Que s’est-il passé depuis notre article Romainville : le Syctom lance une concertation préalable pour la modernisation du centre de transfert et de tri des déchets ?
Cette concertation a commencé avec la réunion publique du 5 juillet (on y était - compte-rendu envoyé sur demande). C’est là que le Syctom a posé sa règle selon laquelle la participation aux 4 ateliers thématiques qui suivaient était conditionnée par la production d’une « contribution », soit d’une note écrite à transmettre au Syctom en amont de chacun des ateliers. Plusieurs personnes se sont insurgées contre cette limitation en nombre, au vu de l’affluence à la réunion publique (200 à 300 personnes environ selon moi). Le Directeur Technique du Syctom a fini par dire que s’il y en a plus de 30 qui font des contributions écrites par atelier, ils verraient… Ces ateliers à venir ont été aussi la raison invoquée pour ne pas donner de détails techniques sur les options, les différents procédés de séchage, de constitution des CSR.
Le public a demandé pourquoi l’option 3 : préparation des OMr et implantation d’une installation de combustion de CSR pour couvrir les besoins énergétiques du territoire en appoint de sources géothermiques à l’étude par l’EPT 8 - Est Ensemble a été maintenue dans les alternatives, puisqu’elle a été rejetée préalablement par la ville de Romainville et l’EPT Est Ensemble, et que le Syctom a régulièrement réaffirmé qu’il ne passerait pas en force contre l’avis des élus locaux ? On ne peut pas faire autrement, ont répondu en chœur Syctom et garant de la concertation. Mais après tout ce processus, la conclusion de la concertation ne tient pas compte des oppositions exprimées, et présente toujours l’option 3 !
Le point le plus important est apparu assez vite : Tous les participants ont plaidé pour la prévention et la pédagogie, nécessaires pour faire évoluer les pratiques de la société vers le tri à la source. Notons qu’à côté de la déchetterie, la création d’une ressourcerie/atelier de réparation est prévue dans les 3 options.
Quelle cohérence entre la collecte, en gestion locale, et le traitement (Syctom) ? Les réponses des élus et techniciens présents ont été décevantes en réunion comme en ateliers. Oui pour faire de la prévention, mais ce n’est pas notre rôle, c’est une compétence qui n’est prise en charge par aucune collectivité. Ce sont les territoires qui collectent, et la région a la compétence « déchets » (à travers son PREDMA, aujourd’hui PRPGD, plan déchets d’IdF). C’est la répartition des compétences qui freine. Absolument pas satisfaisant ni responsable comme réponse, au vu des enjeux sociétaux.
J’ai participé au premier atelier, jeudi 21 septembre, « Gisement à réceptionner à Romainville à l’horizon 2023 et 2030 », et j’ai donc produit une contribution dans laquelle je notais : Le dossier de concertation manque singulièrement d’éléments permettant aux habitants de s’approprier cette question du gisement à réceptionner. Les modalités retenues d’accès aux ateliers sont anti-démocratiques et socialement inéquitables, puisqu’elles privilégient uniquement les « sachants ».
Sur ce premier atelier thématique, ou sur les suivants, vous trouverez beaucoup de documents sur le site http://projet-romainville-bobigny.syctom.fr/dialogue-et-information/les-documents-dinformation-2-2/#1509717369603-5c6d9431-962c : diaporamas projetés, compte-rendu détaillés des ateliers, contributions des citoyens, et des associations Zéro Waste, Environnement 93 et Arivem, qui ont fait un travail d’expertise citoyenne remarquable.
Leurs hypothèses sérieusement travaillées d’évolution démographique et de quantité de déchets à traiter en 2023 et 2030 mettaient en doute certains chiffres avancés par le Syctom, lire par exemple http://projet-romainville-bobigny.syctom.fr/alexthibaud/, et le garant n’a pu faire autrement que de demander à chacun ses sources – nous verrons quelle est sa conclusion sur ce point. Anne Connan, parlant au nom du Collectif 3R (Réduire, Réutiliser, Recycler), a demandé : « L'extension des consignes de tri à tous les plastiques a fait l'objet sur le bassin versant du centre de tri de Sevran, d'une expérimentation financée par l'ADEME, puis de la poursuite de l'exploitation en "extension des consignes de tri" lorsque la période d'expérimentation a cessé. Nous souhaiterions que le Syctom communique les résultats de cette expérimentation et de l'exploitation depuis la fin de l'expérimentation » - réponse du Syctom sur http://projet-romainville-bobigny.syctom.fr/wp-content/uploads/2017/11/ContributionAnneConnan.pdf.
