni de démocratie », in www.nonaeuropacity.com

[19] Au risque de le contredire, notre Collectif est composé à 56% d’administrateurs en activité.

[20] Sibylle Vincendon, « Grand Paris Express : premiers chantiers, premiers milliards », in Libération du 20 janvier 2017.

[21] Rappelons que la mise en service de l’actuelle ligne 14, prévue initialement pour la coupe du monde de football de 1998, a été inaugurée par Jacques Chirac… un an plus tard.

[22] En 2008, les effectifs de la branche Bâtiment représentaient 323 000 personnes ; 218 400 en 2015 ; une légère remontée en 2016 : 228 000, soit une perte de 30% des emplois en 8 ans.

[23] Un exemple le 12 avril à une réunion du débat public. A une interrogation de la présidente Mme Brévan, à propos du personnel hôtelier, M. Arlandis, du cabinet Sémaphores, répond : « ce sont des données en personnes, en ETP, en équivalent-temps-plein ». Nous sommes en pleine confusion, puisque les « personnes » sont assimilées à des « emplois ETP », alors que les personnes occupent des « postes » d’une durée variable. Et que c’est en additionnant ces postes « plus ou moins entiers » qu’on obtient le nombre d’emplois ETP !

[24] DARES Analyses, Le temps partiel en 2011, Janvier 2013.

[25] Le Parisien, 29 octobre 2016.

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7 juin 2017 3 07 /06 /juin /2017 12:02

Un premier recours pour « carence fautive de l’État » doit être déposé mercredi devant le tribunal administratif de Paris. D’autres devraient suivre dans plusieurs régions. Par Stéphane Mandard le 7 juin 2017 pour Le Monde. Lire aussi Chiche, on attaque en justice la Commission européenne ?, La pollution de l'air, troisième cause de mortalité en France, La France désarmée face à la plus grave pollution de l’air depuis 10 ans et Paris annonce la création d’un observatoire mondial de la pollution de l’air, mais aussi les premières plaintes en 2015 2,3 millions de Franciliens respirent un air trop pollué, ou  Vivre près des axes routiers accroît le risque de démence et Qualité de l'air : l'ultime coup de semonce de l'Europe à la France.

Clotilde Nonnez, professeure de yoga, pratique la chandelle pour désencombrer ses bronches, chez elle, à Paris le 2 juin. AGNES DHERBEYS POUR LE MONDE

Clotilde Nonnez, professeure de yoga, pratique la chandelle pour désencombrer ses bronches, chez elle, à Paris le 2 juin. AGNES DHERBEYS POUR LE MONDE

Chaque matin, c’est le même rituel. Lorsqu’elle se lève, Clotilde Nonnez lance fébrilement l’application Airparif sur son smartphone pour découvrir l’indice de pollution de la journée. Puis elle prend deux grandes bouffées d’Innovair 200, un comprimé de Singulair, un sachet d’Exomuc et se lance dans quelques exercices de respiration et de méditation. « Si je ne faisais pas de yoga, je vivrais depuis longtemps sous assistance respiratoire », dit-elle.

Elle souffre de problèmes respiratoires qui se transforment en cauchemar à chaque pic de pollution. Lors du dernier épisode de décembre 2016, elle a bien cru qu’elle allait « y laisser [sa] peau ».

Alors, cette Parisienne de 56 ans, qui donne des cours de hatha yoga, a décidé de réagir. Et de demander des comptes à l’État. Mercredi 7 juin, son avocat, François Lafforgue, doit déposer une requête devant le tribunal administratif de Paris pour « carence fautive ». Une première.

« Nous engageons la responsabilité de l’État, car nous considérons que les déboires médicaux subis par les victimes de la pollution sont le résultat de l’inaction des autorités administratives contre la pollution de l’air, qui cause chaque année 48 000 morts prématurées en France », explique François Lafforgue. L’avocat, qui s’est forgé une solide réputation dans les dossiers de santé publique (AZF, amiante, Monsanto), assure qu’une vingtaine de recours, au total, sont prêts à être déposés dans les prochaines semaines auprès de tribunaux des agglomérations de Paris, de Lyon, de Lille et dans la vallée de l’Arve (Haute-Savoie).

« Des gens meurent tous les jours »

Le cas de Clotilde Nonnez, s’il est emblématique, n’est pas isolé. L’association Respire, qui l’accompagne dans sa démarche avec Écologie sans frontière (ESF) et Générations futures, a recueilli près de 600 témoignages, en trois ans, de personnes souffrant de la mauvaise qualité de l’air. « Les victimes de la pollution de l’air sont comme la pollution : invisibles, résume Olivier Blond, le président de Respire. On est un peu comme dans la situation de la Gay Pride il y a vingt-cinq ans, des gens meurent tous les jours et tout le monde s’en fout. On veut les rendre visibles. »

Et comme « rien d’autre ne marche pour faire bouger les décideurs », ils ont convaincu Clotilde Nonnez de se retourner contre l’État. « Jusqu’à maintenant, il nous a toujours manqué le lien de causalité avec les victimes, explique Franck Laval dont la plainte – avec son association ESF – pour mise en danger d’autrui lors du pic de pollution de 2014, déjà avec Me Lafforgue, avait été classée sans suite après l’ouverture d’une enquête préliminaire. Mais là, le dossier est solide judiciairement. »

Que dit précisément le dossier de Clotilde Nonnez ? Que cette ancienne danseuse du Crazy Horse aux yeux bleu délavé a commencé à développer, trois ans après son arrivée en 1979 dans la capitale depuis sa Bretagne natale, des pathologies respiratoires (asthme et bronchites chroniques). Qu’elle a enchaîné les traitements lourds à base de corticoïdes, d’antibiotiques, d’injections, de kinésithérapie respiratoire et autres cures thermales. Qu’elle a multiplié les séjours à l’hôpital (« une dizaine, souvent au moins dix jours ») pour des pneumopathies à répétition, des sinusites, des otites et une pleurésie.