Et plusieurs fois une question est revenue : L’instauration de la tarification Incitative dans la Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères ne devrait-elle pas précéder le choix de nouveaux équipements de traitement sur le territoire d’Est Ensemble ? C’est sur ce point qu’on peut avoir des doutes sur la cohérence et le suivi des politiques d’Est Ensemble.
J’y ajoute une autre information à titre d’exemple. La collecte des bio-déchets sur l’ensemble du territoire d’Est Ensemble a été votée en commission d’Est Ensemble dès 2012/2013 (je le sais, je l’ai votée comme élu d’Est Ensemble à l’époque), bien avant les élections municipales de 2014, et la réforme de la métropole transformant l’EPCI Est Ensemble en Etablissement Public Territorial Est Ensemble. Pourquoi n’a-t-elle pas été appliquée dès 2013, ou depuis ? Une raison simple : ça coûte plus cher ! On préfère s’occuper d’aménagement – plus visible les bâtiments nouveaux… - que de notre vie quotidienne…
Les ateliers thématiques suivants avaient pour sujets « Economie circulaire, réemploi, valorisation matière et valorisation organique des biodéchets » (jeudi 28 septembre), « Les solutions techniques envisagées pour la gestion des ordures ménagères résiduelles (OMR) » (jeudi 12 octobre) « Intégration urbaine et logistique fluviale » (jeudi 19 octobre). Lors de la clôture finale, la faiblesse de l’information sur le processus de « concertation » soi-disant « exemplaire » a été relevée par de nombreu-x-ses habitants – contrairement aux affirmation de Neorama, la société recrutée pour la mettre en œuvre : les lettres d’information et les appels aux réunions d’ouverture et de clôture n’ont pas été distribuées dans toutes les boites aux lettres des habitant-e-s d’Est Ensemble, pourtant tou-te-s concernées.
Le sentiment d’une concertation biaisée est partagé, et l’association Zéro Waste représentée par Flore Berlingen a décidé d’adresser un courrier au Président de la CNDP signalant son désaccord avec la règle selon laquelle la participation aux ateliers thématiques était conditionnée par la production d’une « contribution », soit d’une note écrite à transmettre au Syctom en amont de chacun des ateliers. Selon l’association, cette règle constituait un obstacle à la participation des citoyens. Par ailleurs, Zéro Waste France est en désaccord avec les prévisions du Syctom, en comparaison avec la baisse tendancielle de la quantité de déchets et les objectifs de la LTECV : les prévisions du Syctom s’avèrent moins ambitieuses. Flore Berlingen revient sur la troisième variable à partir de laquelle se construisent les prévisions de gisements et signale que le territoire du Syctom souffre d’un retard important concernant la pratique du tri. Le taux s’élève à 13,4%, alors que des métropoles françaises obtiennent de meilleurs résultats, telles que Lyon ou Nantes.
Francis Redon pour Environnement 93 a présenté sa lecture de l’aspect qualitatif de la concertation, après le bilan quantitatif présenté par le Syctom, insatisfaisante, décevante, compliquée. Si la Charte de la participation du public affirme le pouvoir d’initiative du citoyen et le principe de co-construction, il s’interroge sur la manière selon laquelle les citoyens ont été écoutés. En ce qui concerne la solution n°2, des questions n’ont pas eu de réponse et les incertitudes demeurent sur l’appel à produire plus d’ordures générerait l’incinérateur appelé « chaufferie », et il craint l’émanation de nuisances olfactives suite à l’assèchement des déchets. Environnement 93 se positionne contre la solution n°2. Il insiste sur le fait qu’il existe des modèles à suivre en Seine-Saint-Denis : le SEAPFA (Syndicat d’Equipement et d’Aménagement des Pays de France et de l’Aulnoye) en charge de la collecte des déchets d’Aulnay-sous-Bois, du Blanc-Mesnil, de Sevran, de Villepinte et de Tremblay-en-France, dispose d’un réseau de déchèterie exemplaire.
Les conclusions du Syctom ?
• Plusieurs lectures des hypothèses de population existent représentant un différentiel d’environ 130 000 habitants (soit environ 2% et un différentiel d’environ 30 000 tonnes à comparer avec les 2,3 millions de tonnes de déchets traités par le Syctom).
• Les ratios de déchets à traiter par le Syctom à l’horizon 2030 envisagés par les différents acteurs divergent également.