Clothilde Nonnez, chez elle à Paris le 2 juin. Elle souffre de problèmes respiratoires qui s’accentuent à chaque pic de pollution. AGNES DHERBEYS POUR LE MONDE

Clothilde Nonnez, chez elle à Paris le 2 juin. Elle souffre de problèmes respiratoires qui s’accentuent à chaque pic de pollution. AGNES DHERBEYS POUR LE MONDE

« Vous auriez pu faire un arrêt cardiaque »

La dernière hospitalisation remonte à l’hiver 2016. Dans la nuit 5 au 6 décembre, alors que l’Ile-de-France vient de passer en état d’alerte pollution (les taux de particules fines PM10 ayant atteint 104 µg/m³, soit deux fois le seuil limite), Clotilde Nonnez est victime d’un malaise associé à une crise d’insuffisance respiratoire aiguë.

Les bouffées de Ventoline et d’Innovair ne la calment pas. Prise de douleurs thoraciques, elle est emmenée par son compagnon aux urgences à l’hôpital Cochin, où on lui diagnostique une infection virale. Le lendemain, elle consulte son médecin traitant qui fait immédiatement « un lien direct avec l’épisode de pollution », comme elle l’écrit sur le certificat que Clotilde Nonnez a soigneusement conservé.

Malgré la prise de cortisone et d’antibiotique, la douleur se fait plus intense. La professeur de yoga n’est plus en mesure d’assurer ses cours. Elle prend rendez-vous le 13 décembre chez son pneumologue. « J’avais mal au cœur, c’était à hurler », raconte Clotilde Nonnez, qui croise alors son cardiologue qui lui fait passer aussitôt un scanner. « Vous avez beaucoup de chance, car depuis huit jours, vous auriez pu faire un arrêt cardiaque à tout moment », lui lance le médecin, qui diagnostique une péricardite avec un épanchement important. « J’avais de l’eau autour du cœur, c’est pour ça que j’étais totalement épuisée », traduit Clotilde Nonnez pour qui le jargon médical n’a plus de secret.

Pour soigner sa péricardite, la Parisienne, qui vit dans le 5e arrondissement, a dû ajouter pendant cinq mois à son traitement de fond quotidien des prises de Colchicine, trois séances de kinésithérapie respiratoire par semaine et un antibiotique (l’azithromycine) pour prévenir les infections bronchiques, qu’elle devra sans doute garder à vie.

« Quitter Paris pour ne pas y laisser ma peau »

Mais aujourd’hui, Clotilde Nonnez n’a pas retrouvé ses capacités d’avant le pic de pollution et a dû réduire ses cours de yoga. « Il n’y a pas un jour où je suis bien, confie-t-elle sans pouvoir contenir les crépitements qui montent de ses poumons et l’obligent à cracher régulièrement dans un mouchoir. Le week-end de l’Ascension, il y avait de la pollution à l’ozone à Paris, personne n’en parlait, mais moi je peux vous dire que j’en ai encore pleuré. »

Elle qui ne supporte plus la cortisone et les séances de kiné a dû se lever en pleine nuit pour faire la chandelle contre le mur, tête en bas, afin d’essayer d’évacuer ce qui l’encombre, raconte-t-elle en joignant le geste à la parole.

« Je vieillis… Un jour, je ne pourrai plus faire tout ça, et je serai obligée de quitter Paris pour ne pas y laisser ma peau, dit Clotilde Nonnez, qui a conservé son port de danseuse. Mais mon avocat m’explique que ce n’est pas à moi de partir, mais à l’État de payer. »

François Lafforgue, dont la première demande d’indemnisation, le 28 février, auprès du ministère de l’environnement et du préfet de Paris, est restée lettre morte, attend aujourd’hui du tribunal administratif qu’il « déclare l’État responsable du préjudice subi » par sa cliente et le condamne au paiement de 140 000 euros.

La France mise en demeure par Bruxelles

Dans le cas du pic de pollution de décembre 2016, qui a duré quasiment un mois, l’avocat reproche notamment aux services de l’État de ne pas avoir pris les mesures efficaces comme l’interdiction d’utiliser du bois en chauffage individuel d’appoint ou d’avoir attendu une semaine avant de décider la circulation alternée et de ne pas l’avoir maintenue.

Des « carences fautives de l’État » au regard du droit national (le code de l’environnement reconnaît à chacun le « droit à respirer un air qui ne nuise pas à santé ») et du droit européen (la France fait l’objet d’une mise en demeure de Bruxelles pour dépassement des valeurs limites des particules fines et de dioxyde d’azote, particulièrement en Ile-de-France).

« Ce combat, c’est pour améliorer notre air à tous, dit simplement Clotilde Nonnez, qui confie avoir de plus en plus de « problèmes déontologiques : je passe ma vie à expliquer aux gens comment respirer… un air pollué ».

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23 mai 2017 2 23 /05 /mai /2017 18:33

Porté par Auchan et un investisseur chinois, soutenu par la région Ile-de-France et l’Etat, ce projet consommerait quelque 700 hectares de terres agricoles. Par Rémi Barroux, envoyé spécial à Gonesse (Val d’Oise) le 22 mai 2017 pour Le Monde. Lire aussi EuropaCity : une étude remet en cause la création des 11 500 emplois promis, Europacity : le débat public se conclut sur des positions inconciliables, EuropaCity, l'hyperconsumérisme en débat et Le Bêtisier d'Europacity, chapitre 1 : Images d'Épinal.    

Notre candidat-député écologiste Dominique BUSSON était là !

Mobilisation contre le megaprojet Europacity dans le Val d’Oise
À Gonesse (Val-d'Oise), dimanche 21 mai 2017, un millier de manifestants protestent contre le projet Europa City, visant à implanter un méga centre commercial et des activités de loisirs dans le triangle de Gonesse. Photo : R. Bx.

À Gonesse (Val-d'Oise), dimanche 21 mai 2017, un millier de manifestants protestent contre le projet Europa City, visant à implanter un méga centre commercial et des activités de loisirs dans le triangle de Gonesse. Photo : R. Bx.

Aux cris de « des radis, pas des caddies » ou « des patates et des radis, non à Europa City », des centaines de personnes ont manifesté, dimanche 21 mai, jusque dans le centre-ville de Gonesse (Val d’Oise) pour clamer leur refus d’un projet d’hypercentre commercial promu par le groupe de grande distribution Auchan.

Organisée par le Collectif pour le triangle de Gonesse (CPTG), la manifestation, qui s’est déroulée dans une ambiance bon enfant et sous un soleil de plomb, était soutenue par de nombreuses organisations, dont France nature environnement (FNE), Les Amis de la terre, la Confédération paysanne, Solidaires, la CGT d’Ile-de-France ou encore Attac, Biocoop et le réseau d’Amap. Venus en car de Nantes, les opposants au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ont aussi marqué leur solidarité contre un autre « projet d’artificialisation de terres agricoles ».

« Les similitudes sont nombreuses entre nos combats, explique Julien Durand, l’une des figures historiques de l’Association citoyenne intercommunale des populations concernées par le projet d’aéroport (Acipa). Les décisions sont prises par des grands groupes financiers, Vinci chez nous, Auchan ici. » Pour entretenir ces liens de solidarité, le CPTG et la lutte de Gonesse seront les invités d’honneur du rassemblement annuel qui se tiendra sur la « zone à défendre » (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes, les 8 et 9 juillet.

3 décharges, 2 aéroports et 2 autoroutes

Dans le triangle de Gonesse, l’enjeu n’est pas un aéroport. Celui-ci est déjà construit, à Roissy et les avions survolent sans relâche la zone. « Nous avons trois décharges, deux aéroports et deux autoroutes sur notre petit territoire, ça suffit, il faut s’opposer à ce projet nuisible et très coûteux », tonne dans la sono le président du CPTG, Bernard Loup. Ce projet devrait bénéficier d’« un milliard d’euros de financement public » pour construire une gare, destinée à desservir un centre commercial géant, ainsi qu’un parc d’attractions climatisé. Une piste de ski artificielle a même un temps été envisagée.

Soutenu par l’État et la région Ile-de-France, le projet de 3,1 milliards d’euros est porté par Immochan (filiale d’Auchan) et un investisseur chinois, Dalian Wanda, spécialisé dans l’immobilier et le divertissement. Avant de voir le jour en 2024, il aura consommé 701 hectares de terres agricoles.

Si aucune ZAD ne s’est installée sur ces lieux immenses où pourrait être construite cette vaste zone d’activité commerciale et hôtelière, la guérilla juridique est, elle, bien engagée. En mai 2016, le député européen écologiste Pascal Durand a saisi la Commission des pétitions du Parlement européen pour violation par le projet du Triangle de Gonesse de plusieurs directives européennes, notamment – comme pour Notre-Dame-des-Landes – l’absence d’évaluation globale du caractère cumulatif des différents projets (ZAC, Europa City, Golf de Roissy, ligne 17 du futur métro du Grand Paris Express qui desservirait la gare de Triangle de Gonesse et qui a été déclarée d’utilité publique le 16 février).

Diverses procédures judiciaires

La bataille est aussi menée devant la justice française. Diverses procédures sont en cours, dont le recours, déposé en novembre 2016, contre l’arrêté préfectoral de création de la ZAC devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, contre la déclaration d’utilité publique ou, bientôt, contre le futur Plan local d’urbanisme (PLU).

Certains écriteaux, dans la manifestation, apostrophent le nouveau ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot. « Hulot, au boulot », peut-on notamment lire. « S’il fait vraiment la transition écologique, nul doute qu’il s’opposera à ce projet comme à toutes les privatisations de l’espace collectif, ces disparitions de terres agricoles », espère Annie Lahmer, conseillère régionale d’Europe Écologie Les-Verts (EELV).