• L’ambition vis-à-vis du développement des collectes sélectives multimatériaux et des biodéchets est partagée mais des avis divergent sur le calendrier de sa mise en œuvre.
• La réussite de la politique de gestion des biodéchets dépend directement de la mise en œuvre du tri à la source, de l’adhésion des habitants et de la généralisation de l’expérimentation en cours sur le territoire.
Le Syctom acte les différences d’appréciation, mais ne change rien à ses prévisions !
Pour conclure, reprenons les mots d’un contributeur : « Tous les arguments avancés pour la défense du projet n°1 me conviennent. Il serait bien que la voix de la majorité soit entendue », et 95% des contributions à la concertation, surtout celles déposées depuis la réunion de clôture, sont en faveur de l’option n°1.
Est-ensemble, réuni en Conseil de Territoire mardi 21 novembre, a confirmé ses positions du 23 mai 2017, et émis un vœu sur le projet de centre de traitement des déchets du Syctom à Romainville/Bobigny, par rapport aux trois scénarios toujours envisagés par le Syctom :
Vœu proposé par l’exécutif d’Est Ensemble sur le projet de centre de traitement des déchets du Syctom à Romainville / Bobigny
Le 19 juin 2017, le Syctom a engagé une concertation préalable sur le devenir du site de traitement des déchets de Romainville / Bobigny. Est Ensemble souhaite pleinement être associé au renouvellement industriel de cet équipement, au titre des compétences Aménagement durable et Développement économique, Écologie urbaine et Prévention et valorisation des déchets.
Cette concertation s’est déroulée sur une durée de cinq mois, autour de deux réunions publiques, quatre ateliers thématiques, une exposition itinérante et la mise à disposition de ressources documentaires.
À l’issue de cette période de concertation, le Syctom expose trois hypothèses techniques pour le traitement des ordures ménagères résiduelles sur le site de Romainville / Bobigny :
- Hypothèse 1 : « la modernisation du site », qui inclue la réception des bennes d’ordures ménagères et leur transport par voie fluviale et induit une politique ambitieuse de réduction des déchets menée par Est Ensemble pour atteindre l’objectif « zéro déchet » ;
- Hypothèse 2 : « l’optimisation de la logistique urbaine », qui prévoit la réception des bennes d’ordures ménagères, le séchage d’une grande partie des ordures ménagères résiduelles afin d’optimiser leur transfert, la constitution d’un stock tampon pour une partie du flux, et le transfert par voie fluviale ;
- Hypothèse 3 : « le traitement partiel », qui comprend la préparation de combustibles solides de récupération (CSR) à partir d’une partie du flux d’ordures ménagères résiduelles séchées, l’implantation d’une chaufferie CSR d’appoint à géothermie et le transfert par voie fluviale des produits séchés non valorisés sur le site.
Lors de son Conseil de territoire du 23 mai 2017, Est Ensemble a adopté à l’unanimité une note de positionnement relative au projet de ce centre de traitement des déchets, dans laquelle sont rappelés les objectifs de réduction de la production des déchets et de favorisation de l’économie circulaire.
Il y est également indiqué que « les élus se prononcent contre un projet d’incinération ou de combustion des ordures ménagères résiduelles sur le site de Romainville ».
Aussi, les élus territoriaux d’Est Ensemble, réunis en Conseil Territorial le 21 novembre 2017,
1. Rejettent le traitement partiel des déchets sur le site évoqué à l’hypothèse 3 ;
2. Prennent acte de l’hypothèse 1 de modernisation du site ;
3. Demandent des informations supplémentaires sur l’optimisation de la logistique urbaine prévue dans l’hypothèse 2, afin de juger de son opportunité et des garanties sanitaires et environnementales offertes à la population de notre territoire et d’ailleurs.
L’association des riverains Arivem a lancé en octobre une Pétition sur change.org que j’ai personnellement signée : Aux élus qui vont décider du sort du centre du SYCTOM de Romainville-Bobigny, nous disons : OUI à la solution 1 DE REHABILITATION DU CENTRE permettant le développement des collectes sélectives, du recyclage, de la réparation/réutilisation ; NON aux solutions 2 et 3 D'INTRODUCTION EN PLEINE VILLE DE TRAITEMENTS NAUSEABONDS ET NOCIFS.
En attendant les conclusions du garant de la CNDP sur cette concertation, rendues publiques le 7 décembre... et décision du Syctom le 21 décembre !