Dimanche 21 mai 2017, à Gonesse (Val-d'Oise), des manifestants espèrent que le nouveau ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, mettra fin au projet d'Europa City. Photo : R. Bx.

Dimanche 21 mai 2017, à Gonesse (Val-d'Oise), des manifestants espèrent que le nouveau ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, mettra fin au projet d'Europa City. Photo : R. Bx.

Perchée sur son vélo, Aline Vue arbore un tee-shirt vert aux couleurs d’Alternatiba. La jeune femme refuse ce projet qui se fait au détriment d’une agriculture qui serait, selon elle, nécessaire pour nourrir l’Ile-de-France. « Il faut affirmer la résistance fertile pour préserver cette agriculture, plutôt que de construire des lieux où les gens viendront consommer en faisant des trucs débiles », affirme Aline Vue qui, dès le matin de ce dimanche ensoleillé, est venue planter symboliquement avec de nombreux enfants sur quelque 1 300 m2. Ce projet mené par le géant Auchan n’est pas le seul du genre.

La militante, normande et employée d’une mairie du Val-de-Marne, était de la lutte de la ferme des Bouillons qui, près de Rouen et depuis 2012, a lutté contre un autre projet d’Immochan. « Plusieurs collectifs anti-Auchan existent et se coordonnent contre ces projets inutiles et nuisibles, explique Aline Vue. À Cavaillon [Vaucluse], ce sont 45 ha visés, ou encore près d’Orléans, à Saint-Jean-de-Bray, le projet de village Oxylane de Décathlon [cette marque appartient, comme Auchan et de nombreuses enseignes, Kiabi, Saint-Maclou… à la famille Mulliez] », dénonce la jeune militante.

Agitant un drapeau aux couleurs de la CGT, Philippe (qui a préféré taire son nom), salarié de Servair, sur la plate-forme aéroportuaire de Roissy, déplore aussi ce projet nuisible à l’emploi et à l’environnement. « Les autres centres commerciaux qui existent dans le coin vont être menacés, les commerces de centre-ville vont être détruits par cette nouvelle concurrence et le climat, lui, va en prendre un coup avec de massives émissions de CO2. Tout va être bétonné, pourtant, c’est un joli coin ici », affirme le syndicaliste.

12 500 emplois promis

À Gonesse (Val-d'Oise), dimanche 21 mai 2017, contre le projet d'Auchan qui consommerait des centaines d'hectares de terres agricoles. Photo : R. Bx

À Gonesse (Val-d'Oise), dimanche 21 mai 2017, contre le projet d'Auchan qui consommerait des centaines d'hectares de terres agricoles. Photo : R. Bx

Pas convaincu par les « 12 500 emplois directs » promis par les porteurs du projet, Philippe espère que la mobilisation va s’amplifier. Car les centaines de personnes, un succès pour les organisateurs, témoignent d’une mobilisation encore faible. « A Notre-Dame-des-Landes, il y a des agriculteurs qui résident sur les terres où doit être construit l’aéroport, alors qu’ici, ce ne sont que des terres agricoles, il n’y a pas de maisons expulsées. Ceux qui habitent ici ne sont même pas au courant de ce qui se prépare », explique Jean-Yves Souben, vice-président du CPTG.

Pour contrer ce dossier vieux de cinq ans, les opposants ont conçu une alternative, le projet Carma, soit coopération pour une ambition rurale et métropolitaine agricole. « Nous voulons remettre une agriculture durable au centre, avec un pôle de production, de l’agroforesterie, un pôle de transformation et une conserverie, un pôle consommateur avec, par exemple, les cantines des lycées, et un dernier pôle de retraitement des déchets qui serviront à produire de l’humus qui ira sur les terres », développe Robert Levesque, un ingénieur agronome. Ce projet devrait être présenté le 4 juin à la ville de Paris, qui détient une partie des terres de ce triangle de Gonesse.

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20 mai 2017 6 20 /05 /mai /2017 09:32

Trois entreprises ont comparu pour avoir déversé 31 000 tonnes de mâchefer en Seine-et-Marne. Par Patricia Jolly le 18 mai 2017 pour Le Monde.

C’est Gomorra en Île-de-France ! si proche de la mafia italienne qui se nourrit de trafics de déchets… A mettre évidemment en relation avec notre lutte locale contre l’incinérateur prévu à Romainville, et donc, avec le tri sélectif en particulier des bio-déchets, et l’autonomie de notre territoire en matière de traitement de déchets. Lire aussi Incinérateur d’Ivry : un grand projet inutile et polluant aux portes de Paris - rassemblement vendredi 9 décembre, À Romainville contre l’incinération et Que sont ces CSR - Combustibles Solides de Récupération - qu’on veut brûler à Romainville ?.

Séverin Millet

Séverin Millet

Entre le 3 août et le 14 septembre 2012, une noria de camions-bennes chargés de mâchefers est venue troubler l’atmosphère bucolique de Saint-Cyr-sur-Morin. Les habitants de ce village de Seine-et-Marne de 1 966 âmes l’ignoraient encore mais, durant cette période, les poids lourds ont acheminé pas moins de 31 000 tonnes de cette boue grisâtre issue de l’inciné­ration d’ordures ménagères du Val-de-Marne, afin de les enfouir illégalement sur des terrains agricoles de leur commune.

Avant d’être interrompue par les protestations de riverains auprès de la mairie, l’opération avait pour but de faire disparaître fraudu­leusement, à moindres frais et en en tirant un large bénéfice financier, jusqu’à 80 000 tonnes de mâchefers. Lorsqu’ils ne peuvent être recyclés comme matériaux de sous-couches routières, ces déchets non toxiques doivent en effet être transportés aux frais de leur gestionnaire, et stockés dans des installations spécialisées pour un coût de 50 à 70 euros par tonne.

« Poupées russes »

Mardi 16 mai, dans l’affaire de Saint-Cyr-sur-Morin, trois entreprises des secteurs du traitement des déchets et des travaux publics répondaient, devant la 31e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris, de gestion irrégulière de déchets, d’exploitation d’une installation classée pour la protection de l’environnement sans autorisation, de dépôt illégal de déchets et d’infraction aux dispositions du plan local d’urbanisme.

« C’est un système de poupées russes, sauf qu’ici la petite est destinée à cacher la grosse », a résumé le procureur pour décrire le montage réalisé par Remblais Terre Route Groupe Environnement (RTR), l’entreprise de transports Vitrans et Cideme, un centre technique de valorisation de mâchefers qui est une filiale de TIRU, société détenue à 75 % par EDF.

Tout a commencé en juin 2012, lorsque Habib Ben M’Hamed, un proche du clan mafieux Hornec, avec lequel il participait à des affaires d’extorsions, a loué pour le compte de RTR, pour trois ans et contre 1 800 euros mensuels, des parcelles agricoles à des particuliers de Saint-Cyr-sur-Morin. L’homme, mort depuis les faits, ­disait vouloir faire remblayer par la société Vitrans ces terrains en légère déclivité avec 30 000 mètres cubes de « terre inerte sans matière polluante », afin de créer une plate-forme de recyclage et de concassage de déchets de béton.

« Personne n’en voudra »

La mairie qui lui en a accordé l’autorisation ignorait qu’au lieu de terre Vitrans comptait remblayer les terrains avec 31 000 tonnes de mâchefers qu’elle venait d’acheter à Cideme pour 124 000 euros. Les deux entre­prises prétendent qu’il s’agissait de les « valoriser en technique ­routière ». Vitrans a facturé 430 000 euros à Cideme pour le transport des déchets dont la valorisation n’a jamais eu lieu et qui ont transformé les terrains agricoles de Saint-Cyr-sur-Morin en dépôt sauvage.

Des courriels lus à l’audience prouvent que les responsables des deux sociétés étaient informés de la nature illégale du chantier de Saint-Cyr-sur-Morin. Ainsi, un responsable de Cideme écrit à sa supérieure hiérarchique, peu avant le début de l’opération, à propos des encombrants mâchefers : « Personne n’en voudra. La seule planche de salut c’est S. [le responsable de Vitrans ayant joué l’intermédiaire], qui maîtrise certains de ces chantiers… »

Pour approfondir leurs connaissances du marché et des pratiques en vigueur dans le traitement du mâchefer,les gendarmes de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique, chargés de l’enquête, ont interrogé les responsables de plusieurs entreprises concurrentes de Cideme. Tous sont restés pantois devant le tonnage déversé à Saint-Cyr-sur-Morin. « Trente et un mille tonnes, c’est énorme, leur a affirmé l’un d’eux. Ça ne se fait plus, il a peut-être dû y avoir une petite opération financière [à la clé]. » Grâce à ce dispositif clandestin, les entreprises impliquées ont en tout cas échappé à la taxe générale sur les activités polluantes qui, pour la quantité de mâchefers déposée dans le village, aurait dû se monter à plus de 3 millions d’euros.

« Morceaux de pare-chocs »

À la barre, mardi, Edith Theodose, la maire de Saint-Cyr-sur-Morin, ne décolérait pas. Sa commune, partie civile dans le dossier, réclame des dommages et intérêts et souhaite que Cideme la débarrasse de ce dépôt illégal de mâchefers. Celui-ci s’érige aujourd’hui en un surplomb haut de deux mètres au moins sur 12 000 mètres carrés et a été recouvert par un « sarcophage » d’argile de 30 centimètres d’épaisseur sur recommandation de la direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie.

« Ces sociétés viennent délibérément commettre leurs délits dans de petites communes qui n’ont ni service juridique ni police, a déploré l’élue. Chez nous, elles ont creusé un trou de 6 à 8 mètres de profondeur et l’ont rempli jusqu’à ce que les mâchefers surplombent largement la route. Les lapins et la végétation se sont chargés de démonter le sarcophage. Les déchets, gris comme de la cendre, sont aujourd’hui à l’air libre, avec des fourchettes, des cuillères et des morceaux de pare-chocs qui dépassent. »

Le procureur a sorti sa calculatrice. Il a requis 300 000 euros d’amende contre Cideme, 100 000 contre Vitrans. Rien contre RTR, qui est en liquidation judiciaire et présente déjà 3 millions d’euros de créances. Les avocats de la défense, eux, ont plaidé la relaxe. En ce qui concerne le retrait des mâchefers, ces derniers ont assuré qu’il causerait plus de nuisance que sa conservation sur place. Le jugement sera prononcé le 4 juillet.

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16 mars 2017 4 16 /03 /mars /2017 18:02

En 2014, le Premier ministre a voulu affaiblir la loi censée encadrer les loyers. La plus haute juridiction administrative, saisie par Julien Bayou, vient de rendre sa décision. Par Hugo Boursier le 16 mars 2017 pour Politis, à lire intégralement sur www.politis.fr.

Loi Alur : le Conseil d'État confirme un « excès de pouvoir » de Manuel Valls

Le Conseil d’État a mis fin, mercredi 15 mars, au régime d’exception décidé par l’ancien Premier ministre, à propos de l’encadrement des loyers. En août 2014, le socialiste avait décidé que la mise en place de cette disposition serait limitée « à titre expérimental à la ville de Paris ». Cette décision du Premier ministre avait empêché des millions de citoyens d'accéder à des loyers réduits dans les zones dites « tendues », où la demande, largement supérieure à l’offre immobilière, fait grimper les prix. L'institution a jugé qu'il n'appartenait pas au membre du gouvernement de s'opposer à l'application de la loi. Le porte-parole d’EELV a donc mis en ligne une pétition pour que l’encadrement des loyers soit mis en place rapidement par le gouvernement.

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12 février 2017 7 12 /02 /février /2017 10:29

Le comité syndical du SYCTOM (Syndicat Intercommunal de Traitement des Ordures Ménagères de la région parisienne) du vendredi 9 décembre 2016 a décidé de soumettre son projet pour le centre de traitement de Romainville/Bobigny à une concertation. Le garant de cette concertation, prévue pour se dérouler au second semestre 2017, vient d’être nommé par la Commission nationale du débat public. Un article de Francis Redon, président d'Environnement 93, le 2 février 2017 dans le bulletin de liaison de France Nature Environnement-Île-de-France .

Une pseudo-concertation d’ores et déjà rejetée

En 2013, le précédent projet a été abandonné suite à la forte mobilisation citoyenne et suivi par la prise de conscience des dangers du tri-mécanobiologique (TMB) par les élus du Syctom (vote à l’unanimité de l'abandon du projet) et par l’Assemblée Nationale (interdiction de soutien public au TMB).
Suite à cet abandon, le Syctom avait précisé (1) que le nouveau projet serait planifié et élaboré en concertation avec l’ensemble des acteurs du territoire, conscient du débat maintenant nécessaire pour justifier des investissements publics conséquents, compte tenu des enjeux environnementaux. De nombreuses réunions et autres comités de pilotage ont bien eu lieu mais le projet soumis à la concertation à venir n’a jamais été présenté.

Il n’y aura donc pas de débat mais une concertation sur un projet imposé, sur lequel pour l’heure seules des bribes d’informations sont disponibles. Les bases de la concertation décrite sur le site internet du Syctom se résument à : le projet ou rien. De même que pour le projet d’usine d’incinération à Ivry-Paris XIII, le Syctom (2) a déjà posé les préalables de la transformation de l’unité de traitement, sur lesquels il faudrait maintenant débattre et accepter quelques aménagements qui ne pourraient être apportés qu’à la marge.
Le refus du Conseil territorial du 13 décembre 2016 de l’Établissement Public Territorial Est Ensemble (3) de voter une délibération allant dans le sens du projet du Syctom démontre également la non-co-construction de ce projet.

Les incohérences du Syctom

Les projets du Syctom à Ivry Paris-XIII ou Romainville se basent sur un scénario d’évolution de la prévention et du recyclage pour déterminer le dimensionnement des unités de traitement des déchets résiduels.
Ce scénario présenté lors de la concertation sur le projet d’Ivry-Paris XIII, qui vient de se clôturer, est contredit par l’ensemble des associations environnementales d’Ile-de-France. De plus, comme l’a rappelé le rapport de la Commission nationale du débat public, aucune preuve de la compatibilité du projet avec les nouvelles exigences de la Loi Transition Énergétique pour la Croissance Verte (LTECV) n’a été apportée lors de la concertation sur le projet Ivry-Paris XIII.
Pour justifier l’opportunité de ces équipements, le scénario du Syctom est très éloigné des objectifs de la LTECV : dans les huit ans à venir, la prévention des déchets serait minime (inférieure à la période précédente) et le recyclage augmenterait peu (11 % en 2015 à 20 % en 2023). Ce taux de recyclage maintiendra les performances de notre territoire très éloignées de celles des autres agglomérations européennes d’ores et déjà supérieures à 40 %.Voulons-nous réellement lutter contre le réchauffement climatique ? Croyons-nous en nos forces ?

Il est donc maintenant nécessaire que l’EPT Est Ensemble organise enfin le débat, attendu par les habitants et les associations, qui concerne aussi bien les impératifs d’une collecte des déchets, en particulier les biodéchets des ménages et des professionnels, que leur traitement, en prenant en compte les opportunités du territoire incluant le canal de l’Ourcq.

(1) Le président du SYCTOM saluait pourtant le 19 avril 2013 « la mobilisation nouvelle des habitants et des élus du territoire sur la question des déchets ménagers », ainsi que la nouvelle phase de dialogue qui s’ouvrait.
(2) http://www.syctom-paris.fr/installations-et-projets/projets/romainvillebobigny/transformation-du-centre.html
(3) ÉPT Est Ensemble sur lequel est implanté l’actuel centre de transfert de Romainville

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19 décembre 2016 1 19 /12 /décembre /2016 14:12

Un très grand nombre d'erreurs et contre-vérités ont été émises par les promoteurs d'Europacity, temple de la consommation et des loisirs, pour arracher l'autorisation d'implanter ce projet pharaonique sur les excellentes terres agricoles du Triangle de Gonesse, entre les deux aéroports de Roissy et du Bourget. Revue de détail du bêtisier de ce projet, prix Pinocchio "greenwashing" 2012. Par Jacqueline Lorthiois le 18 déc. 2016 pour son blog sur Mediapart.

LE BETISIER D’EUROPA CITY - Chapitre 1 : UN CATALOGUE D’IMAGES D’EPINAL

Pour valider la construction de son projet pharaonique de centre commercial et de loisirs Europacity sur les excellentes terres agricoles du Triangle de Gonesse, Auchan ne recule devant aucun sacrifice pour vanter les mérites du projet qu’il prétend poursuivre à tout prix, quitte à bafouer la vraisemblance la plus élémentaire. Revue de détail sur la fabrication de « l’image » du projet par son entreprise porteuse, Alliages et Territoires, filiale d’Immochan, société immobilière d’Auchan.

Tour Eiffel sur pilotis

Sur la splendide maquette du projet Europacity réalisée par le cabinet d’architecte lauréat BIG, on aperçoit à l'horizon la tour Eiffel, qui se dresse dans toute sa grandeur. Un spectacle de rêve, immortalisé sur sa tablette par une touriste virtuelle.

 

Figure 1, site www.europacity.com

Figure 1, site www.europacity.com

Figure 2, site www.nonaeuropacity.com (@Yann Guillotin)

Figure 2, site www.nonaeuropacity.com (@Yann Guillotin)

Curieusement, l’appareil photo du Collectif pour le Triangle de Gonesse - qui s’oppose au projet Europacity -, emporté sur le site et même perché sur ses pieds, se révèle incapable d’embraser une vue panoramique aussi magnifique. Au réel, la tour Eiffel semble avoir rapetissé de moitié, cachée par une grande barre d’immeuble qui ne révèle que le dernier étage du célèbre monument (fig. 2). Mais rien n'est impossible au groupe Auchan (porté par la famille Mulliez, première fortune de France) grâce à son architecte magicien M. Bjarke Ingels, qui, dans son cahier des charges, a sans doute reçu pour mission de mettre la tour Eiffel sur pilotis, ce qui lui permettrait d’être visible depuis le site, dans toute son entière majesté.

Avions invisibles ou de la taille d’un colibri

Autre merveilleux miracle : le ciel de la maquette du cabinet BIG (fig. 1) est vierge de tout avion, comme si le Triangle de Gonesse s’était transformé en Triangle des Bermudes ! À Europacity semble régner un microclimat idéal : le ciel est perpétuellement d’un magnifique bleu layette, admirablement dégagé à toute heure même de pointe.

Dans ces circonstances, saluons le louable effort d’une once de vérité de l'Etablissement Public d'Aménagement Plaine de France, car un avion figure dans le paysage de l’affiche jointe (fig. 3) produite en 2013, dans le cadre d’une réunion dite de « concertation ». Toutefois l’effort reste mince : l’avion est seul et surtout minuscule, de taille inférieure au petit oiseau qui vole à ses côtés, sous un ravissant petit nuage de beau temps et les rayons d’un beau soleil !

Figure 3, EPA Plaine de France

Figure 3, EPA Plaine de France

Pourtant le site pressenti est bel et bien situé entre deux aéroports d’intense activité : Roissy, au 2e rang européen, 10e mondial avec 1700 avions/jour et Le Bourget 1er aéroport d'affaires d'Europe avec 160 avions/jour. Soit pour Roissy un avion toutes les 90 secondes en journée. À croire que les appareils arrivant à proximité de l’aéroport volent en sous-sol…

Ciel continuellement limpide

Toujours sur la maquette d’architecte de la figure 1, nous observons un ciel sans nuage, d'où l'on admire en permanence cette vue imprenable sur la tour Eiffel vantée plus haut. Pourtant, comme le soulignent nos collègues dans la vidéo « Auchan, c’est méchant »[1] le nombre de jours d’ensoleillement relevé dans la ville voisine de Garges-lès-Gonesse est de 75/an, soit « 290 jours de pluie, brouillard, neige et couverture nuageuse ». Car le Triangle de Gonesse est longé par l'autoroute A1, axe le plus fréquenté de France (220 000 véhicules/jour à Saint-Denis) et enclavé entre deux aéroports, faisant des abords de Roissy la zone la plus polluée de la région après le boulevard périphérique, selon AirParif. D’où l’intérêt de conserver en zone urbanisée des terres agricoles cultivées qui jouent le rôle de « piège à carbone » et de dilution de particules. Mais contrairement à l’ambiance « purée de pois » saisie par la photo prise dans la semaine du 5 au 10 Décembre dernier (fig. 4)… dans le monde merveilleux d’Europacity ne règne apparemment aucun désordre climatique. Le ciel est d’un bleu perpétuel et comme dans le Candide de Voltaire « tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles ».

Figure 4, site RTL, 5-10 décembre 2016

Figure 4, site RTL, 5-10 décembre 2016

Bande-son coupée au montage

Et merveille des merveilles, non seulement on ne voit pas les avions, mais on ne les entend pas non plus, car sur la vidéo de propagande du site Europacity, les visiteurs se promènent dehors et flânent en toute tranquillité. Mieux encore sur l’affiche réalisée par l’EPA Plaine de France (fig. 3), une mère de famille pousse un landau avec un bébé qui semble profondément endormi. La réalité serait sans doute plus prosaïque : il hurlerait de toute la force de ses petits poumons, dérangé sans cesse dans son sommeil par le vrombissement des moteurs. Mais on a coupé la bande son. Pourtant le Triangle de Gonesse localisé sous les pistes de deux aéroports, est frappé par un PEB (Plan d’Exposition au Bruit) qui interdit la construction de logements sur son site. Ce qui n’empêche pas Immochan et les pouvoirs publics de parler abusivement de « quartier » et même de « ville » (fig. 3), alors qu’il ne peut exister de ville sans habitants ! Et qui envisagent sans rire d’y attirer 31 millions de visiteurs annuels, soit la totalité de tous les visiteurs des 300 parcs d’attraction français. Mais rien n’est impossible à la famille Mulliez qui a su obtenir le soutien du président de la République dans le cadre de l’élaboration du Grand Paris.
Soulignons pourtant que les résidents du territoire sont d’autant plus sensibles au bruit que Roissy est le seul grand aéroport qui ne possède pas de couvre-feu nocturne
[2] (à l’inverse d’Orly par ex) avec un avion toutes les 3 minutes entre 22 H et 6 H du matin. Ceci en raison d’un « chantage à l’emploi » de la société américaine FEDEX (soutenue par les élus du Val d’Oise) qui effectue du fret aérien en nocturne et menace de quitter le site, en cas d’interdiction de vols de nuit, supprimant ainsi 3000 emplois. Chiffre surestimé puisque nous apprenons au détour d’un communiqué récent de FEDEX son projet de doubler son trafic, créant ainsi 200 à 400 emplois qui viendraient s’ajouter à… 2500 emplois existants. On mesure au vu de ces chiffres les gains de productivité accomplis par cette société qui avec 100% d’augmentation d’activité, ne génère que 12% d’effectif supplémentaire. Mais apparemment, Fedex serait la seule entreprise qui verrait sa productivité augmenter d'ici 2024. Car les prévisions d’emplois d’Europacity présentées lors du débat public établies en 2009 ne tiennent absolument pas compte de ce critère.

Redorer l'image du territoire

D’après les élus du Val d’Oise, grâce au projet Europacity, le département pourrait se débarrasser de son image de banlieue pauvre qui lui colle aux baskets. Ils rêvent d’un « effet Europacity » comme il y aurait eu un « effet grand stade » à Saint-Denis. C'est oublier que l’équipement en question s'appelle « stade de France » et que c’est ce titre qui prévaut auprès des touristes. De même, Eurodisney a accolé le terme Paris à son nom, se faisant baptiser « Disneyland-Paris ». Personne n’a jamais entendu parler de la commune de Chessy sur laquelle le parc de loisirs est implanté. Croire que la ville de Gonesse bénéficierait d’une célébrité soudaine et deviendrait mondialement connue des touristes étrangers relève d’illusions qui ont toutes les chances d’être aussi perdues que celles de Balzac.

Quant à l’image misérabiliste de pauvreté de l’Est du Val d’Oise, les élus en sont les premiers porteurs, croyant que de jouer les « pleureuses » leur permettra de récupérer moult aides nationales et européennes. Alors que la réalité s’avère beaucoup plus complexe : Roissy petit village de 2700 habitants et de 86000 emplois engrange des taxes juteuses, tandis que la commune voisine de Goussainville est une « commune-dortoir » très défavorisée [3].

Mais les images d’Épinal ont la vie dure, comme le mythe de « Roissy, manne d’emplois » qui continue à susciter les appétits des élus et l’admiration des pouvoirs publics (« ça fait des milliards » se réjouit M. Carenco, préfet d’Ile-de-France, dans une vidéo qui n’est sans rappeler la prestation de Louis de Funès dans La Folie des Grandeurs[4]), tandis que la « courbe de l’emploi » du pôle pique du nez (comme feu le Concorde) venant démentir cette vision idyllique. Mais n’anticipons pas sur le chapitre 2 du bêtisier d’Europacity : l’Emploi.


[1] Voir reporterre.net/5-minutes-d-une-video-detonnante-sur-le-fantasme-d-europacity

[2] Voir le site de l’ADVOCNAR qui lutte contre les nuisances aériennes et réclame des mesures anti-pollution : http://www.advocnar.fr/2016/12/communique-advocnar-pic-de-pollution-trafic-aerien-toujours-mis-a-contribution/

[3] Voir le texte « l’Est du Val d’OISE est-il un territoire pauvre ? » www.nonaeuropacity.com/informer/territoires-banlieues/lest-val-doise-territoire-pauvre

[4] Voir sur le site www.nonaeuropacity.com/non-classe/grand-paris-quand-jean-francois-carenco-fait-un-deni-de-democratie

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